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-Alors, Levi, va t'asseoir dans la place vide du fond, dit madame Zoé.

Aucune émotion ne règne sur son visage, pourtant, j'en vois mille dans son regard, qui d'ailleurs regarde vers moi. Une des émotions qui doit traverser son esprit est certainement une émotion de dégoût que je n'me soit pas suicidé. J'avoue que j'exprime aussi du dégoût face à moi, de n'avoir même pas eu la force de faire une si petite chose comparé aux choses que j'ai ''surmonté''. Mais... Que quelqu'un sache que je veuille mettre fin à mes jours me ferais mal mais je m'en remettrais. Mais lui, lui, sans aucune raison, j'ai pas envie qu'il me voit comme ça. Peut-être parce qu'il m'intimide ? Ça doit être ça. Mais il ne doit pas le dire à qui que ce soit, sinon on finirait par me confisquer la seule chose qui me fait du bien : ma lame.

C'est fou, j'en parle comme si c'était ma seule amie - et d'ailleurs c'est pas faux. Mais au moins je sais que elle, elle ne pourra pas me laisser tomber ni mourir ou s'enfuir pour quelque chose de mieux.

Le nain - ou maintenant Levi Ackerman - se dirige maintenant vers sa place. Son regard était juste sur moi et d'ailleurs ça m'étonne qu'il ne soit pas tombé car il ne regarde pas où il met les pieds, puisqu'il me regarde moi. Mais pourtant, moi aussi je le regarde. Pourquoi ? Je me le demande bien. Arrête de le fixer, imbécile. Je secoue ma tête et ensuite me remets à ''écouter'' le cours. En fait, j'ai mes écouteurs dans les oreilles, donc je n'entends presque rien de ce que la prof dit. Mes cheveux bruns descendent légerement sur mes écouteurs, laissant croire que je ne veux pas me faire prendre, mais en vrai, les professeurs s'en lassent.
A force de me les confisquer, ils voient bien que je vais finir à la rue sans emploi : je suis un jeune irrécupérable, comme ils disent. Alors, plûtot que de déranger leur cours pour un gamin insignifiant, ils ont apprit à m'ignorer. Le fait qu'ils m'ignorent ne fait que prouver encore une fois ma vraie nature : un monstre.
Je sens un regard lourd peser dans mon dos. En vérité, je suis tout le temps observé, mais souvent par des gens qui me jugent. Je m'y suis habitué. Mais celui-là me fait frissonner de tout mon être. Je me retourne alors pour voir qui me fixe.
Encore lui. Encore Levi. Pourquoi ? Mes yeux émeraudes le fixent, en essayant d'être aussi menaçant que ses beaux yeux bleu-gris. Des mèches tombent légerement sur son front, ce qui le rend encore plus beau. Mais... je raconte quoi moi ? C'n'est qu'un homme comme les autres, juste une personne que si je commence à m'y attacher, ou à me faire des fausses idées, va me faire souffrir. Et puis, je crois plus qu'il fixe les gens à côté de moi. C'est vrai qu'Annie, une fille aux cheveux blonds, qui d'ailleurs est ma voisine de bureau ne laisse pas indifférent la plupart des hommes.
Voilà, c'est ça. Il fixe Annie, il va sortir avec elle et va finir par m'oublier. Tout est bien qui finit bien.

Par contre, je dois avouer que je ne déteste pas l'idée que ce soit moi qu'il regarde. Certainement pas. Arrête de te faire de fausses idées, idiot. La prof explique le but des 7 pantins.

- Alors tout le monde, vous devez bien savoir la règle du plus fort, non ? C'est bien sûr une règle non écrite, mais qui reste importante.  Alors je vais faire un résumé bref avec ces sept pantins., dit-elle avec un énorme sourire. Alors, on voit qu'il n'y en qu'un qui n'est pas décapité : le gagnant. Mais si on revient au début, dit elle en assemblant tout les pantins normalement, on peut voir qu'ils sont presque tous pareils en dehors. Mais seul le pantin gagnant a la force nécessaire pour tout vaincre.

Je baisse légèrement le bruit de ma musique bien trop forte pour les gens normaux. La loi du plus fort ? Je la connais très bien : j'en ai toujours été témoin. Je suis le faible qui va bientôt se faire décapiter par les autres pantins. Je me retourne pour voir que Levi me fixe toujours. Il n'a pas l'air de faire vraiment attention au cours, un peu comme moi. Mais il joue avec un crayon entre ses doigts... pourquoi j'ai tant envie que ses doigts lâchent ce crayon et se posent sur ma joue ?

- Alors, commençons avec une mise en situation. Ces pantins sont un peu comme une meute de loups. Vous savez, les loups sont toujours ensemble. Donc, le premier loup suit faiblement la meute. Et, dit-elle en empoignant le pantin, BOUM ! Il meurt d'épuisement. C'est normal : il n'était pas assez fort pour rester avec la meute, il les aurait retardé. Alors, notre deuxième loup, lui, se noie. Le troisième se perd, le quatrième tombe d'une falaise, le cinquième, lui, se fait dévorer par une autre meute de loup. Pendant ces explications, elle avait tout démantibulé les pantins. Il n'en reste que deux, dit-elle fièrement. Nommons-les Sonny et Bean. Alors, qui est le plus fort entre les deux ?

J'écoutais le cours, sans vraiment savoir pourquoi. Tout ce que je sais, c'est qu'en me tournant sans aucune raison valable, j'ai vu Levi encore en train de jouer avec son crayon. Par contre, ses mouvements de doigts avec son crayon étaient devenus comme plus brutaux, agressifs. Comme si quelque chose l'avait fait enrager. Ce serait le fait que l'on parle du plus fort ? Je parie qu'il a toujours été le plus fort. Il n'a jamais été comme les premiers loups : j'en suis sûr.

- Donc, Sonny ou Bean ? demanda-t-elle sans vraiment attendre de réponse. Alors, si on se dit que sur le plan physique, Sonny et Bean sont presque pareils, alors il est presque impossible qu'ils meurent d'une blessure ou quelque chose du genre. Par contre, disons nous que Bean est plus frêle mentalement. Même si pour un loup ça ne représente rien, si l'on va vers les humains, ça fait toute la différence. Disons-nous alors que Bean est beaucoup moins fort psychologiquement. Alors, Bean, un jour, sombre. Il ne supporte plus rien, une simple piqûre de moustique le fait virer fou. Donc, dit-elle avec entrain en empoignant le pantin nommé Bean, BOUM. Bean meurt, comme tous ses compagnons loups. Elle avait alors démantibulé le pantin. Il n'en reste plus qu'un : Sonny !

Cette prof me fait froid dans le dos, mais elle a raison. Les faibles meurent. Je dois mourir.

-Alors cette loi, une loi non écrite, bien sûr, fait que les plus forts survivent.

Je me retourne vers Levi encore une fois. Dans ses yeux, je peux déceler de la colère. Ou de la tristesse ? Peut-être même qu'il me regarde parce qu'il sait que je fais partie des faibles.

-Et que les plus faibles meurent.

Il me fixe et casse son crayon en deux.
Les plus faibles meurent.

Save me ⚣ → EreriOù les histoires vivent. Découvrez maintenant