Ellefut la seule personne qu'il vit en entrant. L'auberge arboraitpourtant une atmosphère sombre, bicolore, dans laquelle la tenuenoire et blanche de Léa ressemblait à du camouflage. Elle se tenaitdans un coin de l'auberge, en compagnie de plusieurs personnesqu'Aurelio ne connaissait pas. Ou plutôt, en compagnie depersonnes qu'il ne vit même pas.
Aupremier regard, il remarqua seulement qu'elle était en bonnesanté. Son regard rubis était toujours aussi vif, ses cheveuxétaient réunis en une queue de cheval haute. Elle les avait coupés,d'ailleurs, car ils effleuraient à peine le haut de son dos.
Ausecond regard, il vit qu'elle avait perdu du poids. Son visageamaigri faisait ressortir les cernes sombres sous ses yeux et sonexpression soucieuse.
Deboutdans l'entrée, il eut un moment de flou total, un instant où ilne savait plus quoi faire. Il ne s'était absolument pas attendu àla trouver là, sans même la chercher. Il pensait qu'il allaitdevoir encore courir dans la ville, à la recherche d'informations.Il resta si longtemps ainsi, à l'observer, que Léa fini par lesentir. Leur regards se croisèrent, et elle resta elle aussi bouchebée. Une éternité passa, puis les compagnons de Léa finirent parremarquer son trouble. Ils se retournèrent de concert. Ce futseulement à cet instant qu'Aurelio réalisa que Rurik accompagnaitLéa... et qu'il était en train de se lever.
Samain se referma automatiquement sur la petite arbalète pendue à sonflanc. Il avait détesté Rurik dès le premier regard, et sicelui-ci voulait l'empêcher d'approcher Léa, il n'hésiteraitpas à l'affronter.
Elleles empêcha d'en arriver là. Elle posa une main légère sur lebras de son compagnon et ils échangèrent un regard silencieux, deceux que seuls des amis de longue date pouvaient partager. Tandisqu'une pointe de jalousie transperçait le cœur d'Aurelio, ilvit Rurik se rasseoir – non sans lui lancer un regard furieux –puis Léa se lever. Il reprit suffisamment ses esprits pour aller àsa rencontre.
Faceà face au milieu de l'auberge, ils s'observèrent un instant. Ilétait incapable de trouver les mots qu'il fallait. Elle sedétourna de lui sans un mot. Il avait presque l'impression desentir son cœur se fissurer, puis se reconstruire lorsqu'ill'entendit demander une chambre au tenancier de l'auberge. Sessix derniers jours de chevauchée se rappelèrent à lui, cettedernière semaine d'abstinence... Bien sûr, il était loin de lafolie... Mais, alors qu'il la regardait, le souvenir de ses formes,de son corps se mouvant en accord avec le sien se fit plus vif, plusintense, et il la désira soudain avec une telle intensité quen'importe qui aurait pu voir une pointe de folie dans son regard.
Letenancier lui donna un jeu de clefs. Elle adressa un clin d'œil àAurelio par-dessus son épaule avant de gravir les marches menant aupremier étage, où se trouvaient les chambres.
Commeun chien bien dressé, il ne se fit pas prier pour la suivre. Sans sesoucier de Rurik, dont le regard perçant aurait pu lui vriller lecrâne, ni des paroles d'Angela qui raisonnaient dans son esprit :
Enles circonstances actuelles, c'est de ne pas la retrouver qui laprotégerait.
*
**
-Est-ceque tu m'as trahie ?
Ilne s'était pas attendu à cela en refermant la porte derrièrelui. Il aurait pourtant dû s'en douter : il aurait étéétrange qu'elle soit la seule à ne pas avoir entendu la rumeur.
-Non.Je ne t'ai pas trahie.
-Tues parti quelques heures à peine avant l'attaque.
Ilse félicita pour avoir gardé la lettre de Mirabelle : il lasortit de sa poche pour la faire lire à Léa.
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La trahison de l'Incube (Murmures de pixies 1)
AçãoMirabelle Maglietta est une reine cruelle qui n'hésite devant rien pour arriver à ses fins. Aurelio le sait : il a été son bras armé pendant des années. Aujourd'hui, il devient la victime de ses machinations : à cause d'elle, la femme qu'il aime fui...