Chapitre 9 : Fatalité des chances

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Le voyage fut long, éprouvant pour ces pauvres âmes perdues. La puanteur du wagon était insoutenable, le sol était recouvert de déjections, les enfants pleuraient, plus personne ne dormait et chacun avait peur, froid, faim.

Colette avait tout raconté à Magda, la mère de Sidonie. La gentille femme avait pleuré durant le récit de la jeune fille. Pleurer pour quoi ? Elle avait pleuré parce qu'elle se sentait coupable de ne pas avoir combattue elle aussi, elle aurait préféré être emprisonnée pour une bonne raison plutôt que d'être là par la faute de son mari...

La mère de Colette, autrefois forte et brillante, n'était plus qu'un être blême et frissonant. Elle avait toujours froid, même lorsque l'air tant irrespirable devant chaud et lourd. Elle toussait à s'en decrocher les entrailles, plusieurs fois Colette la vit cracher du sang.

"Maman, courage. Bientôt je pourrai te soigner, sois forte." Lui disait-elle.

La malade ne répondait que par des faibles gémissements.

Quant à Marcelle, quelque fois elle chantait, -elle avait avoué à son amie qu'elle rêvait de devenir chanteuse dans la capitale- et lorsque sa voix se taisait, elle fermait les yeux bien fort et semblait réfléchir ou même prier...

Après plusieurs jours de convoi le wagon s'arrêta tout d'un coup. Beaucoup de personnes tombèrent et le remue-ménage fut immédiat. Aucun d'entre eux n'eut le temps de laisser la peur les envahir.
Les portes se sont ouvertes, faisant place à un paysage gris.
Cette ambiance maussade correspondait bien à ce qu'il se passait dans l'esprit des déportés, le ciel sombre était comme leurs âmes, aucun rayon de soleil n'y entrait.

Les femmes prirent leurs enfants par les mains, ceux qui avait des bagages les serèrent bien fort contre eux, et Colette aida sa mère à se lever puis posa sa main sur la douce chevelure blonde de Sidonie. Elle n'avait pas pleuré de tout le trajet, écoutant attentivement les belles chansons de Marcelle. Oui cette enfant était un ange, espérons qu'elle n'aille pas trop tôt les rejoindre.

Avant le moment de descendre du wagon, Marcelle empoigna Colette par le haut de sa robe trouée :

"Il nous reste peu de temps, alors écoute moi bien je t'en supplie. J'ai dans ma poche une petite capsule de sianure, tu sais ce que c'est ? Je vais te la donner, moi il m'importe peu de mourir d'une... d'une horrible manière. Alors offre la à qui tu veux, à la petite par exemple, ou bois-la, et bois-la vite. S'il te plaît Colette, nous allons mourir, autant que quelqu'un parmis nous ne meurt pas de la main de ses bochs !"
Elle introduit une petite fiole de vers dans la main de son amie et fût entraînée à l'extérieur par la foule.

Colette ne la lâchait pas du regard, dans la demi obscurité du wagon elle n'avait jamais bien remarqué à quel point son amie était belle.

De l'exterieur, Marcelle se mit à chanter, comme à son habitude, mais d'une voix encore plus forte et pure.

"Ami, entends-tu le vol noir des corbeaux sur...."

C'était le chant des partisans, mais jamais Marcelle ne termina cette belle mélodie, jamais elle ne deviendrai chanteuse à Paris... Son dernier public aura était ses compagnons d'infortune et ses derniers applaudissements auront été le resonement de la balle qui traversa son crâne.

Colette n'avait pas le temps de pleurer, il fallait qu'elle fasse un choix : À qui allait-elle offrir la possibilité de mourir rapidement et sans douleur ?
Françoise, toujours aussi faible, se tenait contre l'épaule de sa fille, ses yeux se fermaient déjà face à la luminosité naissante, elle toussait de plus en plus.
C'était certain, sa mère allait mourir, Colette reprima un sanglot et de ses jambes frêles réussit à sortir du wagon.

"Ma fille, laisse moi et vis..." Gémit la malade.
Non elle ne pouvait pas laisser sa mère mourir comme ça ! Elle ne voulait pas ! Pourtant il fallait qu'elle retrouve Magda et sa fille, qu'elle le leur donne...

Le destin décida pour elle, Magda avec Sidonie dans les bras, affolée apparut face à Colette au même moment où sa mère fut descendue du train par un homme. Était-elle toujours en vie ? Allait-elle vivre ? Tant de question à jamais restés sans reponse...

-Magda, c'est pour vous. Fit Colette sûre d'elle avant de s'adresser à sa protégée. Mon ange, tu vas être gentille avec ta maman pas vrai ? Et quand tu verras mon papa tu lui diras que je l'aime. Au revoir ma Sidonie...

Des larmes d'impuissance coulaient désormais sur ses joues. La petite fille ne comprenait pas, pourtant Magda avait déjà dévissé la petite fiole de verre...

Très vite Colette tourna la tête et un grand homme à l'uniforme noir la poussa dans une file d'hommes et de femmes à l'opposé de la file où on avait emmené sa mère, les vieillards et les enfants.
Elle était dans la file de droite, elle était sauvée, pensait t-elle.

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Ce chapitre est très triste et moi-même j'ai failli pleurer !
Désolée pour les lecteurs qui s'étaient un peu attachés à Marcelle mais désormais elle ne chantera plus...
Avez-vous remarqué les allusions faites aux anges ?
Et excusez moi d'avoir fait mourir Magda et Sidonie, mais c'est une histoire triste.. mais consolez-vous en vous disant que la pauvre petite et sa mère n'ont pas souffert. :/
D'après vous, Colette à t-elle de la chance de se retrouver dans la file de droite; elle qui est belle, jeune, française... ?
Que lui réserve son destin ? Et surtout, quel sera le prix à payer pour qu'elle retrouve sa liberté ?》
    🌼

Mes écrits représentent-ils la réalité ? L'histoire de Colette aurait-elle existé ? Suis-je en accord total avec ce que j'écris ?
Je ne pense pas...
Malgré tout je continuerai d'écrire cette fiction pour la beauté des mots et non pas pour rendre un hommage ou se souvenir.
J'écris cette histoire, je la crée mais ne la pense et cautionne peut être pas.
"Le prix de la liberté" n'est pas une fiction historique car les faits ici decrits ne font pas partit de la réalité, cette fiction veut faire passer un message, j'espère que vous serez nombreux à lire la suite pour le découvrir.

Le prix de la Liberté Où les histoires vivent. Découvrez maintenant