5 décembre 2024
Noraï n'avait pas menti, la clairière qu'elle avait mentionné précédemment se trouvait à seulement une demi-heure de leur emplacement. Bien sûr, à part Noël, tous eurent l'impression que plusieurs heures s'étaient écoulés, un des effets étranges de la forêt qui faisait passer le temps bien plus lentement. La forêt. Elle semblait être la cause de tous leurs malheurs d'après ceux qui étaient là depuis le plus longtemps. Noël attendait impatiemment leurs explications, et c'est quand ils furent arrivés que son impatience empira. Elle les pressa à s'installer rapidement sur des rochers au milieu de cette étendue d'herbe morte et terne, entourés par ces sapins qui perdaient leurs épines.
-C'est bon maintenant, vous êtes décidés à m'écouter ? les interrogea Noraï.
Tous hochèrent la tête, Eylé semblant être le plus méfiant et Noël la plus décidée.
-Très bien, je vais commencer par ce que nous savons tous, sauf toi, dit-elle à l'intention de cette dernière. Je vais essayer de faire vite sans oublier de détails.
Elle prit une longue inspiration, et la jeune fille se prépara mentalement pour toutes les révélations à venir.
-Tout d'abord vous savez que cette forêt est infinie...
-Comment ça ? l'interrompit déjà Noël.
-Et bien elle n'a pas de fin. Il n'y a pas de frontières, elle ne s'arrête jamais. Tu comptes m'interrompre à chaque phrase ? Parce que ça va pas le faire, râla Noraï.
-Désolée, je me tais.
-Merci. Je disais donc que cette forêt est infinie et que des personnes amnésiques se réveillent ici depuis des années. 259 pour être précise.
Les regards interloqués posés sur elle la força une nouvelle fois à s'arrêter, à son plus grand désespoir.
-Nous les lutins, habitons ici depuis bien plus longtemps, ajouta-t-elle pour se faire comprendre. On a connu la forêt avant même qu'elle ne commence à partir en vrille. Je suis vieille, je sais, vous n'êtes pas obligés de me le rappeler, merci bien. Je continue donc mon récit. La forêt a commencé à mourir à peu près en même temps que le début de votre arrivée, et pendant un temps il fut difficile de déterminer si les personnes amnésiques étaient arrivées avant ou après. Nous sommes désormais sûrs que la forêt est mourante depuis plus longtemps. Enfin bref. Les lutins pensent depuis toujours, malgré nos vérifications, que c'est votre faute si notre lieu de vie est dans cet état. Et vous, vous pensez le contraire.
-Vous êtes ici depuis plus longtemps, comme tu l'as fait remarqué, précisa Eylé. On aurait tendance à vous accuser pour cette raison.
-Je comprends mais non. Je vais expliquer depuis le début, et par pitié, ne me coupez pas. Donc c'était il y a exactement 260 ans, mes compagnons et moi-même travaillions depuis plusieurs siècles avec le père noël et le père fouettard. Je vais vous donner leurs noms, ce sera plus simple. Le premier se nomme Klaus, on le sait tous, et le second Hans. Donc ces deux-là, qui sont frères, précisons-le, préparaient des cadeaux depuis des siècles pour les enfants du monde entier. Klaus se chargeait de donner de bons cadeaux aux enfants sages, et Hans distribuait du charbon aux plus vilains. Seulement, au bout de plusieurs centaines d'années à travailler ainsi, Hans en eut marre de tenir le mauvais rôle. Il est alors parti, il y a 267, et on a dû travailler deux fois plus dur les années qui suivirent. Mais on était à bout, Klaus nous en demandait toujours plus. Alors on a fait grève, mais il n'a pas changé ses habitudes. On est donc partis, le laissant en plan. L'année 1763, aucun enfant ne reçu de cadeaux. L'année qui suivi se furent les parents qui gâtèrent leurs progénitures, et ce jusqu'à aujourd'hui. Nous avons essayé de retrouver Klaus l'année suivante mais il demeurait introuvable. Puis des gens amnésiques sont arrivés, et les miens ne trouvèrent rien de mieux que de rejeter la faute sur des innocents.
A peine eut-elle finit son discours que tous reprirent leur respiration. Ils avaient cessé de respirer le temps de son récit, scotchés à ses lèvres.
-On dirait une histoire disney... commença Tchan. Mais qui fini mal.
Noraï haussa les épaules.
-Je viens du même endroit que vous, et je ne rêve que d'une seule chose depuis des siècles : rentrer chez moi.
Un détail attira l'attention de Noël au milieu de cette triste révélation :
-Tu viens de dire que tu viens du même endroit que nous ?
-Oui, enfin la Terre. Mais ça vous vous en souvenez à priori. Ici nous sommes dans une réalité parallèle. Seuls Klaus et Hans peuvent la quitter, et ils ne le font que le soir de Noël... Enfin ils le faisaient. Ils ont toujours refusé de nous emmener avec eux, ils répétaient sans cesse que l'on n'était pas prêts. Je pense surtout qu'ils ne voulaient pas perdre leurs précieux ouvriers, ce qui est plutôt raté si vous voulez mon avis.
-C'est horrible, on dirait des prisonniers, s'indigna Mandraa.
-Peut-être, murmura Noraï en levant la tête vers le ciel.
Aucun n'eut le courage de la couper dans sa contemplation. Enfin, jusqu'à ce qu'une question refasse surface dans l'esprit de Noël.
-Est-ce que je peux vous demander quelque chose ?
Elle fut heureuse de voir ses compagnons de route acquiescer, et demanda alors sans plus attendre :
-Pourquoi est-ce que des gens ont voulu me tuer ? Et ça a un rapport avec le fait que vous m'appelez sorcière sans raison apparente ?
Leur silence lui fit peur, et c'est quand leurs regards se croisèrent dans une confirmation silencieuse qu'elle comprit qu'elle allait enfin avoir une réponse. Elle sentit qu'elle allait devoir s'accrocher, surtout après les premières révélations de Noraï qui lui avait déjà retourné le cerveau.
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La forêt des souvenirs
FantasyDans 24 jours c'est Noël. Cette simple phrase est la plus importante dans l'esprit de cette jeune fille. Elle qui s'est retrouvée amnésique dans une forêt plus qu'étrange et maléfique se pose milles questions sur sa venue en ces lieux et les étrang...