14. La danse des lames

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Les deux amies eurent un mouvement de recul. Pourquoi une telle phrase après un tel échange ? La gorgone sourit légèrement en se rendant compte de son erreur. Il est vrai qu'une telle phrase pouvait être mal interprétée. La dame fit un signe de la main en direction des filles :

-Mes mots ont dépassé ma pensée. Je m'extasiais devant la future mort du bourreau. Je n'ai aucune intention de vous tuer, sinon, pourquoi me donner autant de mal ? Je vais vous amener jusqu'à la seconde sortie de ma grotte. Vous y retrouverez vos chevaux et votre ami Jack. Galopez vers l'Est et vous arriverez à une falaise, passez sur le pont transparent. Si vous croyez en son existence, alors vous n'avez rien à craindre. Traversez ensuite la montagne en direction du Sud. Ne vous fiez pas à vos sens, ils seront trompés. Seul votre instinct vous sauvera. A la sortie des falaises, la sortie se trouvera à l'Ouest. La cité des songes est à cet endroit. Galopez vers votre avenir et ne regrettez rien !

            Pendant son monologue, la gorgone mena nos deux voyageuses dans les profondeurs de la caverne. A la fin de la phrase exclamative, elles débouchèrent sur une petite clairière. Une douce lumière de la tomber du jour éclairait l'endroit. Près du roc coulait un petit ruisseau. L'herbe, verdoyante, était broutée par deux chevaux. Sur un équidé souris, un lapin avec des cornes se reposait. Les deux adolescentes s'approchèrent sans faire de bruit et se mirent à chatouiller Jack. Ce dernier ria comme un petit enfant. Ils arrêtèrent de s'amuser lorsqu'un rire cristallin arriva à leurs oreilles. La dame, resplendissante sous le soleil, se moquait légèrement d'eux. Voyant venir les grognements d'un certain elfe, elle dit alors :

-La nuit tombe, nous n'avons que trop discuter. Il est dangereux de se promener la nuit dans ses contrées. Dormez ici et partez aux premières lueurs du jour. Je vous ferais portez de quoi souper.

            Sûr ce, elle retourna à l'intérieur de sa caverne. Les jeunes femmes s'assirent à même le sol et racontèrent à Jack tout ce qu'il avait manqué. Lorsque Liske lui parla du bouclier, il s'en trouva fort intéressé. Pour lui faire plaisir, elle voulut lui montrer. Seulement, quand elle enjoigne à sa volonté de le faire sortir de sa peau, un éclair de douleur lui traversa le bras. Ses deux amis se précipitèrent vers elle. Nedel défit le gantelet de son amie pour l'examiner. Pourtant, à par les deux cicatrices, son bras était indemne. Elle demanda alors à l'humaine de réessayer en y allant doucement. Cette fois-ci, les cicatrices s'ouvrir lentement et, comme deux serpents, s'enroulèrent l'un autour de l'autre pour former un bouclier rond et dans les teintes rougeâtres. Au centre de l'écu se dessina la tête d'une femme et à la place de ses yeux, deux onyx, de la taille d'une capsule. Cette fois-ci la rousse ne ressentit aucune douleur. Elle attrapa alors le gantelet, deux rayures l'ornementaient. Comprenant l'objet de sa douleur, elle soupira. En effet, ses gantelets, bien que de cuir, était très solide. Ses deux compagnons rigolèrent devant son air dépité. Liske rangea son bouclier et entrepris de découper son gantelet pour qu'il puisse encore protéger sa main sans toucher son avant-bras. Nedel, qui la regardait faire, souleva sa main droite devant ses yeux et lui dit :

-Maintenant que tu as découpé ton gantelet, on dirait mon gant de tir.

            Liske leva les yeux de son ouvrage et regarda son amie. En effet, les deux se ressemblaient fortement. Elle sourit et le remit. L'humaine fit apparaître son bouclier pour voir si tout allait. La rousse regarda alors l'elfe, qui s'était allongé dans l'herbe et qui observait maintenant le ciel. Un sourire lui vient aux lèvres et elle dégaina son épée. Elle s'approcha de sa compagne et lui mit la lame sous la gorge :

-On rêvasse ? Et si j'étais un ennemi, que ferais-tu ?

            Nedel ouvrit les yeux et observa son amie en notant la lueur de défi dans son regard. Elle poussa négligemment la lame de sa gorge et se releva tout en sortant ses dagues de ses fourreaux. Elle se mit en garde devant son adversaire. Les deux femmes se jaugèrent, se saluèrent et attaquèrent.

            Jack, qui se reposait non loin, sursauta en entendant les crissements du fer. µIl crut pendant un instant que le groupe était attaqué. Comme dans son cauchemar où il revivait la destruction de son village et sa transformation... Lentement, il explora la clairière avec attention. Il vit alors, au centre du champ, un lion se battre contre une panthère. Le lion était doré, sa crinière était en feu. Son pelage étincelait sous le soleil. Sa griffe, longue, captait la lumière. L'unique touche sombre de sa silhouette lui apportait une prestance de chevalier, de héros, de général d'armée. Ses attaques portaient la majesté des rois d'antan. La panthère, elle, était l'opposé de son adversaire. Fine et élancée, elle évitait souplement chaque tentative. Tandis que l'un absorbait la lumière, elle semblait la rejeter, la faisant briller de noirceur. Ses lames chantaient la mort. Furtive, la panthère bondissait sans crainte. Si l'un représentait l'éclat du jour, l'autre devenait l'éclat de la nuit.

            Jack, émerveillé, se rendit alors compte d'une chose, les deux amies s'affrontaient réellement, avec l'intention de tuer l'autre, même si elles s'arrêteraient avant. Elles étaient environ du  même niveau. L'énergie qui émanait d'elles n'avait aucune limite. Comme si un dieu avait voulu bénir ce combat. Le cœur du Jackalope battait à toute rompre et, il lui semblait qu'à chaque battement, les adversaires entamaient un mouvement, comme une danse mortelle. Une danse de lame. Le combat se termina d'un seul coup. Et le silence s'abattit sur la clairière. Il sembla à Jack que son cœur faisait le bruit d'un tambour. Les deux combattantes se trouvaient toutes les deux en très mauvaises positions. Liske avait son épée le long de la gorge de Nedel, qui, qu'en a-t-elle, avait posé l'un de ses poignards sous la poitrine et l'autre au niveau de la moelle épinière. Les deux femmes se sourirent et éclatèrent de rire. Elles reculèrent, se saluèrent et rangèrent leurs armes. Ensuite, elles s'assirent autour d'un feu de camp et partagèrent la nourriture qu'un villageois avait apportée. Jack secoua la tête, elles allaient le rendre fou. Il s'approcha et mangea avec les demoiselles.

Hazuliar [En pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant