10. Carlita - Yghni - Valentina - Monica : The hospital will keep the doors open

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« Ding, dong... »

La cloche semblait amener quelques chose de terrible avec elle, et pourtant elle sonnait indifférente aux deux jeunes filles sans défenses. Des bruits se firent entendre dans la forêt, des frôlements et des craquements de branches ; Yghni se plaqua contre sa sœur. Carlita brandit son simple couteau de cuisine, un frisson dans l'échine : des poupées vivantes, des cerfs étranges où des zombis ? Elle ne savait plus à quoi s'attendre mais ce qui était sûr c'est qu'elle ne voulait pas attendre la mort. Elle empoigna fermement la petite fille au cache-œil et commença à reculer. Des pairs d'yeux rouges apparurent entre les arbres. Les zombis, évidemment.

Les jeunes filles se retournèrent brusquement et elles détalèrent dans la direction opposée. Elles entendirent des feulements aigus et les créatures se jetèrent leur poursuite. Carlita accéléra le rythme elle tirait derrière elle sa petit sœur. Son cœur battait à tout rompre dans sa poitrine et son souffle était court mais elle accélérait toujours plus. Elle ne se rendit même pas compte qu'elle pleurait de peur.

Yghni trébucha et Carlita se retourna vers elle. Pendant l'espace d'une seconde, elle sentit l'envie de l'abandonner à son sort et de s'enfuir. Puis elle se reprit.

« Merde... »

Elle se jeta sur la petite fille et la releva automatiquement. Elles reprirent leur course, les zombis se rapprochaient de plus en plus. Puis la forêt s'arrêta d'un coup, les arbres étaient derrière elle. Un trou béant et brut se trouvait devant. Carlita se stoppa, agita ses bras et recula d'un pas avant de tomber. Elle rattrapa sa sœur au vol et tourna sa tête : le silence était revenu, plus de feulements, plus de course effrénée. Une fois de plus les zombis n'était pas sortis de l'ombre des arbres, comme si la forêt leur offrait une protection vitale. Ou comme si ils ne pouvaient pas accéder à l'extérieur.

Les deux jeunes filles se penchèrent légèrement vers le ravin qui se creusait sur plusieurs mètres. Un torrent de boue s'écoulait follement. Puis elles se mirent à entendre une voix qui semblait lointaine, un peu désespérée, qu'elle reconnaissait plus ou moins. Yghni avança juste devant sa sœur, elle suivait la voix le long du ravin. Au loin elle aperçut une silhouette : Valentina semblait penchée au-dessus du vide. Yghni courut vers la jeune femme, Valentina eut à peine le temps le temps de l'apercevoir que la jeune fille se jeta dans ses bras et l'enserra.

« Tu vas bien ! » s'égosilla la petite toute contente.

Après la surprise, elle trouva ça adorable. Cette petite fille était candide. Carlita arriva derrière en boudant un peu, elle était jalouse et se fichait un peu de les retrouver en vie ; l'importance était de s'enfuir, pas de s'encombrer. Elle n'aimait pas beaucoup Valentina.

La muette se détacha de l'emprise d'Yghni en indiqua soudainement quelque chose dans le ravin : Monica, trempée, gisait pitoyablement sur une pierre au bord du torrent. Elle leva les yeux vers les files et tendit une main en murmurant quelque chose. Carlita recula.

« Carlita, la supplia Yghni, on ne peut pas la laisser là... Elle va mourir. » Sa sœur ne réagit pas. « J'ai cru que tu étais un héros, Arsène m'avait dit que tu n'en étais pas capable.
- La ferme ! »

Yghni s'arrêta net, jamais sa sœur ne lui avait parlé comme ça. Elle vit la femme soupirer puis avancer au bord du ravin. Doucement, Carlita descendit ses pieds et trouva une prise sur lequel s'appuyer : la pente n'était pas totalement droite et elle avait souvent pris des cours d'escalade avec ses amis pour échapper aux flics qui leur courraient après. Lentement, la jeune femme descendit et rejoingnit plutôt facilement Monica.

« Merci ! Merci ...
- Ouais ça va, je fais ça pour ma sœur. Lève-toi.
- Je ne peux pas ...
- Je ne vais pas te porter !
- Je veux dire, je crois que je me suis cassée la jambe.
- Merde ! »

Carlita tenta de réfléchir mais le bruit de l'eau était infernal. D'un coup elle se pencha et aida Monica à se relever en prenant son bras sur l'épaule. Elle força la blonde à commencer à grimper, lui servant d'appui pour sa jambe cassée. Elle n'écoutait pas ses gémissements de douleur, il fallait qu'elles avancent et ce serait avec ou sans elle : elle n'hésiterait pas à l'abandonner, Monica le savait.

Quand elles furent à porter, Valentina tendit les bras et, aidée d'Yghni, elle hissa de toutes ses forces la blessée hors du ravin, Carlita suivit.

« Aller, il faut qu'on parte, maintenant. »

Sans même s'occuper des deux autres, elle attrapa sa sœur et reprit la marche. Valentina aida Monica du mieux qu'elle put mais elle souffrait visiblement. Au loin, Carlita aperçut un bâtiment qui semblait immense et fermé. La nuit commençait à tomber et elle décida d'aller se réfugier là-bas. Après de longues minutes de marche, elles arrivèrent devant : une pancarte affichait le nom de « Durn Hall Hospital ».

« C'est un vieil hôpital, annonça Carlita.
- Parfait, on trouvera peut-être quelque chose pour ma jambe.
- Mmh. »

La porte était fermée de l'intérieur, prouvant que le bâtiment devait être sûr. Carlita brisa une vitre juste à côté et se hissa à l'intérieur. Elle se coupa légèrement la hanche avec un débris de verre.

« Merde ! »

Elle se dirigea vers la porte, débloqua le verrou et ouvrit. Les trois filles la rejoignirent. Elle se trouva dans un bâtiment froid et totalement silencieux. Les vieux objets jonchaient le sol comme si on avait fait pause dans le temps. Dans la salle de sécurité juste à côté elles trouvèrent trois lampes de poche et des piles. Elles purent s'éclairer. Le long couloir s'étendait devant elles, les escaliers pour monter aux étages étaient condamnés, et des salles étaient équipées de vieux lits et de vieux instruments médicaux. Plus loin dans cet hôpital, Valentina trouva une ancienne pharmacie avec des bandages, des béquilles et beaucoup de médicaments. Ceux-ci étaient périmés depuis plus de cinquante ans. Elle fit néanmoins un plâtre de fortune à son amie qui gémissait puis lui donna les béquilles. Monica put les suivre seule.

Carlita avait veillé pendant tout ce temps mais le calme semblait être total, cet endroit était épargné de l'apocalypse zombifique qui se passait dehors. Elle souffla un coup et se soulagea : elle s'installa dans une pièce au fond avec plusieurs lit, une petite fenêtre laissait passer la faible lueur de la lune.

« J'ai faim, dit Yghni en s'approchant.
- On n'a pas à manger.
- J'ai envie de faire pipi.
- Tu as des toilettes, juste à côté, fais attention. »

La gamine partit. Valentina installa Monica sur un lit à côté.

« Tu crois qu'on va s'en sortir ?
- J'en sais rien. Je voudrais surtout épargner ça à ma sœur.
- Je sais que tu penses beaucoup à ta sœur. On va tout faire pour qu'il ne lui arrive rien. Tu es une fille courageuse.
- Ah.
- Jaden nous a complétement abandonné. Il est parti on ne sait où. Et Arsène, tu sais où est Arsène ? Il est tombé et ...
- Mmh, fit Carlita en s'agitant. J'en sais rien non plus. »

Yghni, qui était revenue, la regardait mais elle ne dit rien. Finalement elle vint s'allonger contre sa sœur et s'endormit en peu de temps. Une journée en Enfer, ils venaient de vivre une pure journée en Enfer. Et ce n'était sûrement pas fini, en fait, ça ne faisait que commencer.

Wrong place, wrong timeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant