11. Le jugement

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-Descendez de vos chevaux et votre mort sera beaucoup plus rapide, grinça la vieille femme

            Les deux combattantes se regardèrent et descendirent d'un même élan. Parfois, il fallait reconnaître sa défaite, se dit philosophiquement Nedel. Sur un mouvement de leur bourreau, elles se décalèrent et des individus apparurent pour attraper leurs chevaux. D'autres les encadrèrent pour les mener vers le centre du village. Les villageois ne leurs prirent pas leurs armes et les demoiselles ne pensèrent même pas à s'enfuir. La place était simplement un grand espace encadré d'une dizaine de maisons. De nombreuses personnes s'approchèrent alors. Des murmures parcoururent l'assemblée en voyant les deux compagnons. Un homme, d'environ la trentaine, apporta une chaise à la femme. Elle y prit place et le silence se fit. La tension monta et, lorsqu'elle atteint son paroxysme, la vieille prit la parole :

-Quel dommage de devoir tuer des si jolies jeunes filles. Mais j'avais prévenu le roi, s'il envoyait encore une fois des soldats, ils seraient exécutés...

-Oula, je crois pas qu'on se soit compris, on n'est pas avec le roi puisqu'on le fuit ! indiqua Nedel

-Vous osez mentir ? Votre châtiment n'en sera que plus sévère ! Tous les niveaux cinq sont sous la coupe du roi !

-Vous faites erreur, nous ne sommes pas ses soldats. Des amis nous ont permis de nous enfuir. Nous allons à Python. Nous ne pensions pas rencontrer des personnes, fit calmement Liske

-Et puis, si on était des soldats du roi, vous croyez franchement que l'on serait deux et que l'on serait venu comme des fleurs, il ne faut tout de même pas nous prendre pour des idiotes, fit moqueusement Nedel

-Menteuse ! Vous cachez la marque, mais nous savons tous que vous êtes des serviteurs du monarque ! S'époumona la vieille

-Vous êtes bouché ou quoi ? Vous voulez qu'on se déshabille pour vous le prouvez ? Nous ne sommes pas avec le roi ! répondit sur le même ton Nedel

            La vieille se tut et les regarda intensément. Que pouvait dont elle voir ? Personne ne le savait. Finalement, d'une voix doucereuse, elle reprit :

-Si vous n'êtes pas avec le roi, vous êtes avec l'impératrice. Pour nous, c'est du pareil au même. Vous allez tout de même mourir.

-Vous ne pouvez pas nous écouter un instant ? Nous vous avons dit que nous ne suivons personnes, donc ni le roi, ni l'impératrice, ni personne ! Nous sommes justes en train d'aller à Python ! Maintenant, pouvez-vous nous laissez passer ? Merci beaucoup ! Ragea Liske

-Et après tu me demande de me calmer... Fait ce que je dis, pas ce que je fais... grommela l'elfe

- De plus, pourquoi s'en prendrait-on à vous ? Qu'est-ce qu'une bande de pecno peut avoir à cacher ? Continua l'humaine

-1 à 0, dans les dents la vieille, ou dans celle qu'il te reste, commenta l'archer

-Maintenant, rendez-nous nos chevaux et laissez nous passer !

-Echec et mat, par contre, Liske, tu te la joue un peu là...

-Et arrête de commenter tout ce que je dis !

-Ok, ok, pas de problème, répondit tranquillement Nedel en levant les mains

            Elles remarquèrent alors que tout le monde les regardaient avec des airs coquasses. Certains étaient ébahi, d'autres avaient des airs d'incompréhension, d'autres encore semblaient énervés. Ce pastel d'humeur amusa légèrement les deux amies avant d'entendre la voix de la vieille, les ramenant ainsi au problème présent :

-je vois que vous dites la vérité...

-Humhumhum... s'étouffa légèrement une certaine enquiquineuse

-Donc, je pense que nous devrions vous conduire à elle...

            Un brouhaha se fit dans l'assemblée, comme si une nuée d'Ebu Gogo avaient investi les lieux. Les jeunes filles entendirent les mots « monstre », « serpent », « serment », avant que la vieille réclame le silence, qui se fit lentement. Les deux amies étaient troublées. Qu'est-ce qui pouvait bien faire aussi peur à ces gens ?

-Nous allons vous conduire à notre protectrice et elle décidera de votre sort, fit alors la vieille

-Je me disais aussi, il ne devait pas parler d'elle, chuchota Nedel à l'oreille de son amie, qui leva les yeux au ciel

-Il s'agit d'une gorgone, elle est la protectrice de notre village

-Une gorgone, attendez ! Méduse ? La femme aux cheveux de serpent et au regard qui lance des stupéfix ?

-Bravo, tu connais tes classiques ! Oui, c'est bien cela une gorgone. Mais au départ, elles étaient trois, expliqua Liske

-Ca va miss je connais toutes les mythologies et mythes par cœurs ! grogna Nedel

-vous avez toutes les deux raisons. Si vous le voulez bien, suivez-moi... siffla la vieille

-Parce que si on voulait on pourrait partir ? Demanda l'elfe en se redressant

-Arrête de faire l'imbécile et vient ! Il y a toujours des choses nouvelles à découvrir, n'es-tu pas aventureuse ? Se moqua Liske

            L'elfe jura joliment les oiseaux et suivit la vieille à grande enjambé la vieille, suivit de son amie à grand sourire. Le groupe, accompagné par les villageois, marchèrent jusqu'à une falaise abrupte.

-C'est un bon endroit pour charybde, s'exclama fièrement Nedel

-Non, c'est scylla, la contredit Liske

-On ne parle pas de la même chose je crois, moi je parle du monstre qui bouffe les marins près du détroit de Gibraltar dans la mythologie grec

-Non, charybde est le monstre marin qui avale l'eau. Scylla est celle qui bouffe les marins et c'est dans le détroit de Messine au large de la Sicile, la nargua Liske

-Pff, tu dis que ce qui t'arrange de toute façon !

-Désolé d'être plus intelligente que toi, répondis moqueusement l'humaine

-Grrrr !

-Excusez-moi de vous déranger mais nous sommes arrivées, les interrompit une petite voix d'enfant

            En effet, les deux femmes se trouvaient désormais devant l'entrée d'une grotte, seules. La population tremblait derrière elles. Les combattantes reprirent leurs sérieux et entrèrent dans les profondeurs abyssales de la montagne. Après quelques mètres, la descente se fit abrupte et en moins d'une minute, les deux adolescentes se retrouvèrent plongées dans le noir. Elles se tenaient à un mètre l'une de l'autre et la grotte était tellement sombre qu'elles ne se voyaient pas. Pourtant, sans même se voir, elles ressentaient la crainte de l'autre. Elles marchèrent pendant ce qui leur sembla une éternité, dans le noir complet, où le bruit de leurs pas et de leur respiration semblait avoir la même intensité qu'un moteur d'avion. Elles entendirent tout d'abord le bruit des gouttelettes d'eaux tomber sur la roche, puis, une lueur verdâtre les enveloppa. Incertaine, elles s'arrêtèrent en entendant des légers sifflements. Elles se regardèrent quand elles virent, au coin de l'œil, une forme humanoïde leur sauter dessus.

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Hazuliar [En pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant