Chapitre 6

979 198 64
                                    

Après quelques instants de stupéfaction, Léo fut le premier à qui la bouche se délia - étonnant !

- Il va falloir m'expliquer, là. Je suis paumé. Un instant il y a une vieille qui nous demande de la porter, puis l'instant d'après... vous. Avec l'Hiver. Vous m'expliquez ?

La magnifique femme au corps de déesse fronça les sourcils, de la manière d'une mère reprenant son enfant.

- S'il vous plaît... ajouta-t-il.

- Puisque c'est demandé si gentiment ! Sache que tout cela était une épreuve, qui, tout comme celle du hangar, de la clairière ou des corbeaux, visait une qualité morale. La bonté.

J'étais déroutée.

- Mais, raisonna Jey, tout aussi égaré, si on vous avait laissée là-bas, on serait quand même parvenus en Hiver, non ?

La dame esquissa un sourire.

- Ce que vous avez vu n'était qu'une illusion, projetée directement à partir de votre cerveau, en fonction de vos souvenirs ou de l'image que vous vous en faisiez. Si ça se trouve, vous ne voyiez même pas la même chose ! s'esclaffa-t-elle. (Toute seule.)

Alors, un déclic eut lieu dans ma tête.

- Les maisons ! fis-je, la voix tremblotante dans le froid. Elles étaient toujours aussi lointaines alors qu'on avait fait le tour de l'Hiver. Elles auraient dû être toutes proches !

- Bien vu, Hélène. Mais j'ai tendance à oublier que les mortels craignent le froid (venait-elle de nous appeler "mortels" ?), aussi je vous prie d'oublier ma maladresse et de me suivre à l'intérieur.

Sur ce, elle nous entraîna quelques maisons plus loin, et malgré le court chemin que l'on fit, des dizaines d'yeux inquisiteurs nous accompagnèrent.

Nous atteignîmes une habitation encore plus somptueuse que les autres. Elle était certes de taille modérée, mais la façade extérieure était si attractive que j'aurais éprouvé le besoin d'y rentrer même si je ne mourais pas de froid.

Elle avait l'allure à la fois d'une maison de conte de fées et d'un bâtiment moderne et hors de prix. Ses murs blancs se confondaient avec la neige, tandis que la large porte noire offrait un contraste de taille.

En bonne hôtesse, Maria nous tint la porte quand nous franchîmes le seuil. Après quoi, elle la referma derrière elle avec un claquement sonore.

Une bouffée de douce chaleur m'envahit. La pièce était vaste et faisait un peu penser à un salon, avec sa cheminée et ses fauteuils...

La seule chose insolite était ce grand siège imposant situé en hauteur du reste de la pièce.

- Je vous en prie, faîtes comme chez vous.

Prenant ses paroles au mot, Léo se jeta aussitôt sur un fauteuil, où il rebondit doucement plusieurs fois.

- Confortable, commenta-t-il.

Maria sourit de cette gaminerie et rejoignit l'immense siège... qui ressemblait étrangement à un trône.

Lorsqu'elle atteignit les marches, son corps lévita et se retrouva au sommet de celles-ci. Moi qui croyais être au bout de mes surprises...

- Si vous savez voler, quel est intérêt de construire des marches ? ronchonna Léo.

Je le rejoignis pour m'asseoir, mais Jey s'abstint.

- Où est ma sœur ? demanda-t-il, avec une voix chevrotante qui n'avait plus rien à voir avec le froid.

HélèneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant