L'avalanche

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5h :

Normalement je devrais être sur le flanc de la montagne depuis 30 minutes pour partir vendre mes marchandises jusqu'à Bramans mais, à cause de l'accident de la nuit, je reste pour déneiger le chalet et aider les voisins. Avérole n'est plus, pour le moment. Les avalanches constituent un véritable traumatisme par chez nous, en particulier depuis celle qui a eu lieu en 1901 et qui a emporté une compagnie de chasseurs alpins au-dessus de Bessans.

Une épaisse couverture blanche mêlée de pierres et de morceaux de sapin s'est abattue en grande partie sur notre hameau. Un silence angoissant, à peine troublé par quelques cris de bêtes, s'installe. Les premières lueurs du jour nous font découvrir un spectacle effrayant. La chapelle Saint Pierre s'est effondrée. Des graviers, de la neige recouvrent la route, ce qui rend difficile chaque déplacement. Mais ce n'est pas le plus tragique : le toit de la grange de la famille Chappaz a cédé sous le poids de l'avalanche et un troupeau de moutons reste prisonnier. La neige se teinte peu à peu de rouge, il faut agir vite, pour sauver les quelques bêtes encore en vie.

La montagne, qui nous offre de merveilleux paysages, peut être cruelle et tragique.

Aux alentours de 7h :

Notre chalet dégagé du surplus de neige qui le recouvrait quelques heures auparavant, commence à retrouver son aspect habituel.

Les cheminées fument comme jamais pour que la neige fonde.

La famille Chappaz a eu moins de chance : leur troupeau de moutons, prisonnier de la muraille de neige, a péri. Leur chaude laine n'a pas pu les protéger du froid.

Je me demande si le prêtre et les villageois volontaires vont réussir à désencombrer le monument religieux qui est recouvert de gravats. Je passe donc voir ces hommes.

La chapelle ressemble à une colline écorchée. La neige retournée et pleine de terre ne brille plus. Des branches de sapins parsèment le toit.

19h :

Les chalets ont retrouvé leur chaleur et les habitants leur bonne humeur.

La plupart des habitations est dégagée. La chapelle Saint Pierre a subi un grand nettoyage général. Le feuillage vert et la neige qui la recouvraient ont laissé place à des hommes qui remplacent les lauzes du toit. Nous allons passer à table. La journée de demain ressemblera à une journée habituelle.

Le journal d'un colporteurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant