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Le 28 avril fut un jour à marquer d'une pierre blanche. Ses parents lui avaient laissé la maison pour partir en weekend, elle avait alors invité Emi et une autre amie sans réelle importance à dormir. Elle n'aimait pas se sentir seule.

Emi savait que sa meilleure amie était une pseudo star du web. Elle tentait parfois de s'attirer les bonnes grâces de la brune pour qu'elle la fasse apparaître dans ses publications influentes.

Mais Gaïya était bien trop égoïste pour partager le petit royaume qu'elle tentait de construire. Et la métisse s'agaçait silencieusement de ses réponses nonchalantes.

Karen, l'amie par intérêt du binôme parlait peu, et se contentait d'observer la scène sans prendre partie. Elle ne comprenait pas pourquoi tant de prises de bec pour une photo publiée.

Pour un garçon, à la limite.

Mais quelque chose d'abstrait, un réseau social qui plus est, ça la dépassait.

Elle n'avait pas été élevée au milieu des nouvelles technologies, bien heureusement. Elle ne le savait pas, mais elle avait été épargnée.

Voilà pourquoi elle ne comprenait pas, cette course macabre à la notoriété.

Des injures pour une poignée de likes.

Ou pour une photo mal cadrée.

Karen faisait toujours des photos mal cadrées parce qu'elle n'aimait pas son nez. Et personne n'en faisait une affaire d'Etat.

Gaïya attacha ses cheveux et scruta sa meilleure amie avec dédain.

-       Si tu veux être connue, il faut t'en donner la peine, reprit-elle.

-       Comme montrer mon corps partout ? Tu m'excuseras, je repasserai. Répondit Emi, sèchement.

-       T'envoies bien des nudes à Nataniel.

-       C'est pas pareil, je suis pas exposée au monde, moi.

-       Je suggère, j'expose rien.

-       Et bien, je pense que tu suggères un peu trop tes fesses.

-       T'es juste jalouse.

Karen ouvrit la bouche pour tenter d'apaiser l'atmosphère glaciale qui régnait à présent.
Elle était simplement venue pour manger des cochonneries et pouvoir se coucher tard. Pas pour assister à ce combat superficiel et barbare.

-       Les filles... Amorça-t-elle.

-       Jalouse de toi ? J'ai plus de fesses, je te signale ! Et tu fais trop mal ton contouring.

-       Quand tu auras mon nombre de followers je daignerai te répondre. 

-       T'es vraiment conne, ma parole.

Emi s'approcha brusquement de Gaïya qui se leva à son tour. Nez à nez, elles se défièrent du regard.

Karen observa la scène la gorge nouée. Elle n'aimait pas les conflits, elles les slalomaient tous comme une anguille fugace.

Alors qu'elle empoigna son sac et sa veste pour fuir cette confrontation aussi bête qu'insignifiante, un ping sourd retentit dans la pièce, provenant du portable de la brune.

Gaïya baissa les yeux vers son cellulaire et ses yeux s'écarquillèrent.

Se produisit enfin, ce qu'elle attendait depuis une année entière.

-       Nayid... Nayid m'a suivie !

Emi baissa sa tête à son tour, et elles se prirent dans les bras en dansant, comme si rien ne s'était passé.

Karen, mise de côté depuis le début préféra disposer du bazar qui régnait.

Elle ne comprenait décidément pas pourquoi elle était mise de côté.

Si elle savait.

Elle était épargnée.

GaïyaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant