chapitre 4 - les messages

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  Place du Général de Gaulle, tout le monde travaille, fouetté jusqu'au sang. Soudain, un bruit assourdissant, les immeubles autour de nous s'écroulent, une fumée de cendres s'envole. Les gens tentent de s'enfuir mais se font rattraper et frapper aussi rapidement. « Les mutins, ou autres conneries du genre seront battus devant leurs collègues tantouzes qui seront sûrement en train de chialer car ça fera une personne en moins à baiser, puis enfermer dans des endroits très sombres. Les mutins, ou autres conneries du genre seront battus. » Cette phrase me hante. « Il ne faut pas fuir, il ne faut pas fuir, il ne faut pas fuir. Lucas ! Vite, viens » ! Je me retourne, mes quatre coéquipiers me regardent, me tendent le bras. « Viens, on a trouvé une issue, allez viens dépêche-toi, allez Lucas tu vas nous faire repérer. » Je regarde autour de moi, je me mets à courir, je cours, cours à en perdre haleine. Croche-patte. Je tombe sur le dos. Un visage se rapproche, il dit des mots que je n'entends pas, fusil pointé vers ma tempe gauche. « LUCAS !!! NON, LEVE TOI, COURS VITE !!! Les mutins seront exécutés. » Boum.

  Je me réveille, respire fort, de grandes inspirations, de grandes expirations, je suffoque. « Ouf, enfin ! On a cru que tu ne te réveillerais jamais. » J'ouvre les yeux, lentement, la lumière de la pièce m'éblouit. Je touche ma tempe, rien. Je reconnais alors Chloé. « Ne fais pas trop de bruit, les autres dorment. On s'est relayé pour surveiller quand t'allais te réveiller. Tiens, une bouteille d'eau. Et je suis allé chercher les biscuits qui te restaient, dans ta valise. » Je la remercie et prends la bouteille, un biscuit, tremblotant. « On a chargé ton téléphone aussi. T'as beaucoup d'appels manqués et de messages, je te laisse les lire. » Je me saisis du téléphone. 6h. Dans une heure, il faut se lever. Dix-huit messages, cinq appels manqués, trois messages vocaux. « C'est Marvin. J'espère que tu vas bien et que tu vas vite me répondre. J'ai appris que j'allais à Bordeaux, et que tu es à Lille... Ça fait plutôt loin. Tu me manques déjà. », « C'est encore moi. J'ai peur, j'suis pas en sécurité sans toi. On arrive bientôt, il y a du monde autour de moi, je peux pas parler fort. Bisous. », « Lucas, c'est encore moi. J'ai peur quand tu me réponds pas, et t'envoyer des messages me réconforte. Un membre de la DFF m'a pris de force... Je ne sais pas pourquoi, je ne sais pas ce qu'ils me veulent. Ils m'ont enfermé dans une pièce sombre, humide, étroite t. Je vais m'en sortir ». Je l'appelle. Aucune réponse. Je rappelle. « Marvin, c'est moi. J'avais plus de batteries et je me suis évanoui. Tout va bien, je suis dans un appart' avec d'autres personnes. Tiens-moi au courant sur ce qu'il se passe à Bordeaux. Tu me manques aussi. Bisous. » Je lis les autres messages. Quelques messages de Marvin encore, de mon frère, ma soeur, ma mère. Une main me touche l'épaule. C'est Chloé. « Pourquoi ton mec est à Bordeaux ?

-C'est pas vraiment mon mec... Enfin, ça ne devait pas tarder. Il est à Bordeaux parce qu'il est noir.

-Ah, je comprends. Ne t'inquiète pas, tu le retrouveras. On t'aidera. Tous. Ils vont voir que les "tantouzes" ne sont pas des fiottes. »

   Sa main se resserre contre la mienne, elle me sourit, je souris aussi. « J'ai fait un rêve étrange.

-Raconte-moi, Lucas.

-Vous me forciez à courir, on nous a repérés, et on m'a tué. Un membre de la DFF m'a tiré dessus à coup de fusil.

-Ne t'inquiète pas. C'était un mauvais cauchemar, c'est normal avec ce qu'on vit. Il faut pas se laisser abattre. Il nous reste quarante minutes pour nous reposer. Je vais rester à côté de toi pour dormir, si ça peut te rassurer.

-Merci Chloé. Merci pour tout. »

   Je ferme les yeux, mais je n'ai pas sommeil. J'ai sûrement déjà trop dormi depuis que je me suis évanoui. Les minutes passent, j'entends la respiration de Chloé. Je me lève sans faire de bruit, me tiens au mur, fais attention à ne rien heurter. J'arrive à la cuisine mais ne trouve pas l'interrupteur. Soudain, une main me saisit la cheville. Je pousse un cri. « Chuuut ! Tu vas réveiller tout le monde !

-Putain, j'ai failli avoir une attaque Romain !

-Et toi t'as failli me marcher dessus. Y'avait nulle part où dormir, alors je dors dans la cuisine. Enfin, je dormais, avant qu'un beau jeune homme ne me réveille. » Romain me sourit. Il est là, devant moi, torse nu avec un jogging. Je suis gêné, je ne sais pas quoi faire. "Beau jeune homme". Je ne le connais à peine, et déjà des avances. « Je, euh... Je voulais juste boire un petit coup, je peux ?

-Bien sûr. Tu t'es bien remis de tes émotions ?

-Hm, oui, merci. Tu devrais te reposer encore un peu, demain on doit travailler dur.

-T'as raison. A tout à l'heure, Lucas.

-A tout à l'heure. » Je retourne me coucher, et m'endors.

   6h55, tout le monde est prêt, nous prenons nos affaires, téléphones chargés, n'oublie pas la clé, mets-la sur la serrure, nous dévalons les escaliers à toute vitesse pour être sûrs de ne pas arriver en retard. Il y a déjà du monde sur la place, en file indienne. Claire, Chloé, moi, Théo, Romain, rangés dans l'une des files. Quelques minutes passent, et ma poche vibre. Je sors mon téléphone. « Message de : Marvin. Viens me chercher. C'est l'enfer. »

HexagoneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant