Chapitre 8

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De retour dans sa chambre, Hamich ne s'était jamais sentit aussi bien depuis plusieurs années. Il se sentait léger, de bonne humeur, prêt à bondir à travers la pièce et sa jambe -ou du moins ce qu'il en restait- ne le faisait plus souffrir. Mais son entrain fut vite freiner lorsqu'il ouvrit la porte. Lloyd Grinfield avait installé au milieu de la pièce un petit piédestal, faisant face à trois immenses miroirs tenus par des domestiques.

"Pourrais-je savoir pour quelle raison vous êtes dans ma chambre, Mr. Grinfield ? Demanda le Comte en fronçant les sourcils.

- J'ai entendu dire, répondit malicieusement le petit homme rondouillard en se retournant, un sourire en coin aux lèvres. J'ai entendu dire que Lady Cornally vous avait invité à partager son souper avec elle et sa famille. Aussi je me suis dit que je pourrais vous aider à vous habiller !

-Mr. Grinfield, vous avez déjà fait énormément pour moi. Ne vous embêtez pas avec mes histoires !

-J'insiste ! La Comtesse est une personne extrêmement influente, souper avec elle est un honneur ! Il vous faut être âpreté comme il se doit. C'est là que j'interviens ! De plus, vous n'avez point de valet de chambre..."

Lloyd attrapa de sa main potelée la manche du Comte et le conduisit sur la petite estrade. Puis, aidé de son mètre et d'un sens critique, il proposa plusieurs costumes. Finalement, Hamich jeta son dévolu sur un habit en trois pièces noir, des chaussures cirées et brillantes et un nœud papillon vert foncé. Le tout était en harmonie avec son teint et ses cheveux grisonnants. Lorsqu'enfin son regard se posa sur son reflet, Wyford retrouva une certaine dignité qu'il avait perdue ces dernières années. Il tourna, s'observa sous toutes les coutures, sourit, les yeux pétillants. Les domestiques qui tenaient les miroirs le complimentèrent chacun à leur tour, ce qui toucha le Comte.

« Cela vous plaît-il ? demanda Grinfield en sortant un autre vêtement d'une malle. On peut en essayer un autre si vous le désirez...

-Non merci Grinfield... Celui-là est parfait : si ce reflet ne me renvoyer pas un homme qui agit tout comme moi, je n'aurai pas pris conscience de l'état dans lequel je suis. Merci vraiment ! »

Le petit homme rondouillard sembla satisfait de cette réponse et lissant sa moustache, déclara que son travail était fini. En un rien de temps, toute l'organisation pour habiller le Comte fut rangée et la chambre retrouva sa fonction sous ses yeux écarquillés. Une fois seul, l'homme se retrouva dans le silence, la pièce baignée dans la lumière jaunie du soleil se couchant. Avec une certaine lourdeur, sûrement une fatigue due à l'effervescence de la journée, il s'installa au bureau, prit une feuille, sa plume fétiche et de l'encre puis commença à écrire.

~ooOoo~

Ma chère fille,

Comme je te l'avais annoncé dans ma dernière lettre, j'ai été invité à l'inauguration du Rainflower. C'est de ce fabuleux endroit que je t'écris aujourd'hui, et je souhaite tout te raconter. Lis ces mots le soir, dans ton lit, avant de fermer les yeux, car le Rainflower est digne de tes rêves. Je te raconterais tout ce que j'ai vécu durant cette première journée.

Je ne suis pas arrivé tôt, ce matin. J'ai préféré flâner sur le chemin, redécouvrir un peu La Ville, que tu connaîtras dès que nous pourrons vivre ensemble. Lorsque je suis arrivé, je peux te dire qu'on ne peut pas ne pas voir le vaisseau. Il est immense ! Je pense que lorsqu'il décollera, tu pourras le voir de chez toi. Oh, Elia ! J'aurais tellement aimé que tu sois présente, avec moi, à bord... Tu aurais tellement aimé ! Le vaisseau est tellement grand, qu'il dépasse les toits. D'après ce que j'ai entendu, sa construction a demandé le rasement de trois énormes entrepôts. Il est fait, du moins à l'exterieur, dans un matériau métallique, sûrement de la tôle ou d'aluminium, je ne sais point... Il a été peint dans la couleur préférer de ta mère, en bordeaux, et décoré d'arabesques en bois. On dirait presque un palais sortit de tes romans ! De la fumée sort des longues cheminées qui l'alimentent. De plus, j'ai eu la chance d'avoir un magnifique soleil pour mettre en valeur cette vue époustouflante. Plusieurs personnes faisaient la queue pour y entrer. Mais le plus étonnant était qu'il semblait n'y avoir que l'Aristocratie, accompagnée de leurs domestiques. Ce fut confirmé lorsque je dû m'enregistrer pour entrer. Apparemment, chaque passager a reçu la même invitation que celle dont je t'ai parlé, et chacun doit présenter ses papiers d'identité et son acte de noblesse. Les valets et femmes de chambres entrent par une autre entrée.

Rainflower [en pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant