Mes deux jambes avancent, au même rythme. Faiblement, mais sûrement. Les gens me regarde bizarrement dans la rue, mais en même temps je les comprend : une fille la chemise de nuit à moitié déchirée, qui marche comme un zombie avec une tête de cadavre, ça fait peur.
J'ai passé toute la nuit dehors, et je meurs de froid. J'entre dans un petit bar, et tout le monde s'arrête en me voyant arriver.
-Euh mademoiselle ? Vous êtes sûre que tout va bien ?, me demande le barman.
-Est-ce que je peut avoir un verre d'eau s'il vous plaît ?
Il regarde ma tenue complètement ruinée qui laisse voir tout mon ventre et pâlis un peu.
-Je... je vais vous donner ça. Mais vous... vous... vous êtes pas un peu folle ?
Sa remarque me fait légèrement sourire.
-Si, un peu. Mais vous inquiétez pas, on s'y habitue.
Il a l'air de se détendre un peu, voyant que je suis sur le ton de l'humour.
-Je vais vous chercher une robe de chambre qui puisse vous couvrir un peu quand même. J'habite en haut. Je reviens toute suite. Bryan, tu gères les clients pendant que je monte.
Mon cœur rate un battement et je prie que ce ne soit pas celui que je pense. Mais les deux yeux bleus qui croisent les miens confirment mon inquiétude. Il manque de lâcher son verre en me voyant.
-Mais enfin Morgane qu'est-ce qui t'es arrivé ?
-Rien.
C'est toujours la colère qui parle. Mon Dieu mais je suis tellement injuste ! Seulement... Si je ne laisse pas la colère prendre le dessus, ce sera la douleur qui le fera puis les larmes avec et ça c'est hors de question.
Il me regarde avec pitié, ce qui n'arrange rien.
-Arrêtes de me regarder comme ça.
-Écoutes, je sais que tu ne te sens pas très bien par rapport à tout ça mais...
-"Pas très bien" ?! "Pas très bien" ?! Bryan j'ai raté douze ans de ma vie ! Douze putains d'années de ma misérable vie !
Je crie un peu, ce qui fait que les gens commencent à se taire et nous regarder Bryan et moi comme si notre dispute était si passionnante qu'elle méritait d'être entendue et vue. Je vois que Bryan se sent soudain gêné et me demande de baisser un peu le volume pour ne "pas déranger les clients" ce qui me fait rire d'un rire mauvais et gras.
-Parce que tu as cru que j'allais me gêner peut être ?
-Je te demande simplement de...
-De quoi au juste ? De me calmer ? D'oublier que tu as brisé tout ce qui me donnait de l'espoir dans ce monde que je ne reconnais plus ? De ne pas faire attention au fait que tu te sois marié alors qu'on s'était fait la promesse de ne jamais se séparer sous aucun prétexte ?
-Morgane on avait huit ans...
-Mais quand bien même ! Une promesse c'est une promesse !
-Et tu crois c'est simple pour moi aussi ?
Il commence à hausser la voix lui aussi. Nos spectateurs ne manque pas un mot.
-Oh pauvre chouchou trop gâté !
-Morgane tu ne sais pas de quoi tu parles. Tu ne sais rien.
-Ah bon tu es sûr ? Parce que personnellement je pense que je m'en sors plutôt bien niveau connaissance de la douleur : j'ai fait douze ans de coma, celui avec qui je pensais passer ma vie s'est marié, ma sœur jumelle est morte en me laissant sa petite fille, mon père est en prison...
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Wake me up when it's too late
General FictionPrologue Bryan me serre fort, et on attend que les coups de feux s'arrêtent. Mais ils continuent. Encore et encore. Je ne peux pas m'empêcher de pleurer. Il me serre encore plus fort. Et soudain, tout s'arrête : les cris et les coup de feux. Je pass...