Chapitre 17-Hormis les Monts

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Chapitre 17
Edgar

Ils étaient là. Ils arrivaient. Les Damnés étaient proches. Tous le ressentaient. Tous en tremblaient. Même la roche. Pourtant noyée sous des siècles de torrent glacé, la pierre frissonnait. Le froid la hantait, prisonnière de quelques malédictions d'un sorcier n'ayant connu que l'âge où les collines étaient encore vaste montagne. Où les cadavres possédaient encore la hargne.

            L'horizon était distant. Mais il n'avait jamais paru si près de la rupture. Le ciel ne possédait plus de sentiments. Il ne possédait plus ce garant d'astre. Le soleil était mort. Fracture.

            Au dessus des têtes, les nuages guerroyaient. Les Dieux étaient mécontents. Les éclairs étaient foudroyants. L'orage symbolisait à lui seul l'avenir d'une nation cherchant désespérément son drapeau. La pluie, elle, chutait irrémédiablement. Mais personne n'était trempé. C'était les humeurs des uns qui dépérissaient. Les corps des autres qui pourrissaient.

            Le firmament n'était qu'âme. Et l'esprit avait peur. Et l'esprit était en colère. Impression si proche mais cousine que de mot.

            Soudainement, les nuages se déchirèrent. L'horizon s'ouvrit. L'avenir s'assombrit. Une trachée apparut, haute perchée, tout à côtés des étoiles. Vert boréal, indiquant chemin du désespoir. Route des mouroirs. Le soleil apparut brièvement. Il n'éclairait pas. Il assombrissait ce qui devait l'être. Ce qui était être. Ce n'était que les feux de l'enfer qui indiquaient la voie. Qui suivaient ces rois.

            L'âme avait choisit son camp. Le firmament était un des méchant. Plus rien n'y pouvait. Il faudrait dorénavant se cacher dans l'obscurité pour combattre Lucifer, de crainte que la lumière ne pèse votre esprit.

            Personne ne susurrait mot. Les alentours étaient vides de son. Mais emplis par la population. Edgar avait invité tous à se mettre à l'abris, ouvrant grandes les portes du château. La cour était bondée.

            Le cou douloureux à force de scruter le haut, le bâtard soupira. Il faudrait prendre les armes, et l'heure serait présente bien trop vite. Il n'était qu'Emissaire, mais il se devait de combattre. Il en avait le droit. Le devoir. L'orgueil.

            Une première trompette vibra. Un frisson d'horreur parcourut l'assemblée. Seul les nourrissons en ignoraient la signification. Accoudé contre la muraille, il scrutait la vallée avec attention. Au loin, les frontières de Val Paix semblaient pourtant calmes. Paisible. La rage n'avait pas encore atteint les prairies. Les chants y continuaient gaiement. Que profite ceux que la Fin n'avait pas encore torturés. L'heure où les sanglots ne cesseraient que le moment d'un souffle serait bien plus terrible que ce que l'oracle ne le marchandait.

            Un second cor tonna. Pourtant, rien n'apparut de plus. Des cris avaient commencé à surgir de gorges paniquées. Mais la mer n'avait pour l'instant craché que des mirages aux yeux des sentinelles. Rien ne menaçait le château. Rien, hormis les montagnes.

            Edgar se retourna brusquement, renversant un page. Le souffle court, les larmes aux yeux, le bâtard courut. Ses jambes le portèrent tant bien que mal. Il était à court. Au bord de l'épuisement. Du précipice. Mais la situation était bien plus grave.  

            L'océan n'avait vomi de danger que pour les côtes. C'était les monts qui déversaient leurs périls. Et Edgar n'avait cru qu'en des mirages.

            A l'autre bout des remparts, ce n'était plus le même spectacle. Le même monde. L'Eder lui-même était tout autant divisé. Guidés par les aurores, des dizaines de fantassins fondaient sur la muraille. Accompagné par les feux de la mort, des dizaines de pantins accouraient droit sur les remparts. A jets de flèches. Mais il n'y avait pas d'arcs de ce côté-ci.

Les Vestiges Des Damnés [CS]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant