Chapitre 5

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Respire ! m'ordonna soudain une voix intérieure.

Comprenez que ce n'était guère facile de penser à ce genre de choses futiles alors que l'assassin de vos parents se tenait juste devant vous. Je me forçai à lever les yeux vers cet être immonde.

Le commandant m'observait d'une façon violemment réjouie, qui me donna le besoin à peine contrôlable de prendre les jambes à mon cou - ou de sauter au sien, pourquoi pas.

Mais mes jambes me semblaient bien molles en cet instant.

Il s'adressa à Jey sans me lâcher du regard, qui était assez éloquent selon moi.

Respire.

- Tu es le soldat qui a perdu sa trace, se souvint-il.

Celui-ci bomba le torse.

- Avait, mon commandant ! Je ne vous ai pas abandonné, et je vous ramène... la meurtrière.

Sa voix avait flanché sur le dernier mot.

Concentre-toi, mon cœur.

Le commandant haussa légèrement les sourcils, et, me libérant enfin de sa terrible emprise oculaire, se tourna face à lui. Il lui sourit à nouveau, d'un sourire aussi froid que le précédent, dévoilant ses dents blanches immaculées, alignées à la perfection - que bon nombre de personnes rêvaient d'arracher une à une.

- Je vois ça, dit-il d'un ton posé.

Il s'empara de mon bras, celui que Jey ne tenait pas, et je tressaillis violemment. L'infâme qu'il était rit de façon musicale. Mon Dieu, j'étais terrorisée. Cependant, Jey ne me lâcha pas pour autant. C'est même à se demander s'il ne resserra pas son emprise en cet instant.

- Bien sûr, grinça le commandant, vous serez rémunéré dans les plus brefs délais, et récompensé de multiples façons pour votre acte, hum... héroïque.

- Oui, euh...

Jey reprit contenance et s'approcha de son chef, durcissant considérablement ses traits. Plus ça allait, plus l'atmosphère se faisait tendue.

- Je me vois contraint d'insister pour recevoir ma prime... maintenant.

- Soldat, je ne vous ai pas permis pas de discuter.

- Offrez-moi cinquante pour cent tout de suite, proposa-t-il, et elle est à vous.

Le commandant regarda le soldat insolent comme un homme regarde un insecte... un insecte dérangeant qu'on s'apprête à éliminer sans le moindre scrupule.

- Commandant Sanfèvre ? s'éleva une voix féminine. Tout va bien ?

Avant qu'il n'ait pu répliquer, Mathilde apparut dans l'encadrement de la porte. Elle me fixa avec un étonnement feint et fit mine d'être aussi ébahie que terrifiée. Le commandant, quant à lui, sembla se souvenir de la présence de la lieutenante.

- C'est... c'est Hél... Hélène Collar... bégaya-t-elle.

- En effet, affirma Jey.

Et il nous avança vers elle. Je me retrouvai nez à nez avec la lieutenante, qui, d'instinct, s'écarta avec empressement de mon chemin, comme si j'étais la peste en personne. C'est là que, sous le regard révolté du commandant, Jey nous introduit à l'intérieur.

Avec stupeur, nous découvrîmes une immense salle aux teintes claires, dont le pied des escaliers de marbre épousait un coin du sol, à gauche, et ondulait de façon à occuper l'espace d'en haut. Les rampes étaient faites de bois lisse et moderne.

HélèneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant