La lettre

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Je farfouille dans la cuisine : rien.
Je regarde dans le salon : rien.
Je retourne la chambre de Maman : rien.
Mais qu'est-ce qu'elle a bien pu cacher ?! Je n'ai pas regardé dans la salle de bain, c'est la dernière pièce de la maison. Je n'ai pas beaucoup d'espoir.

Je pousse la porte de la dernière salle, et je découvre une petite pièce avec une douche, un toilette, un lavabo et une petite baignoire. Il n'y a rien qui traîne, a part une serviette et quelques médicaments. Rien de suspect.
Je regarde dans le lavabo, dans la douche, derrière la baignoire : rien.
Je vais pour partir quand quelque chose dans l'obscurité retient mon attention : une toute petite boule de papier dans la poubelle à côté des toilettes.
Je m'approche, et déploie le papier.

Comme j'ai bien fait. Je reconnais directement l'écriture de ma sœur. Elle l'avait bien cachée pour moi : personne ne serait aller voir dans la poubelle de la salle de bains.
J'essaye de lire ce qu'il y a écrit, mais c'est du langage codé. Évidemment. Ce qui rend ce qu'il y a l'intèrieur encore plus important, je suppose.
Je tourne et retourne la lettre, la met devant le miroir, essaye de lire a l'envers, échange les syllabes, mais non, rien n'y fait. Il y a seulement des chiffres, du charabia, des mots par ci par là. Après plusieurs minutes de recherches et de réflexion, je finis par remarquer un petit nombre dans un petit coin de la feuille. 2986. Qu'est ce que ça pourrait bien dire ? Je dois continuer de chercher, ça c'est sûr, mais où ? Et puis un autre mot semble vouloir sortir de la feuille. chambreehtak. Mais oui ! Bien sûr ! Chambre de ehtaK. Chambre de Kathe. Elle a toujours voulu rajouter un h à son prénom, je n'ai jamais su pourquoi.
Chambre de Kate... Je dois parler à Maman, mais discrètement, je ne veux pas parler de cette lettre à personne à part Anna.

«Maman il faut que je te demande quelque chose.»
«Oui ma chérie ?»
«Est ce que Kate vivait dans son propre appart avant de... de mourir ?»
«Elle avait un petit studio à côté de chez ton frère et sa famille. Vers le centre-ville à une heure d'ici à peu près. Pourquoi ?»
«Je... je dois voir quelque chose là bas. J'emmène Anna avec moi.»
«Euh... Qui t'y conduiras ? Je peux le faire si tu veux.»
Je n'avais pas pensé à ça... Je veux quelqu'un qui ne posera pas de questions, quelqu'un que je ne connais pas. J'ai une idée en tête.
«Je vais demander à ma belle-sœur.»
Et sans lui laisser le temps d'objecter, je tourne mon fauteuil roulant en direction du salon.
Je constate que la moitié des gens sont partis, dont Bryan et sa femme.
Je roule vers la femme de mon frère et d'une voix enrouée, je lui demande :
«J'ai un service à vous demander.»

Avec Anna sur mes genoux et ma belle sœur à côté de moi, on se dirige vers la voiture de cette dernière. J'ouvre la portière de derrière à Anna et je laisse la femme de mon frère, dont je ne connais pas le nom, m'installer sur le siège avant. "La place du mort". En quelques sortes, c'est vrai.
Elle démarre la voiture et elle conduit sans un mot jusqu'à l'entrée de l'autoroute où elle dit finalement :
«Je m'appelle Hashley au fait. Je ne suis pas sûre que Jordan m'a présenté.»
«Non en effet.»
Je n'ai pas la force et l'envie de faire la conversation maintenant. Je veux seulement savoir ce que 2986 veut dire.
On arrive enfin dans la ville, et je ne peux m'empêcher de regarder par la fenêtre. Le monde a en effet changé. C'est tellement étrange... tellement étrange de manquer 12 ans non seulement de sa vie, mais aussi de celle du monde.
On arrive devant un petit immeuble et Hashley se gare juste devant.
Elle ouvre la porte, et on prend l'ascenseur jusqu'au quatrième étage.
Numéro 27. Elle ouvre la porte qui était apparement ouverte et me laisse entrer, suivie de Anna.
«Je vous attends dans la voiture.»
Et elle ferme la porte.
On reste là, avec Anna, à regarder les cartons empilés partout dans la pièce. En dirait que personne n'a fait le ménage depuis une éternité. Depuis qu'elle est morte.
J'imagine Maman et Jordan entrain de faire les cartons, rangeant les dernières traces de vie de ma sœur. Et puis je vois Maman s'effondrer d'un seul coup, puis Jordan qui lâche le carton qu'il tenait entre des mains, ce qui expliquerait le carton renversé avec tout les CD autour, et qui prend notre mère entre ses bras, lui murmurant que ils pourront faire ça plus tard, que ce n'est pas grave. Sauf qu'il ne l'ont jamais fait.
Je commence à farfouiller dans un carton quand Anna m'interpelle.
Je roule vers elle et je la vois qui fixe un carton isolé. 2986. C'est ce qu'il y a marqué dessus.
Je me précipite dessus, et découvre un ordinateur à l'intèrieur. Je le sors, l'ouvre, et l'écran s'allume sur le menu. En arrière plan il y a la photo d'une maison abandonnée qui donne froid dans le dos. Je regardes ses documents et un attire mon attention. bilkpourz il y a marqué dessus.
Je jette un coup d'œil à la lettre et j'y trouve en effet le "mot" blikpourz. J'ouvre le dossier, quand il me demande un mot de passe soudainement. Je regarde la lettre, espérant trouver un indice et je remarque qu'il y a marqué en gras password. Et sur une autre partie de la feuille il y a marqué en gras aussi Balefire45. Je tape donc Balefire45 à sur l'ordinateur et un document d'ouvre. Il est rempli d'adresses, et de liens. Je clique sur un lien, et trouve une adresse sur Google Map. Je reviens sur le dossier, quand une petite voix me demande :
«Il faut que tu ailles là bas ?»
Je me retourne et Anna est derrière moi, les yeux rivés sur l'écran.
«Je pense oui.»
Je reviens sur l'écran, et je clique sur les autres liens qui me mènent tous sur des sites plus ou moins signifiants. Il y en a un du commissariat de la ville, un de Disneyland, un d'un magasin et un blog. Ce dernier est le plus étrange, car il buge beaucoup, contrairement au autres et il y a toute les cinq minutes une pub pour chewing-gums Hollywood. Ça ne doit pas être là pour rien...
J'éteins l'ordinateur et le pose sur mes genoux, décidée à aller voir tous ces endroits et chercher plus profondément quand soudain une grande fatigue me submerge d'un seul coup. J'essaye de lutter, mais elle m'emplie tout le corps et je n'ai plus aucune force.
«Appelle Hashley» dis-je à Anna.
Cette dernière arrive en courant et écarquille les yeux quand elle me voit dans mon fauteuil roulant à moitié morte. Je ne doit vraiment ressembler à rien.
Elle se précipite derrière moi et me pousse jusqu'à l'ascenseur. Mais bizarrement elle ne m'emmène pas dans sa voiture mais dans la petite maison adjacente à l'immeuble. Tout commence à devenir flou, comme si je m'endormais sans m'entendre compte. Tout deviens très distant, très lointain... Et puis tout deviens noir et j'ai l'impression de tomber.

J'ouvre doucement les yeux, je suis dans un lit plutôt grand deux places. Il fait tellement froid...
Le souvenir de ma chambre d'hôpital me vient à l'esprit. Et mon cœur se met à battre : je panique.
Mais une petite main qui me caresse les cheveux me calme instantanément. Je baisse les yeux et Anna est à ma gauche, et me regarde avec ses grands yeux.
«Coucou ma petite puce.»je lui dit d'une voix que je ne reconnais pas moi même.
«Coucou Maman. Tu t'es endormie, Tata est dans le salon, elle parle avec ton grand frère. Il fait bientôt nuit.»dit-elle d'une traite.
Maman. Elle m'a appelée Maman.
Je lui fait signe de venir dans les draps et elle pose sa petite tête dans mon cou. Et on s'endort toutes les deux contre la chaleur de l'autre, protégées par notre amour.

Wake me up when it's too lateOù les histoires vivent. Découvrez maintenant