VIII. Noëlle : La musique est fragile.

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Noëlle s'étirait dans son lit en savourant sa grasse matinée du week-end et début de vacances de pâques quand son téléphone sonna. Il affichait le numéro de la tante de Chloé. C'était le seul moyen pour Noëlle de communiquer avec elle en dehors des cours. Elle ne l'avait pas encore utilisé mais le fait même que Chloé le lui ait donné lui réchauffait le coeur tant cela paraissait un grand pas vers sa confiance.

- Allo ?
- Noëlle ? C'est Léna. Comment allez-vous ?
- Plutôt bien et vous ?
- Bien. Ecoute, je sais que vous vous êtes rapprochée de Chloé. Le fait que vous ayez ce numéro le prouve davantage que n'importe quoi d'autre. Mais vous aurez sans doute remarqué qu'elle n'est pas très bien en ce moment, d'autant plus qu'elle a dû passer un moment difficile hier soir. Je me demandais si vous voyiez un inconvénient à passer à la maison cet après-midi, ça lui changerait les idées.

Bien sûr, Noëlle avait remarqué cela. Plus les jours passaient, plus il paraissait évident que quelque chose ne tournait pas rond chez la jeune aveugle. Noëlle réfléchissait. Elle n'avait rien de prévu jusqu'à 22h ce soir.

- C'est bon pour moi, je passerai. Chloé est au courant que vous m'invitez ?
- Pas le moins du monde, mais je lui en parlerai. Si jamais elle oppose un refus, je vous rappelle.
- D'accord, merci ! Et... Madame Lugin ?
- Oui ?
- Tutoyez-moi, dit-elle dans un sourire.
- D'accord Noëlle, tutoies-moi aussi. Je sens que nous serons appelées à nous revoir plus de fois que nous ne le pensons. A tout à l'heure, j'espère.
- A tout à l'heure.

Léna raccrocha. Noëlle passa donc toute la matinée à tourner en rond dans sa chambre et à bricoler des trucs sans intérêt. Elle était nerveuse car elle savait qu'avec Chloé, rien n'était joué. Elle était presque sûre que personne à part Léo n'avait déjà été invité chez elle. Et encore, cela devait être rare. A 11h37, son téléphone sonna de nouveau. Elle se précipita dessus et décrocha.

- Tu as de la chance, Noëlle ! annonça la voix de Léna. Elle n'a pas opposé beaucoup de résistance, dit-elle en riant.

Noëlle rit aussi, soulagée.

- Passe vers 14h30, tu peux rester autant que tu veux.
- D'accord ! Merci.
- Je t'en prie, dit-elle finalement.

Et elle raccrocha. Ce que Noëlle n'arrivait pas à décrocher, c'était son sourire. Il était en croissant de lune, tout aussi éclatant et tout aussi doux. Cette journée était pour elle comme un évènement spécial, et tout en sachant pourtant que Chloé ne la verrait pas, elle prit soin à choisir ses habits. Comme s'il était crucial de faire bonne figure et d'être jolie pour elle. Quelqu'un toqua à la porte et ouvrit.

- Ouah ! s'exclama sa mère en entrant. Que cette tenue te va bien ! Elle fait ressortir tes yeux.
- Merci maman !
- Tu vas quelque part ?
- Oui, chez Chloé. Cet après-midi.

Anna se figea sur le seuil de sa chambre, partagée entre l'étonnement de ne pas connaître l'existence de cette Chloé et la méfiance de se rendre compte que sa fille se faisait si jolie pour aller voir une autre fille. Noëlle finit par le remarquer, car elle dit :

- C'est une nouvelle amie que je me suis faite. Elle est aveugle.

Sa mère parut soulagée, elle sourit.

- Je suis vraiment contente que tu te sois si vite intégrée, ma belle. Tu viens manger ?
- J'arrive tout de suite !

Noëlle dévala les escaliers et ne laissa pas une miette dans son assiette. Elle remonta ensuite rapidement pour aller dans la salle de bain et se laver les dents. Il fallait maintenant se concentrer sur les autres sens que la vue, c'était le plus important. Au moins, avoir bonne haleine. Elle mit son parfum habituel et se lava les mains. Puis, elle retourna dans sa chambre et tourna en rond durant les deux petites heures qui lui restaient en faisant tourner son téléphone dans ses mains. Celui-ci vibra. C'était Ethan.
"Hey ! Je viens te chercher chez toi ?"
"Salut ! Non, inutile. Je viendrai en bus, ne te dérange pas."
"Sûre ? Tu es sur le chemin."
"Sûre."
"Ok. Tu as parlé de ce soir à ton amie alors ?"
"Oui, elle a dit non."
"Dommage. J'ai invité deux amis, je suis sûre que tu t'entendras bien avec eux."
"Super. Je dois te laisser, à +"

Le soleil sous la pluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant