Retour au Enfers

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La première chose que je vois à mon réveil c'est le plafond : bleu turquoise. Pas le plafond de chez mon frère.

Et puis ce bip, incessant insupportable.

Quelque chose me chatouille les narines, quelque chose d'insupportable.
J'essaye de bouger. En vain. Mes paupières sont tellement lourdes... Mais où je suis ?
Ouch ! Ma tête ! Oh mon dieu mais qu'est ce que c'est que cette douleur ?! J'ai l'impression qu'on me plante un couteau en feu dans la boîte crânienne...
Et puis je sens une petite main toute douce qui vient me carresser le doigt.
"Tu t'es réveillé ?"demande une petite voix pleines de larmes.
J'arrive à peine à prononcer un «oui» correct. Mais qu'est ce qu'il m'arrive ?
J'entends une porte qui s'ouvre et quelqu'un qui se précipite vers moi. Je ne vois rien, mais j'entends tout. Une main me carresse le front. Elle est moite, et je n'en veux pas sur mon front.

Et puis d'un seul coup, la partie haute du lit remonte, ce qui me procure une douleur abominable partout, et je ne peux m'empêcher de lâcher un faible cri.
Mes yeux s'habituent peu à peu à la lumière et je découvre trois personnes devant moi.
Ma mère, ma nièce et un docteur.
Ma petite Anna en pleurs.
Elle me fait tellement mal au cœur...

Ma petite puce.

Le docteur s'avance avec son bloc notes et me regarde droit dans les yeux, avec ce regard faussement désolé que je déteste de tout les médecins quand ils doivent annoncer une mauvaise nouvelle.
"Quand tu t'es endormie chez ton frère il y a maintenant deux semaines, tu ne t'es pas réveillée après. Ta belle-sœur m'a raconté que tu a eû un gros coup de fatigue et que tu t'étais endormie directement. Mais c'était très dangereux de ce rendormir, car tu sors de 12 ans de coma. Tu as besoins de vitamines, de bouger, d'activité, mais surtout pas de repos."

J'avale les nouvelles en silence, en essayant de ne pas me rendormir, juste pour l'énerver.

Et voilà. Je suis vivante, mais à moitié. Je pourrais sortir de mon fauteuil roulant dans deux semaines, pas moins. Mais en attendant, je dois ne jamais me reposer.
Très bien.
Je ne dormirais plus jamais si il le faut.
Mais mon corps ne me contrôleras pas encore une fois.
Non.
Cette fois, je prend contrôle de tout, et je ne reviens plus jamais dans cette hôpital.

Deux heures plus tard.
Quand le médecin par enfin, après qu'il nous ai donné toutes les instructions, les ordonnances, et qu'il ai fait une petite osculation sur moi, je me retrouve seule, face à Maman et Anna.
"Tu vas pas mourir au moins ?"dit Anna après un petit silence.
Ma mère lui caresse les cheuveux et lui dit d'une voix mielleuse mais tremblante :
"Non ma puce, elle va aller très bi..."
"Peut être."je répond sèchement. "Rien n'est sûr. Je vais peut être retomber là maintenant dans le coma, et me réveiller vingt ans après. Je ne sais pas si tout ira bien. Personne ne le sais."
Ma mère me lance un regard noir, mais je m'en fiche.
J'en ai marre de toujours dire à tout le monde que tout ira bien alors que c'est faux. C'est se mettre les doigts dans les yeux ça. Et je déteste ça. Anna mérite la vérité, et elle est bien assez courageuse pour l'affronter.
"Anna, tu veux bien aller nous chercher un chocolat chaud au distributeur s'il te plaît ? Tiens, tu peux t'acheter des bonbons. Je dois parler à ta tata."dit m'a mère avec le même ton en douceur que tout à l'heure.
Anna me lance un regard interrogateur, comme pour demander la permission, et je hoche la tête. Elle ferme la porte derrière elle, et ma mère se tourne vers moi en me balançant d'une vois tremblante :
"C'était quoi ça, tu m'expliques ? Ta nièce a huit ans bon sens !"
"Elle mérite de savoir la vérité."
"Oui et bien la vérité fait trop mal ! C'est seulement une enfant ! Qu'est ce qu'elle va devenir plus tard si tu commences par la traumatiser ?!"
"Quelqu'un de courageux. Et de fort. Capable d'affronter n'importe qu'elle situation."
"Enfin Morgane tu dérapes ! Je ne t'ai pas élevée comme ça !"me dit-elle, indignée.
"Justement. Je veux l'éléver différement. Pendant toute mon enfance tu m'a dit que tout irais bien, que rien ne nous arriverais, que le mal n'existait pas. Et regarde nous aujourd'hui : j'ai fait douze ans de coma, Bryan s'est remarié, Papa est en prison et Kate est morte. Tu aurais dû nous préparer à ça. Seulement j'ai vécu toute mon enfance en étant persuadée que je vivais dans un conte de fées. Seulement maintenant j'ai découvert que l'amour n'existait pas, que la famille pouvait être brisée et que notre corps peut nous lâcher à tout moment."
Elle me regarde avec une tristesse infinie dans les yeux qui se transforme en larmes qui coulent le long de ses joues, et va pour partir quand elle se retourne vers moi et me lâche :
"En fait j'avais tort. Je n'ai jamais retrouvé ma petite Morgane."
Et elle claque la porte.
La phrase fait mal, mais je m'en fiche, parce que je lui en veux.
Je lui en veux de m'avoir rendu la descente aux Enfers encore plus lourde.

Wake me up when it's too lateOù les histoires vivent. Découvrez maintenant