3. Valentina - Arsène : Deer, dear delicious food

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Valentina et Arsène avaient grimpé les escaliers de bois, un à un. Ils avaient même sentis un léger tremblement sans pour en déterminer la cause. Ils étaient arrivés au premier étage, plus éclairé que le rez-de-chaussée grâce aux multiples fenêtres. Entre le givre et la poussière, on pouvait presque voir les quelques faibles rayons du soleil. Le matin sembla rassurer Valentina. Elle se dit que qui que ce soit, il n'essayerait rien de jour. Ainsi, ils avaient la possibilité de surveiller la maison jusqu'à ce que le soleil éclaire suffisamment pour être en sécurité, ils descendraient au village et demanderaient un téléphone pour appeler la police.

Arsène était pourtant plus ratatiné sur lui-même, voire un peu pâle. Il n'avait pas revu de mort depuis qu'il était jeune, à l'enterrement de sa mère. Et celui-là... Quelques secondes avant il lui parlait encore. Que serait-il arrivé s'il était resté dans la cuisine ? Serait-il mort aussi ? Il eut un frisson, il n'aimait pas envisager cette possibilité. Et la lettre griffonnée qu'ils avaient trouvée sur le cadavre du jeune indien. Quelqu'un cherchait à les atteindre, et ce n'était pas qu'un simple jeu : il y avait un mort. Et ces clôtures électriques, si c'était vrai, ils étaient piégés.

Il n'en restera qu'un.

Pas possible. Pas possible que leurs vacances de rêve tournent autant au cauchemar à peine après une journée arrivée ici. Et si c'était le village indien ? Ils n'auraient pas fait ça à un des leurs, Arsène connaissait ces tribus rustiques : ils étaient très solidaire. Juste un psychopathe qui les aurait pris comme cible ? Mais pourquoi ? Ça n'avait aucun sens. Aucun foutu sens. Il décida d'oublier et regarda Valentina, elle semblait bien plus confiante.

« Ça va ? demanda-t-il sans réfléchir. »

Il comprit vite son idiotie. Elle le regarda et sourit gentiment, on aurait dit qu'elle compatissait. Elle essaya de parler avec ses mains, mais Arsène l'arrêta.

« Attend, je comprends rien au langage des signes, désolé. »

Elle fit une moue amusée. Elle lui fit quand même un signe, comme un rouleau avec ses doigts.

« Tu... Tu veux que je continu à parler ? » Elle acquiesça, il sembla heureux.

« Super, alors je vais faire un monologue pour combler le vide. Même si on a un mort sous nos pieds. » Elle l'encouragea. « Je sais pas ce qu'il se passe, à vrai dire j'ai peur. Je suis venu ici juste pour... être avec vous. Enfin, surtout Jaden tu sais. Tu dois t'en douter, hein. Il est, je sais pas, attirant et pourtant il me traite comme un chien. »

Il marqua une pause, et commença à fouiller dans une armoire. Bien sûre elle était vide, mais Valentina vint faire la même chose sur les autres meubles.

« T'as l'air très proche de Monica. Elle a un caractère bien trempé ! Et je sais que, enfin, elle me regarde. Je suis désolé, vraiment, pour elle. Mais j'y peux rien, c'est comme ça. Bon, on ferait mieux de s'assurer que tout va bien ici et après on attend les autres. »

Elle hocha la tête. Ils ouvrirent la première porte ; c'était une chambre avec un lit double au milieu. Très peu éclairée et meublé d'une chaise et d'un petit bureau. Ils ouvrirent une autre porte, la pièce était identique à l'autre. Ils en virent deux autres. L'espace semblait immense. Ce manoir aurait vraiment été fantastique s'ils ne craignaient pas pour leur vie à cet instant.

Valentina s'approcha de la dernière pièce pendant qu'Arsène s'était assis pour se reposer. Doucement, elle tourna la poignée et ouvrit la porte. Il n'y avait rien à l'intérieur excepté un petit lit et une grosse armoire. Elle se plaça devant, et l'ouvrit petit à petit. Quelque chose de noir se glissa en dessous, Valentina baissa la tête et fut horrifié : il en sorti une bonne centaine d'araignées noires et poilus. Elle en avait la phobie. Elle ouvrit la bouche pour hurler mais il n'en sortit qu'un pitoyable gémissement presque inhumain, elle abandonna cette idée. Ça ne lui servait à rien d'essayer, jamais elle ne parlera. Plusieurs de ces immondes créatures lui grimpèrent dessus, elle fut prise de tremblement, elle tapa partout sur ses jambes, elle sauta sur le lit et pleura en boule.

Arsène avait entendu son 'cri' il s'était levé précipitamment et l'avait rejointe en courant. Il avait vu ce spectacle et il lui avait fait pitié. Pas péjorativement mais à ce moment-là il aurait aimé pouvoir l'entendre crier. Il arriva et chassa toutes les araignées, puis il attrapa la main de Valentina et la sortie d'ici : il l'emmena et épousseta ses vêtements pour la rassurer.

« T'inquiète pas, ça va maintenant elles sont partie, tu es en sécurité. Assieds-toi. »

Valentina se posa sur le rebord de la fenêtre, elle serra ses bras. Arsène partit fermer la porte mais il découvrit un papier d'un ancien journal dans l'armoire. Il le prit et le lut devant Valentina.

Expérience scientifique clandestine arrêtée, les coupables se rendront au procès pour viol de l'éthique.

Ah. Ça n'a rien à voir avec notre problème, se dit le jeune homme en jetant le papier. Ils attendirent quelques longues minutes en contemplant l'extérieur. La tempête s'était calmée mais l'eau coulait encore partout sur le sol. Les arbres de la forêt semblaient secoués, quelques-uns étaient arrachés. Ça avait été violent.

Arsène se leva.

« Vient, on retourne au salon, ils sont peut-être arrivés. »

Valentina se leva aussi à son tour mais au moment où elle détourna les yeux, elle vit une tâche noire bouger. Elle s'arrêta et plissa les yeux. Il y a avait un animal qui sortait de la forêt, un cerf. Il en sortit un autre derrière, puis un suivant. Sous ses yeux ébahis, un troupeau entier de centaines de ces magnifiques bêtes vinrent entourer la maison. Valentina courut rattraper Arsène et elle lui montra ce qu'il se passait dehors.

« Ouah... » Il ouvrait la bouche devant ce spectacle. C'était fascinant d'en voir autant, rassembler ici. Ils mangeaient doucement et pourtant on aurait dit qu'ils étaient là comme attirés. Comme un message. Un cerf, c'était un animal très admiré chez les indiens, à la fois signe de vie, et signe de mort. Même à la chasse, c'était un animal digne qui méritait tous les honneurs. A la chasse.

Soudain, l'un d'entre releva la tête. Il brama. Les autres relevèrent aussi la tête en direction de la forêt. La suite se déroula tellement vite, Arsène et Valentina ne savait même pas s'ils pouvaient croire ce qu'ils avaient vu. Ce qu'ils savaient c'est qu'ils étaient terrorisés.

Une créature mi humaine mi zombi sortit en trombe d'entre les arbres. Les cerfs s'éparpillèrent en criant de peur. D'autres créatures sortirent partout, elles se jetèrent sur les animaux affolés. L'une d'entre elle sembla enfoncer sa main dans le pelage d'un cerf, il brama de douleur et s'écroula. Une dizaine de zombis se jetèrent sur la pauvre bête. On aurait dit qu'ils la mangeaient. Quand ils se retirèrent, il ne restait qu'une carcasse sanguinolente.

Les créatures rôdaient en bas de la fenêtre.

Arsène et Valentina tremblaient. Ils suaient, les yeux exorbités.

« Putain... »

Une de ces atrocités leva sa tête et plongea son regard vide de pupille dans celui des deux adolescents pétrifiés. Ses chairs semblaient putrides, il marchait à quatre pattes comme une bête et sa peau était tannée. Un indien... Il les regardait comme de la nourriture.

Les zombis commencèrent à s'en aller en poussa des gémissements aigus. L'un d'entre eux passa devant la voiture de Jaden, il planta ses griffes dans un pneu. Ils ne pourraient pas sortir.

Arsène et Valentina n'avaient pas bougé, ils avaient les larmes aux yeux de terreur. Impossible... Impossible. Comme pareil chose pouvait exister ? Elles rodaient. Ils ne pourraient pas sortir. Arsène ouvrit la bouche mais eut du mal à articuler.

« On va mourir. »

*

Plus haut : Valentina.


Wrong place, wrong timeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant