VINGT DEUX

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Si j'ai appris quelque chose du petit temps que j'ai passé sur cette Terre, c'est que les gens sont très compliqués. Les gens sont tellement plus qu'une idée. Ils sont définitivement plus que l'idée individuelle que nous nous faisons d'eux. Nous ne pouvons jamais comprendre complètement qui que ce soit car les gens sont trop complexes et impulsifs. Le problème était que je pensais comprendre Phil, mais je l'ai vite appris, ce n'était pas le cas.

"Je comprends pas!" criai-je, tapant sur le mur, "Pourquoi est-ce qu'il me mentirait ?" demandai-je en colère, regardant mes phalanges alors qu'elles commençaient doucement à saigner.

"Techniquement," dit silencieusement PJ depuis l'autre bout de la chambre, "tu ne sais pas qu'il a menti."

"Oh, allez !" dis-je, me laissant tomber sur le lit, "Il est parti pour cinq-- presque six heures !"

"Et donc ?" demanda Peej, "Il a peut-être perdu la notion du temps."

"Phil ne perd pas la notion du temps en travaillant," je roulai les yeux, "et certainement pas pour six heures."

"Il est peut-être rentré chez lui ou un truc du genre," suggéra Peej.

"Il m'aurait appelé si il allait quelque part," dis-je, enlaçant un oreiller.

"Est-ce que tu l'as appelé ?" demanda-t-il.

"Pourquoi j'appellerais ?" demandai-je, énervé.

"Jsais pas, il lui est peut-être arrivé quelque chose," dit PJ.

"Je suis sûr qu'il n'est rien arrivé entre les cinq minutes qu'il lui faut pour marcher d'ici à la bibliothèque," dis-je, serrant un peu plus l'oreiller.

"En ben désolé d'essayer de t'aider !" lança Peej.

"Désolé," dis-je brusquement, "Je suis juste vraiment inquiet."

"Je sais," soupira Peej, se levant et traversant la pièce pour s'asseoir à côté de moi sur le lit. "Je le suis aussi."

"Il avait déjà disparu quelques temps ?" demandai-je à Peej, "C'est pas ce que tu m'avais dit ?"

"Ouais," admit-il, "Je suppose qu'une fois que tu aies emménagé il aurait arrêté, mais..."

"Mais quoi ?" demandai-je alors que la voix de Peej s'éteignit. Il resta assis en silence pendant une minute.

"Jsais pas," répondit-il simplement. "Il fuguait beaucoup quand on était petits, mais c'était il y a si longtemps je pensais qu'il avait grandi et passé à autre chose."

"Qu'est ce que tu veux dire, 'fuguer' ?" demandai-je, me relevant sur mes coudes.

"Il disparaissait. Il partait faire des 'aventures': c'est comme ça qu'il les appelait. C'était quand on avait, genre, treize ans, tu vois. Il allait trouver des étranges petits magasins en ville ou explorer des cimetières, ou même des fois aller au lac à bateaux du Parc Heaton," je ne pus m'empêcher de sourire à ses mots, "C'était son endroit préféré. On lui disait tout le temps qu'il était fou et qu'il allait se noyer ou se faire arrêter ou un truc comme ça, mais il s'en fichait. Il ne nous écoutait jamais." Le visage de Peej prit un air sérieux, "Mais des fois il devenait triste et disparaissait, et plus aucun d'entre nous ne savait où il était parti."

"Tu penses que c'est ce qu'il fait en ce moment même" demandais-je, "Mais il n'est pas triste, si ? Je veux dire, il a l'air d'aller bien à mes yeux."

"Ouais," marmonna Peej, "Mais ça a commencé après toutes les engueulades avec Chris. Je pense que c'est ça qui l'a déclenché." Peej passa une main dans ses cheveux, "Je sais vraiment pas."

Vivant (Français)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant