Chapitre 8

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- Pourquoi avez- vous fait ça ? Murmurais-je sans oser croiser les yeux de l'homme.

- Parce que tu aurais fait la même chose.

Il me dit ça d'une manière qui sous-entendrait presque que c'est ma faute, que c'est moi qui l'ai fait.
Mais je n'ai rien fait. Je suis restée sans bouger pendant qu'il tuait cette fille, je ne l'ai pas aidé, je n'ai rien empêché.

- Je ne l'aurais jamais tuée ! Je n'ai jamais tué personne moi !

- Pas encore. Mais d'après ce que j'ai vu, ce n'est plus qu'une question de temps.

Assis derrière son bureau, il me fixe sans jamais cligner des yeux. C'est vraiment étrange, si j'avais encore des doutes sur la nature humaine de cet homme, ils viennent de s'envoler.

- Vous l'avez tué parce que vous aimez ça, repris-je.

- Je l'avoue sans peine, me répond-il en souriant, et parce qu'elle m'a dérangée en pleine réunion.

- À moi, vous avez laissé la vie sauve, lui rappelais-je en osant un regard dans sa direction.

- Ne te méprend pas, j'ai aussi pensé à te tuer. Et puis je me suis dit que non, tu es plutôt étonnante comme gamine...en tout cas plus que Néan.

- Vous êtes en train de me comparer à votre chien ?! Et je ne suis pas petite !

- Tu vois, si tu avais été saine d'esprit, jamais tu n'aurais dit cela, tu te serais à la rigueur contentée de le penser.

- Si j'avais été ainsi, vous m'auriez déjà tuée non ? C'est donc une très bonne chose, déclarais-je très sûre de moi.

- Nous n'avons sans doute pas la même vision de ce qui bon ou non. Mais oui, tu serais déjà morte au moins quinze fois.

Un long silence passe, je réfléchis à tout ce qui vient de ce passer. Il y a peine deux jours, j'étais encore chez moi et je vivais normalement. À présent, je me tiens dans le bureau de l'homme des histoires de Magda. Qui aurait pu me tuer une bonne dizaine de fois, ne puis-je m'empêcher de penser.
 C'est étrange, il vient de tuer devant moi une fille qui ne devait pas avoir loin de mon âge et s'il est vrai que j'ai déjà été confrontée à la mort auparavant, je n'avais encore jamais été directement impliqué dans sa mise à exécution. Et pourtant, je n'éprouve envers cet homme que curiosité, pas la moindre crainte. Je vais finir par croire qu'il dit vrai et que je ne suis pas tout à fait saine d'esprit.

Depuis l'autre côté de la table, je sens son regard toujours braqué sur moi et je me dandine, gênée. Si il ne me terrifie pas, je n'irais tout de même pas jusqu'a dire que je me sens parfaitement à l'aise en sa présence. 

- Puis-je retourner aux cuisines maintenant ? Je dois aider, il est bientôt midi.

- Tu ne retourneras pas là-bas, déclare-t-il enfin en s'éloignant un peu.

- Je... pourquoi ?

- Parce que j'en ai décidé ainsi, me dit-il comme si ça coulait de source.

- Mais si je ne travaille pas, cela veut dire que vous me laissez rentrer chez moi ?

Il me contemple à présent comme si je venais de sortir la plus grosse ineptie qui lui ai été donné d'entendre de toute sa vie. Je comprend avec désespoir, se faisant, que ce n'était pas du tout ce à quoi il pensait. 

Reine de la nuit [sous contrat d'édition]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant