L'Éveil de la Lignée

Chapitre 24 : La prophétie

Alexia sortit de la maison quelques minutes plus tard, portant une splendide robe de soie rouge, une moue dépitée sur le visage. Le sourire de Christopher s'étira encore davantage : vraisemblablement, elle avait retrouvé un peu de sa contenance et de son assurance, et comptait mettre en place un nouveau numéro de séduction.

- Je ne peux pas croire que tu préfères aller à ce bal que rester chez moi toute la soirée, fit-elle en soupirant d'un air entendu.

- Et moi, je ne peux pas croire que tu raterais cette soirée pour quoi que ce soit au monde, répliqua le jeune homme. C'est tellement contraire à ta personnalité...

- Quoi qu'il en soit, l'interrompit Alexia en le gratifiant d'un léger coup de coude dans les côtes, et si tu reprenais là où tu en étais plus tôt ?

- Hmm ? Ah, oui. Ces vers font référence à nous deux, à l'ordre dans lequel nous naissons. Mais il fournit également l'information selon laquelle je suis le seul à Éveiller une Lignée divine.

Il se tut une seconde, puis ajouta :

- C'est du moins ce que j'ai cru au départ. Puis j'ai réalisé que ça ne cadrait pas : ces lignes ont quelque chose de particulier. Pourquoi spécifier que l'Amour venait en premier ? Ça n'est que d'une importance limitée. À moins bien sûr, que ce détail ne soit plus important qu'il n'y paraît. C'est ce qui m'a permis d'additionner deux et deux et de réaliser la vérité.

Il s'arrêta de marcher un moment, son sourire s'étrécissant légèrement, avant de compléter :

- Dans la mythologie grecque, Aphrodite est née des morceaux d'Ouranos qui ont été répandus dans l'Océan Primordial après que Chronos l'ait découpé de sa faux.

Le Seigneur du Temps se tourna ensuite vers la déesse de l'amour. Son visage était désormais sérieux.

- Ce qui fait de toi la fille d'Ouranos au même titre que je suis le fils de Gaïa. De cet Ouranos dont Gaïa tente de me mettre en garde depuis des années, parce qu'il est un danger considérable pour mon existence.

- On ne choisit pas ses parents, dit l'adage, répliqua Alexia avec un léger sourire navré.

Christopher l'ignora et énonça les vers suivants, toujours en grec ancien :

- Source de vie que la Mer, Enfantant les ruisseaux éphémères. Ces vers annoncent la venue de Poséidon. Je me suis demandé pourquoi tu t'étais assuré que Pascal survivrait pour que je puisse l'Éveiller, alors que tu planifiais la mort de Haris. Et je crois avoir trouvé.

- Vraiment ? fit Alexia en battant des paupières, l'air faussement surprise. Et pourquoi ?

- Pour deux raisons. D'abord, la plus évidente, c'est que tu entrevoyais une possibilité que Pascal se retourne contre moi, et que ce n'était pas le cas pour Haris. Dans la mythologie grecque, Hadès a toujours été celui des dieux Olympiens à être le plus distant des autres. Par conséquent, il est envisageable qu'il soit également celui à avoir le plus accepté de collaborer avec moi au fil des siècles, alors que Poséidon a davantage tendance à choisir d'appuyer Zeus. La seconde, c'est que tu en avais la possibilité. À partir du moment où j'ai compris que Haris était la réincarnation d'Hadès, et qu'il m'a dit qu'il sentait venir sa mort, j'ai d'abord cru que vous chercheriez plutôt à me pousser à l'Éveiller pour rapprocher l'Éveil de Zeus. Mais j'ai alors compris qu'en vérité, vous n'en aviez nullement besoin : si l'hôte de l'un de mes enfants venait à mourir, cela aurait le même résultat, et plutôt que d'empêcher à jamais l'hôte suivant de s'Éveiller, cela l'y rend plutôt éligible. Vous aviez donc tout intérêt à faire mourir Hadès. Mais alors, pourquoi prendre le risque de laisser Pascal en vie ? Bien que les chances qu'il me rejoigne soient faibles, il y avait tout de même un risque.