SIXIÈME PARTIE

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On s'installe à table, sa mère a fait du couscous. Comme elle n'avait pas prévue que je vienne, il est fortement épicé. Quand j'étais là pour le ramadan, elle réduisait les doses pour moi ou elle mettait la sauce épicée à part car elle sait que je supporte mal la nourriture piquante. Je me régale malgré tout, comme à chaque fois ici.

Moi : C'était très bon Khalti ! Al hamdûlillâh.

Dounia : Merci Benthi, tu as repris les cours ?

Moi : Oui oui. C'est reparti pour une année...

Dounia : Mais tu as dû voir ma nièce, Ibtissem ?

Moi : Pourquoi ?

Dounia : Parce qu'elle est dans ton lycée.

Moi (à Hakim) : Sah ? Et tu m'as rien dit ?

Hakim : J'ai oublié wAllah.

Moi : Mais elle est en quelle classe ?

Hakim : En 3ème professionnel là.

Moi : Ah ouais j'vois. Bah j'l'ai pas vue... Je regarderai in shâ Allah.

Ibtissem c'est la cousine d'Hakim. Elle était toujours à la maison cet été. C'est presque Dounia qui l'a élevée depuis qu'elle est petite, donc je la connais bien. Ses parents sont jamais là. Sa mère est toujours à enchaîner les heures supplémentaires en tant qu'infirmière. Elle s'est mariée avec un français, le père d'Ibtissem qui lui est comptable. Tout les deux sont rarement là, c'est pour ça qu'elle est souvent chez Dounia. On était proches toutes les deux, elle me confiait ses problèmes de jeune adolescente et je lui donnais des conseils ou lui parlais de mon enfance avec ma mère. Comme la sienne n'a jamais été là, elle m'écoutait en s'imaginant sûrement être à ma place. Je suis contente de la savoir dans mon lycée. Je vais pouvoir la voir plus souvent, je ne lui ai pas parlée depuis longtemps.

La journée se passe merveilleusement bien, je me sens vraiment à ma place ici. Comme si ils étaient vraiment de ma famille. Entre Hakim qui me protège et Dounia qui est comme une mère pour moi, j'en ai presque les larmes aux yeux. Ces moments passés en leur compagnie sont comme un baume sur mon cœur. Mon éloignement avec ma mère me fait si mal, que je suis apaisée de voir qu'eux m'acceptent telle que je suis. Je crois même qu'ils m'aiment d'autant plus car je suis moi aussi musulmane. Je profite donc de cette journée. On parle de tout comme de rien, on rigole. Je débarrasse la table avec Iness pour soulager Dounia qui a l'habitude de s'occuper de tout. On fait la vaisselle aussi pendant que Iness nous raconte comment s'est passée sa rentrée des classes, elle est en 6ème cette année. Le passage de la primaire au collège est toujours plus ou moins un moment important, alors elle a beaucoup de choses à nous raconter. Je repars finalement dans la soirée. Hakim me ramène et ce n'est qu'une fois rentrée dans mon studio, seule, que je craque.

Je me met à exploser en sanglot. Ma mère me manque tellement ! Je me rappel les moments de complicité que j'avais avec mon père quand j'étais toute petite, puis Housni. Voilà que je pense de nouveau à lui. Je me sens si mal, il me manque. Vraiment, je donnerai tellement pour le serrer à nouveau dans mes bras, pour sentir ses mains entrelacer les miennes, pouvoir poser ma tête contre son torse musclé. C'est si dur. Je ne parviens pas à comprendre pourquoi cette histoire m'affaiblit autant ni pourquoi je suis incapable d'avancer sans ressasser sans cesse cette histoire qui ne vaut même pas la peine que je m'y attarde. Simplement il était là, quand j'avais des soucis. Il me rassurait, m'apaisait, c'est bête à dire, mais malgré toutes les larmes qu'il m'a faite verser, il restait un homme incroyable, présent dans les moments difficiles et parfait quand il s'agissait de sécher mes larmes.

Je suis sur mon lit, je replis mes genoux contre mon menton de manière à me recroqueviller en boule et me remet à pleurer. Je pleure jusqu'à ce que le sommeil m'apaise. Au lieu d'être soulagée, en me réveillant, je me sens encore plus mal. Il est 3 heures du matin et j'ai vu son visage dans mes rêves, je le voyais me lâcher la main et partir. Me réveiller m'a fait réaliser qu'il n'est vraiment plus là. Je sanglote à nouveau. J'ai envie de hurler milles choses. Mais surtout que c'est un imbécile qui ne fait que de jouer avec moi, depuis le début. Comment est-ce qu'il a pu vivre sans moi, refaire sa vie aussi vite alors que moi je n'arrive même pas à ne plus penser à lui ?
Je prend mon téléphone et me décide de lui hurler, au moins par message, ce que je pense.

Chronique, Le Combat D'une Convertie À L'islamOù les histoires vivent. Découvrez maintenant