Le soleil est encore haut dans un ciel bien dégagé, j'ai un peu de temps avant qu'Elya ne finisse de travailler.
La sensation de l'eau sur mes membres me procure déjà un apaisement considérable. Lorsque ma queue de sirène aux écailles bleues scintillantes apparaît à son contact, je ne peux réprimer un frisson de bien-être.
Je n'ai pas les oreilles pointues et les doigts palmés comme mon père, qui est un triton à part entière, mais ce sont les seules différences physiques que me donne mon statut de sang-mêlé. Quelques tâches d'écailles apparaissent sur mon corps, ainsi que sur ma poitrine, comme les autres, et ma queue est également tout à fait conforme, avec des nageoires sur les côtés pour m'aider à bouger plus aisément, ainsi qu'une nageoire dorsale plus imposante qui apparait au niveau de mes reins jusqu'à la moitié de ma queue, et me donne plus d'équilibre dans mes déplacements.
Je ne suis cependant pas aussi souple et agile que mon père, ou que les autres sirènes que j'ai pu croiser, et je ne le serai sans doute jamais totalement. Mais cela ne m'empêche pas de profiter à fond de ma nature aquatique qui me permet de rester sous l'eau sans respirer pendant plusieurs heures, de voir dans le noir, ou encore de descendre à des profondeurs inatteignables pour un humain.
Gardant en tête mon idée de "scanner" mentalement l'eau et d'essayer prudemment quelque chose avec ma magie, je prends le temps de m'éloigner de plusieurs kilomètres de la côte. Une petite voix, fugace, me rappelle l'histoire du distributeur qui ne date que de quelques heures, mais elle est vite étouffée par la certitude de ne pas pouvoir faire de dégât au milieu de rien.
Le visage pathétique du cuisinier me revient et me fait rire toute seule. Je remonte à la surface et vérifie, la tête hors de l'eau, que l'endroit est désert.
La terre est loin, et il n'y a pas de bateau à des kilomètres à la ronde. Parfait.
Je replonge et me tiens immobile à quelques mètres de la surface, faisant le vide dans ma tête. Encore une fois, ma putenza – indubitablement source de ma magie autant que de mon pouvoir télépathique – se liquéfie rapidement dans mon esprit afin de réaliser le balayage géomagique de mon entourage. Juste quelques mètres de diamètre.
Je reste quelques instants à contempler le résultat de l'hologramme mental, émerveillée.
C'est magnifique. Pas de fils bleus qui prennent la forme des reliefs, puisque je suis entourée de l'océan infini. Ce vide rempli d'eau, qui me fascine et m'apaise, est devenu une étendue d'un bleu scintillant et vibrant, splendide, qui ne demande qu'à s'animer sous la force de ma magie.
J'aimerais la faire tourner doucement autour de moi, pour qu'elle me porte et que je tourne avec elle.
Le scanner magique étant statique, je dois maintenant faire sortir mon énergie de ma putenza pour qu'elle agisse. Lorsqu'elle entre en contact avec l'eau, celle-ci brille encore davantage. Comme me l'a expliqué rapidement Maître Océana quelques minutes plus tôt, je me concentre sur une partie de l'eau que je capte, puis l'imagine en train de bouger, tout simplement.
Rapidement, elle se met en mouvement. Et mon corps tourne alors lentement sur soi-même, sans bouger le moindre petit doigt, ni la moindre petite écaille.
J'ouvre les yeux tout en continuant à contrôler l'eau, pour vérifier que je suis bien en train de bouger. C'est le cas.
Une sensation de joie et de fierté monte en moi. Avec de l'entraînement, je vais pouvoir être aussi rapide, voire plus, que la plupart des sirènes !
Déjà, je tournoie plus vite, plus loin, sentant l'eau me propulser avec davantage de force.
Et qui sait ce que je vais pouvoir faire d'autre ?
Si je peux faire bouger l'eau à ma guise, sans doute puis-je aussi l'immobiliser ? Ou faire se soulever des vagues ? Me propulser à la surface pour sauter comme un poisson volant ?
L'idée me tente bien, mais ce n'est pas vraiment raisonnable. Je décide de m'arrêter là pour aujourd'hui, me souvenant du conseil que m'a donné Maître Océana concernant l'énergie non-infinie.
Je viens de créer avec ma magie un mini tourbillon duquel je sors, commençant à avoir le tournis. Satisfaite, je calme ma magie qui arrête de pousser l'eau.
Je m'attends à ce que le tourbillon s'arrête tout naturellement, mais ce n'est pas le cas. Est-ce que je dois faire autre chose pour annuler mon action sur mon Elément ? Je ne me souviens pas d'avoir entendu cela dans mon cours. Il n'y a pourtant plus rien qui la pousse, puisque ma magie n'est plus en action... Pourquoi le tourbillon continue-t-il à tourner ?
Je commence sérieusement à m'inquiéter lorsqu'il se met à grossir, puis à atteindre la surface. Je dois m'en éloigner pour ne pas être emportée par le courant qui ne cesse d'augmenter.
Il faut que ça s'arrête !
Je nage rapidement jusqu'à la surface pour vérifier que personne n'est dans les parages, dans l'idée de réactiver ma magie pour stopper le phénomène devenu incontrôlable. Mais lorsque ma tête sort à l'air libre, une voix forte m'interpelle, passant par-dessus le bouquant que fait maintenant l'espèce de siphon de plusieurs mètres de diamètres :
― Sarah ! Arrête-ça tout de suite !
Je me tourne vivement vers la source de la voix et faillis avaler la tasse de surprise en voyant un homme voler à quelques centimètres de la surface.
Chauve, la cinquantaine, grand et sec, et la veste grise volant au vent.
Je l'ai déjà vu le jour de mon arrivée à l'Académie. Et le souvenir n'est pas très bon. Qu'est-ce qu'il fait là ? Il me surveillait ? Je me reprends : ce n'est pas le moment de penser à ça !
― Ce n'est pas moi ! crié-je à mon tour pour qu'il m'entende, essayant de rester à la surface malgré les vagues qui commençent à être imposantes.
― Et qui d'autre ?!
C'est une bonne question. Je suis pourtant sûre d'avoir arrêté le flux de ma magie avant que le tourbillon ne prenne ces proportions démesurées !
Comme je me retourne vers le phénomène dans l'optique d'essayer de le calmer, l'homme dit encore sur un ton autoritaire :
― Ne touche plus à rien ! Je m'en occupe !
Frustrée, mais obéissante, j'observe le – sans aucun doute – Mage de l'Air voler au-dessus du trou d'eau béant et écumant, puis se concentrer pour utiliser sa magie.
Peu à peu, la mer se calme et reprend sa forme initiale, à mon plus grand soulagement.
Mais ce sentiment est de courte durée, vite balayé par la remarque du Maître de l'Air, toujours en lévitation à quelques mètres de moi :
― Rendez-vous dans le bureau de Maître Océana. Dans l'heure. Sans faute !
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Hello hello mes petits (et grands) poissons ! Vous allez bien ? 😁
Est-ce que ça vous plaît ? Dans quel pétrin s'est fourrée Sarah, dites-moi ? 🫣
Vous vous attendez à la suite ? 😏
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Gris tempête (tome 2)
ParanormalSuite de "BLEU OCEAN" qu'il faut lire absolument avant ! 😊 ********************************************************* « Une vie tranquille après la tempête ? Ce n'est visiblement pas le programme qui m'attend... Après avoir nagé dans les profondeur...