Chère Sophie,
Ces mots sont les premiers que j'écris dans ce cahier. Je ne sais pas si beaucoup suivront mais aujourd'hui j'ai besoin de ne plus être seule. J'avoue qu'écrire cela rend déjà ma vie dramatique alors que je n'ai encore rien raconté... et je n'ai aucune idée de ce que je veux raconter d'ailleurs.
Il ne s'est rien passé de particulier aujourd'hui, ou même dans ma vie, rien qui pourrait justifier cette envie soudaine de me confier, sans même savoir par rapport à quoi. Aujourd'hui a été une journée comme les autres, d'une banalité épuisante, aussi répétitive que l'aiguille d'une horloge qui ne cesse de tourner sans but précis mais qui a pour obligation de le faire. Cette vie monotone me convient. Répétitive, inintéressante, banale... ça me convient. Je suis heureuse comme ça.
Ça, c'est ce que je fais croire aux gens qui m'entourent, avec pas mal de succès. En réalité, je suis fatiguée. Je suis passée d'une enfance innocente et calme à une vie remplie de problèmes. Rien de bien méchant, des petits problèmes de tous les jours, plus ou moins importants, mais qui, au fil des années, s'entassent et envahissent chaque recoin de mon être. J'ai appris à prendre sur moi et je garde tout. Seulement, je suis arrivée à un stade où je ressens tellement de choses, tellement fort, que je ne ressens au final plus rien. Comme si j'étais vide. Comme si tout ce que je vivais était devenu une habitude, quelque chose à laquelle je ne fais maintenant plus attention. Je sais que c'est surprenant de parler ainsi des émotions mais c'est en moi, c'est comme ça, et je ne peux rien y faire. Evidemment, il y a toujours des moments où je suis heureuse ou triste ou en colère, mais c'est toujours dans l'excès. J'ai l'impression de ne plus pouvoir ressentir quelque chose à une intensité normale. C'est tellement fort que ça en devient douloureux. Et ce « problème d'émotions », comme j'aime l'appeler, me fatigue.
Très peu de personnes peuvent comprendre ce que j'essaye d'expliquer mais je sais que toi, même si tu ne me comprends peut-être pas, tu ne me jugeras pas. Cher cahier, chère Sophie, j'espère que tu me suivras jusqu'au bout de ce voyage effrayant et que la fin ne me fera pas regretter d'avoir écrit le début.
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Chère Sophie...
JugendliteraturJournal intime d'une jeune fille qui ressent le soudain besoin de se confier. Elle ira à sa première soirée et en reviendra changée... Que s'est-il passé à cette fête pour qu'elle en arrive là ? /!\ La scène d'un chapitre peut choquer | Pour public...