Au clair de la Lune

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Mon cauchemar me réveilla vers six heures et demie du matin. Sentant que je n'arriverais pas à me rendormir, je repoussai doucement la main d'Iskander qui se trouvait sur mon ventre et enfilai mes vêtements de la veille. Je mis un moment à retrouver mon soutien gorge et mon collant. Une fois habillée, je quittai le chalet sur la pointe des pieds pour ne pas réveiller la marmotte qui me servait de copain. Je courus jusqu'à mon chalet pour me réchauffer et me faufilai à l'intérieur en grelottant de froid. Je me changeai et optai pour quelque chose de plus confortable qu'une robe et des collants : un jean noir, de grosses chaussettes et un sweat-shirt aux couleurs du lycée (vert et or) qui avait appartenu à Iskander. Je remontai mes cheveux en queue de cheval et notai dans un coin de ma tête qu'il fallait que je refasse ma teinture. Je voulus enlever mon piercing à l'hélix, mais je me souvins que je l'avais laissé sur la table de nuit d'Isk. Alors j'en mis un au septum. J'attrapai ensuite une grosse écharpe et mon coupe vent. Avant de sortir, j'attrapai mon sac à dos dans lequel j'avais mis plus tôt ma trousse à dessin et mon carnet à croquis.
Une fois dehors, j'enfilai mes gants rouges et claquai la porte de mon chalet. Je ne l'avais jamais fermé à clé, je faisais confiance à tout le monde, ici. Nous avions tout ce dont nous désirions, alors pourquoi aller voler chez les autres ? 

Je traversai les trois passerelles qui me séparaient de l'échelle d'un pas léger, puis me laissai glisser le long de l'échelle. Une fois avoir touché le sol, je fouillai dans mon sac à la recherche d'une lampe torche et l'allumai. Je dépassai la maison principale, contournai les voitures, et remarquai que les traces de pneu sur le sol blanc avaient disparu. Il avait dû neiger à nouveau cette nuit. Je m'enfonçai dans la forêt, à la recherche de quelque chose qui attirerait mon attention et qui me donnerait envie de dessiner. Je brandis ma lampe torche devant moi et avançai dans la neige en créant de la vapeur à chaque expiration. Je levai la tête pour regarder dans les arbres. Les étoiles et un rayon de lune filtraient à travers les branches des sapins. J'aurais pu le dessiner, mais je n'avais pas cette impulsion qui me prenait quand je voyais quelque chose qui me plaisait. Par exemple quand j'apercevais une clairière, ou bien un ruisseau éclairé par le soleil, je sentais comme une force dans ma poitrine qui grandissait, et mes yeux s'écarquillaient légèrement. Alors je savais que je ne devais surtout pas louper cet instant, et peu importe l'endroit où je me trouvai, je m'asseyais et sortais mes outils, puis griffonnais pendant plusieurs minutes intenses.

Je continuai donc mon chemin sereinement. Je me repassai les événements de la soirée en boucle. Un repas délicieux avec mes proches, et cette nuit que j'avais passée avec Iskander. Bien sûr, j'avais déjà expérimenté le sexe avant. Mais jamais de cette manière. Jamais je n'avais été aussi passionnée, jamais mon plaisir n'avait été aussi intense. Peut-être parce que Iskander était doué (très doué, même) mais peut-être aussi parce que j'étais réellement amoureuse de lui. C'était beaucoup plus fort qu'avec Jake, alors que quelques mois plus tôt je n'aurais juré que par lui. 

Soudain, en tournant la tête à droite, je découvris des taches régulières plus loin dans la neige. Mes douces pensées s'évaporèrent aussitôt. Je m'approchai et reconnus des traces de pas. Elles ne devaient pas dater de très longtemps. Intriguée, je décidai de les suivre, posant mes pieds dans chaque empreinte. Tout à coup, mon chemin fut éclairé par un faisceau plus lumineux que celui de ma lampe de poche : la lune. Elle était presque pleine. Je l'observai un instant, comme attirée par elle. Je baissai soudainement la tête et posai un genou à terre. Ce geste était instinctif, comme si je l'avais toujours pratiqué. Cela me fit penser à une sorte de prière. Je finis par me relever, et ressentis une paix intérieure puissante, et cessai de trembler de froid pendant quelques secondes.
Je repris mon chemin en respirant à pleins poumons et en souriant. Les rayons de la lune filtrant au travers des arbres, je n'avais plus besoin de ma lampe de poche. Je l'éteignis donc et la rangeai dans mon sac à dos.

Tala AnabaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant