Lupa

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Une heure passa sans que rien ne se passe. Dan rentra chez lui pour éviter de compliquer les choses. Les adultes finirent par arriver, à chaque fois par groupes de cinq. Ils ne firent pas vraiment attention à ce qu'il se passait autour d'eux. Ils se contentèrent juste d'embrasser tendrement leurs enfants et saluer rapidement les autres. Personne ne sembla me remarquer. Cela ne me dérangea pas, je savais qu'il y avait bien plus important. Iskander nous avait prévenus que Lupa était dans un sale état. Avec Sally et Anna, nous préparâmes du thé et quelques sandwichs pour ceux qui arrivaient. Tout le monde avait l'air inquiet. Personne ne se regardait vraiment dans les yeux. J'avais l'impression d'être la seule à voir les autres autour de moi. Même Stan et Peter, qui chahutaient sans arrêt d'habitude étaient calmes.

Vers dix-neuf heures, le dernier groupe arriva. Tout le monde se précipita aux fenêtres et observa des gens sortir de la voiture. Stan et Peter sourirent faiblement à la vue de leur père. Les adultes, enveloppés dans de grosses vestes à capuche se déplacèrent vers l'arrière de la voiture. Ils ouvrirent le coffre, trafiquèrent je ne sais quoi pendant environ cinq minutes, puis le refermèrent. Iskander se dépêcha d'aller ouvrir la porte. Un courant d'air glacial entra dans la maison, ainsi que quelques flocons qui moururent une fois avoir touché le sol. Quatre personnes entrèrent, portant une sorte de brancard. Je ne pris même pas le temps de regarder leurs visages. La cinquième personne referma la porte et ordonna aux autres de monter le brancard à l'étage. S'il y avait quelque chose sur ce lit, ce n'était pas humain. Je pouvais le deviner par la forme que prenait la couverture vert kaki. Des taches de sang recouvraient le tissu ainsi que les mains des quatre porteurs. J'entendis plusieurs sanglots autour de moi. Ma vue se brouilla un moment, tandis que l'odeur âcre du sang infiltrait mes narines. Je titubai jusqu'au fauteuil le plus proche et m'effondrai. Je fermai les yeux un instant et respirai lentement, jusqu'à ce que mon cœur se calme. Une main prit la mienne. J'ouvris les yeux et découvris Maxime, accroupi près de moi, un sourire encourageant aux lèvres.

"Ça va ? Tu veux que je t'apporte quelque chose ?"

Je fixai ses boucles blondes un instant et réussis à sourire à mon tour.

"Je veux bien un verre d'eau, s'il te plaît."

Maxime se leva et lâcha doucement ma main. Il s'éloigna vers la cuisine.

"Incroyable. La fille de Patamon a la phobie du sang !" fit une voix grave près de moi.

J'ouvris les yeux et découvris un jeune homme aux traits fins. Ses cheveux blonds coupés courts étaient humides et ses yeux d'un noir d'encre me détaillaient des pieds à la tête sans retenue. Il affichait un sourire cruel, presque effrayant.

"Laisse-la tranquille, Akis." répliqua Maxime qui revenait.

Je me redressai et pris le verre que mon ami me tendait.

"Non mais attends, c'est quand même un comble ! Quand on connaît Patamon, c'est..."

"La ferme, Akis." fit Iskander d'une voix menaçante.

Il se tenait sûrement derrière mon fauteuil.

"Maxime, on a besoin de toi en haut." ajouta-t-il.

Maxime hocha la tête, me sourit, puis s'en alla. Iskander prit un autre fauteuil et le rapprocha du mien. Il s'assit et prit ma température en posant sa main sur mon front. Le garçon aux yeux d'encre nous observa avec un rictus. Il était très séduisant, mais son côté malfaisant était largement perceptible.

"Tu n'as rien d'autre à faire ?" demanda Iskander, la mâchoire serrée.

Akis leva un sourcil, une expression insolente sur le visage. Il posa ses bottes en cuir sur la table basse en face de lui et posa les mains derrière sa tête.

Tala AnabaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant