AGAMUS

chapitre 2

AHARON

Beaucoup de personnes pensent que le coup de foudre est une belle utopie. Vous savez : cet amour d'emblée entier qui remet en cause l'existence même des êtres qu'il frappe. Et pourtant, l'attirance que j'ai éprouvée pour mon inconnu, était si violente que j'en ai eu peur. Je ne voulais pas y croire, je me mentais à moi-même parce que ce coup de foudre dérangeait ma tranquillité. Je l'avais abandonné sur ce trottoir pluvieux, persuadé d'en rester là, mais ce n'est que le lendemain matin, après une nuit remplie de rêves mouillés, que je réalisai que sa présence me manquait déjà.

Merde quoi ! Je savais bien que je ne reverrais plus jamais ce mec. Qu'il était clairement largement au-dessus de ma sphère. Le coup du prince charmant qui tombe amoureux du crapaud pas beau était une vaste connerie. Mais pourtant je fantasmais. Depuis cette rencontre, mes nuits étaient agitées et mes draps sales. Mon poignet, musclé par le même mouvement depuis quatre jours.

Oh arrêtez de me faire le coup de la vertu outragée, oui je me branle, je n'ai que ça, alors je m'y adonne sans complexe. Avec lui en HD et dolby surround.

Et j'écris, l'histoire n'avance pas, mais les scènes chaudes oui ! Rien à dire, mon imagination de ce côté-là tournait à plein régime ...

Ce jour-là, j'étais en train de travailler sur le fichier de la librairie dans le bureau situé à l'arrière, me lamentant sur mon sort de pauvre homo complexé, quand j'entendis le tintement de la porte.

Un client venait d'arriver. Une distraction. Enfin ! J'en avais besoin. Je me ruais dans la boutique et pila tout aussi vite.

Catastrophe !

En plus d'être à mes côtés dans mes rêves, il fallait en plus qu'il soit physiquement là. En vrai. Là....Là, devant moi... Avec ses muscles et son regard argenté. Une envie irrépressible de l'insulter monta en moi. Connard ! Pourquoi tu envahis mon espace ? Mon cerveau et mon corps ne te suffisent pas ?

- Bonjour....

Ahhhh sa voix....Décharge direct à l'entrejambe. Connardddddddddddd....Je suis quelqu'un de réaliste. Un mec tout droit sorti du magazine « Citizen K », ne pouvait pas s'intéresser à un petit hobbit tout joufflu. A cet instant, je le haïs. Pour me mettre dans un état proche de la tachycardie. Pour avoir saturé mes rêves. Pour être né, tout simplement. Pour avoir fait en sorte de mettre mon level encore plus haut. Oui, connard ! Mon regard devait être assez explicite, car il fit un pas en arrière. Ce recul me permit de recomposer une expression que j'espérais plus en adéquation avec mon boulot.

- Bonjour, répondis-je. Que puis-je faire pour vous ?

Mon imagination débridée avait pleins d'idées sur le type d'occupation que je voulais faire avec lui. Oh oui...Un déchainement de visions obstrua pendant quelques minutes la partie rationnelle de mon encéphale. Seigneur, pitié...Je suis quelqu'un de gentil...Pourquoi tu me fais une telle misère ?

- En fait...Je...Je ...voulais savoir si vous souffriez encore de notre choc frontal ?

L'expression de mon visage, à ces mots, devait être du type, l'air inspiré d'une vache regardant les trains passés, car il me fixa d'un air incertain.

- Ah... Non, merci. Juste une petite éraflure sur ma hanche. Touchant machinalement l'endroit.

- Je voulais encore m'excuser, déclara-t-il.

- Vu que nous regardions ni l'un, ni l'autre devant nous. Les excuses devraient être partagées.

- Oui, mais je ne suis pas blessé.