IV. Noëlle: Les gens sont un monde entier.

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Noëlle sortait de son cours de latin quand elle croisa Léo. Il semblait inquiet.

- Salut, Noëlle, lança-t-il. Comment ça va ?
- Je vais bien et toi ?

La jeune littéraire avait discuté longuement avec Ethan la veille par sms. Elle avait appris qu'il était en classe préparatoire dans la même ville, à quelques kilomètres de là. Il l'avait invitée à aller en boite ce week-end. Heureuse de cette nouvelle rencontre et du soleil printanier de plus en plus présent, elle l'était d'autant plus qu'elle n'avait le souvenir d'aucun rêve cette nuit. Elle avait cessé de s'en préoccuper, son esprit étant davantage occupé par l'envie de se faire des amis et de reprendre le fil des cours pour réussir son année.

- Ça peut aller, répondit Léo, mal assuré. C'est juste que je n'ai plus de nouvelles de Chloé. Je suppose que tu as déjà dû l'apercevoir avec sa tignasse rousse et sa canne.
- Oh ! Oui, je l'ai bousculée malgré moi hier.
- D'habitude elle me prévient toujours quand elle ne peut pas venir à la fac. Puisque je suis son voisin, elle a juste besoin de sortir de chez elle et de toquer à ma porte. Mais là, je n'ai pas de nouvelles. Elle n'était pas à l'arrêt de bus ce matin, et une fille de sa classe m'a dit qu'elle n'avait pas été en cours.

Il semblait vraiment préoccupé, cela fit de la peine à la jeune femme.

- Je ne sais pas du tout, Léo... Je crois l'avoir aperçue hier en rentrant, elle était assise sur le trottoir et elle n'avait pas l'air bien. Enfin, d'un côté j'étais en voiture, j'ai très probablement pu me tromper.

Léo la regardait d'un air perdu et l'étudiante se repentit de lui avoir parlé de ça. Ça l'embrouillait davantage que ça ne l'aidait. Il marmonnait, à moitié énervé contre lui-même, qu'il avait rendez-vous tard ce soir avec des amis et qu'il ne pouvait pas aller la voir.

- Écoute, se lança Noëlle. Quand je rentre chez moi, je passe dans votre rue. Je vais passer la voir. Donne-moi ton numéro et je te donnerai de ses nouvelles.

Le regard du jeune homme s'illumina. Noëlle se réjouissait de pouvoir aider quelqu'un. Elle avait toujours cherché à communiquer sa joie de vivre et son espoir immarcescible aux gens autour d'elle. Elle ne trouvait rien de plus beau qu'un sourire et cela lui permettait d'un même coup de se rapprocher de quelqu'un avec qui elle s'entendait déjà bien.

- Merci beaucoup Noëlle ! T'imagine pas comme ça me soulagerait, tu es vraiment très gentille. J'espère que ça se passe bien pour toi ici !
- Oh oui, les profs sont assez compatissants. Ils essaient pour la plupart de faire en sorte que je ne sois pas perdue. Et j'ai fait très rapidement des rencontres plutôt sympas.
- Super ! Bon, je te laisse. J'ai des photocopies à faire. A bientôt, j'espère !

Léo lui offrit un grand sourire, puis se retourna et partit dans la direction opposée à celle de la jeune femme. Noëlle partit en direction de la cafétéria, puisqu'elle avait une heure de libre. Elle prit un café, s'assit et commença à lire les cours que quelques camarades et ses profs l'avaient aidée à rattraper. Au bout d'une demi-heure, elle posa ses fiches et fit une pause. Elle traîna son regard sur la cafétéria, autour d'elle, sur les gens. Elle interceptait des birbes de conversation, analysait les gestes et les expressions, essayait d'en deviner la personnalité des gens qu'elle observait. Cela l'amusait. Et puis, elle reporta son attention sur les couples. En train de s'enlacer, de se taquiner, de se regarder, de se disputer. Il n'y avait que des couples hétérosexuels. Noëlle ressentit une vague impression de solitude. Elle avait été deux fois en couple avec un garçon et ça s'était très mal fini. Elle fuyait dès qu'ils devaient s'embrasser, elle se rendait compte au bout de peu de temps qu'elle n'éprouvait pas de réelle attirance pour eux. Et ça finissait en dispute avec de grands éclats, où elle s'excusait platement de ne pas être une bonne copine. C'était à ses 13 et 15 ans que c'était arrivé.
Mais le souvenir le plus marquant de sa vie sociale était sans aucun doute un jour de juillet, elle avait 16 ans. Cela faisait déjà quelques semaines qu'elle sentait son regard irrésistiblement attiré par une de ses amies, Armelle, sans qu'elle comprenne pourquoi. Elle se sentait abandonnée, remplacée, jalouse dès qu'elle passait du temps avec d'autres filles et les prenait dans ses bras. Armelle avait des bras si chauds et un sourire si lumineux. Pendant les vacances, elles étaient parties faire du camping avec les parents de Noëlle. Elles étaient allées à la piscine et elles avaient rencontré un groupe de garçons sympas. Mais au bout d'un moment, Noëlle s'était agacée de la longue discussion ininterrompue que son amie entretenait avec l'un d'entre eux depuis un moment. Elle avait essayé de l'appeler mais Armelle lui disait d'attendre. Alors, triste et un peu en colère, Noëlle était sortie de la piscine et avait entamé le chemin du retour. Armelle l'avait attrapée par le bras et lui avait demandé ce qu'elle avait.

Le soleil sous la pluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant