The WFTD Awards 2015

Concours d'écriture #3

Auteur: AmyTL5

Poussée sans ménagement à l'intérieur de cette pièce, je garde de justesse l'équilibre. Après avoir dangereusement tangué vers l'avant, mes jambes me soutiennent. J'ai cet inévitable reflexe de me retourner vivement ensuite pour voir l'éclairage externe disparaitre derrière la lourde porte qui se referme sur moi. Ce lieu qui m'est inconnu est sa trouvaille.

Je pourrais agir comme dans un film ou un roman : me ruer sur cet obstacle hermétique, animée par un instinct de survie décuplé, effrayée mais avec l'espoir ancré en moi. L'Espoir qu'en tambourinant, poussant ou tirant de toutes mes forces, en criant à l'aide, un miracle surviendra.

Je me retrouverai libre. Saine et sauve.

Cependant il n'en est rien. Ce n'est ni un film, ni un roman. C'est juste moi dans l'obscurité face à une mort invisible encore mais certaine. Et ma liberté je m'en emparerai autrement. Il le saura bien assez tôt.

« Respire Amy. Surtout respire. »

Lentement, je fais un tour sur moi-même. Mes yeux se plissent machinalement pour tenter de s'accommoder à la pénombre. Cependant passer d'une vive lumière à cette obscurité déstabilise ma rétine. Je ne distingue pas grand-chose pour l'instant.

Et puis, ma vue n'est pas le seul sens qu'il faut que je régule. Les autres aussi ébranlés, se mettent également en éveil.

Une bouffée de chaleur sème des picotements sous mes aisselles.

Mon cœur et ma respiration prônent l'anarchie. Mes mains moites tremblent légèrement. Je les frotte contre mes cuisses et croise mes bras sur moi. Comme pour me bercer, apaiser l'infime part en moi qui cherche à céder à la panique. Je vais suivre mon plan.

« Continue de respirer Amy. »

Je m'y applique et emplis mes poumons de cette odeur de renfermé. Où poussière, humidité, manque de soleil et d'aération ont dû contribuer à repeupler le monde des acariens et autres bactéries. Qu'ils vivent donc et s'épanouissent en ces lieux si sinistres.

La mort elle, s'épanouit en moi. Elle y a été introduite par défaut. En revanche, elle se déploie avec ma permission. D'ici soixante minutes... Non, approximativement cinquante-cinq maintenant, elle aura gagné. M'aura fait gagner en m'emportant loin de tout ceci.

C'est ce qu'il faut que je leur explique. Si seulement j'avais de quoi écrire.

Laisser une empreinte, un « POURQUOI» avant de partir. J'ai conscience qu'il n'y a rien de pire pour ceux qui restent que de ne pas avoir d'explication. Qu'ils n'aient pas à culpabiliser de n'avoir rien vu, rien su. Qu'ils n'aient pas à se demander :

- Aurais-je pu empêcher Amy de mettre fin à ses jours ?

Je leur dois au moins des mots. Mes mots resteront pour eux, mes proches, tandis que je m'accrocherai à mes maux jusqu'à mon dernier souffle. Enfermée, seule entre ces quatre murs.

J'inspire. J'expire. Le calme gagne du terrain sur l'anarchie initiale. Mon cœur retrouve progressivement un rythme normal.

Mes prunelles s'habituent enfin à l'environnement. Des contours se profilent. Ceux d'un unique objet dans ce vide. Pas de meuble, aucune trace de confort.

Simplement une machine à écrire avec une feuille qui me semble immaculée, posée à même le sol.

Le strict nécessaire dans ma situation. Un dernier petit signe en soi, que je suis fébrile d'avoir à ma portée. Un peu comme voir sa dernière volonté se matérialiser.