Joyeux papillons

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On toqua plusieurs fois à sa chambre, et le bruit de la main de sa mère contre la porte lui perça douloureusement les tympans.

- Debout ma chérie !

Puis elle entendit des bruits de pas s'éloigner. Elle se leva doucement, en se frottant les yeux. Dur retour à la réalité. Mais bizarrement, ce matin-là, Maya se réveillait avec le sentiment qu'aujourd'hui était un nouveau jour. Quelque chose en elle s'était déclenché la veille. Quelque chose qui la mettait de bonne humeur. Elle sortit de son lit et ouvrit ses volets. Elle fut aveuglée par la pâle lumière que dégageait le soleil en ce matin d'automne. Un sourire apparut sur son visage constellé de tâche de rousseur. Elle dévala rapidement les escaliers et s'installa à la cuisine où déjeunaient déjà son grand frère Josh et sa sœur Camille. Elle attrapa des céréales et du lait et mangea en vitesse afin de pouvoir aller à la salle de bain avant sa sœur qui y passerait une éternité. Elle se brossa les dents mais ne prit pas la peine de faire de même pour ses cheveux. Elle mit un peu d'anti-cernes sous ses yeux verts et du déodorant. Elle s'habilla d'un large pull avec un jean et des bottines. Elle se parfuma un peu et décida qu'elle était enfin prête pour le lycée. Elle attrapa son cartable sur lequel elle avait accroché des badges de groupe, mit sa veste en jean beaucoup trop grande sur ses épaules et partit. Tous les jours, elle se rendait à pieds à l'école, ce qui avait tendance à user les semelles de ses chaussures, mais elle s'en moquait. Les feuilles d'arbres orangées craquaient sous ses pas, et elle souriait à chaque passant. Elle ne voulait pas l'avouer, mais ce qui la motivait ce matin à aller au lycée, c'était Donovan. Elle voulait voir comment il allait réagir en la voyant. Elle tourna la tête sur le côté et aperçu un papillon blanc posé sur son épaule. A peine l'eut-elle regardé que celui-ci s'envola. Elle passa les portes du lycée un peu en retard, elle avait trainassé ce matin en route. Elle se mélangea à la cohue d'élèves qui se rendaient en cour. Elle se sentit toute petite, avalée par la masse. Elle se faufila à travers les cartables et les filles bien habillées. Maya faisait partie de ces personnes qui n'aiment pas trop le contact avec des gens. Parfois même elle regrettait de devoir partager son oxygène avec certaines personnes qui l'énervaient au plus haut point. Ces personnes étaient ce genre de fille qui gloussent dès qu'elles se trouvent à côté d'un garçon. Insupportable. D'ailleurs, quand elle aperçut Donovan, celui-ci était entouré d'une marée de filles jacassant et souriant niaisement. Elle passa à côté de lui, et il ne lui adressa même pas un regard. Evidemment. Quand on peut avoir toutes ses filles toutes droit sorties de magazines de beauté, pourquoi s'intéresser à elle ? Elle s'était juste laissée bercée d'illusions, comme d'habitude. Il avait le rôle du bad boy, et elle de la fille transparente, et le problème, c'est qu'ils ne jouent pas dans le même film. Ils étaient diamétralement opposés. Des couleurs qui ne peuvent pas se mélanger. Deux routes différentes qui ne se croiseront jamais. Et la liste était encore longue. Maya sentit son moral chuter jusqu'à ses pieds. Elle avança, les yeux rivés au sol, et s'installa à sa place, déçue.



Elle mangeait avec Thomas, comme à son habitude. Donovan fit son entrée dans le réfectoire, étrangement seul. Elle avait entendu des rumeurs à son sujet toute la matinée. Certains disaient qu'il avait été renvoyé de son ancien lycée pour avoir tabasser plusieurs garçons, d'autres parce qu'il vendait de la drogue, et d'autre encore parce qu'il avait menacé de mort un professeur avec un couteau. Absurde. Les adolescents ont beaucoup d'imagination de nos jours. Donovan marchait droit devant lui, la tête haute, et il lui sembla qu'il se dirigeait vers eux. Elle baissa donc la tête vers son assiette, tout à coup extrêmement intéressante. Bruit de chaise qu'on tire, son d'un plateau qu'on pose sur une table. Elle releva la tête. Donovan était assis à ses côtés. « Ne pas rougir, ne pas rougir, ne pas rougir. » ordonna-t-elle silencieusement à son cerveau.

Les yeux fermésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant