La nuit était tombée sur le camp des français. Voilà trois jours qu'ils avaient quitté leur clairière et faisait route plein est. Cependant, la troupe restait à l'écart des routes anglaises, devant souvent passé par les bois. Les premiers jours avaient été les plus difficiles car leur trajet les faisait passer par les contreforts des Appalaches. Ainsi l'escalade des monts et des collines sur des lieues et bien souvent la journée entière, épuisait peu à peu les hommes. Lourdement chargés, ils partaient dès lors que l'aube pointait et ne s'arrêtaient qu'à la nuit noire. On aurait pu croire que le diable coursait les français et pourtant ils ne faisaient que se diriger droit vers leur cible. Chaque soir, les tentes étaient installées en cercle autour d'un immense foyer de feux tandis qu'un dizaine d'hommes surveillaient les abords du campement. La chance que les anglais tombe sur la compagnie était si faible qu'aucune reconnaissance des alentour n'était faite si ce n'était la vérification de la présence de fermes ou de villages à piller pour refaire le stock de vivres.
Ce soir-là, les hommes étaient revenus bredouilles. Ils avaient repéré un groupement de fermes lourdement surveillées non loin au sud mais un assaut était trop risqué à cause de la proximité d'Albany, important centre logistique de l'armée britannique. Aussi les français s'étaient-ils faits discrets, montant leur campement dans un silence morose dû autant à l'épuisement qu'à la demande du capitaine de limiter le bruit. Ils étaient certes en territoire partagé entre les colons des Provinces-Unies, les indiens Mohicans de l'autre côté de la rivière Hudson et les anglais au sud à l'est mais les britanniques restaient les maîtres de ces terres. Aussi les hommes restèrent dans leur tente et mangèrent le plus vite possible pour éteindre le feu dès que possible. Jean Baptiste quant à lui s'était retiré dans sa tente, lisant des cartes à la lueur d'une vieille lampe tempête. Le jeune homme sentait ses yeux se fermaient, fatigués par la faible luminosité et la qualité médiocre de ses documents. Malgré tout, il s'acharnait malgré l'épuisement de la marche à situer sa compagnie. Ils avaient parcouru une longue distance en quelques jours, mais ils leur restaient près de soixante-cinq lieues, soit 260 kilomètres, à parcourir. En espérant pouvoir marcher douze heures par jour, à raison d'une lieue par heure, il leur faudrait plus moins six jours de marche, arrivant aux alentours de Lexington vers les heures du midi.
Cependant, ils ne passaient pas par les routes et couper à travers champs les ralentissait considérablement, sans compter sur le fait qu'ils étaient lourdement chargés et faisaient de nombreuses pauses pour repérer le terrain. Jean Baptiste comptait sur une dizaine de jours depuis leur position actuelle pour atteindre sa cible. Avec de la chance. Plongé dans ses calculs, et alors qu'il se frottait le visage en grognant de fatigue, il n'entendit pas la silhouette toute vêtue de noir se glissait dans la tente et se marchait à pas de velours vers lui. Il n'entraperçut également pas l'éclat de la lame qui jaillit dans le poing de l'assassin, n'y ne sentit le mouvement d'air de la dague lorsque le coup fut porté droit vers sa nuque. A peine eut-il un sursaut lorsque la pointe s'enfonça dans sa chair. Et s'arrêta nette. Une unique goutte de sang coula de la blessure plus que minime. A peine Jean Baptiste voulut se lever, qu'une main l'agrippa sans ménagement par les cheveux et qu'on posa le tranchement de la lame contre sa gorge. Il pouvait presque sentir sa veine palpitait contre le froid métal. Mais en lieu de cela, il eut une bouffée de délicates pétales de rose, de l'opulence du jasmin sur un fond sensuel de muscs et de bois précieux. Une main encore gracile malgré le maniement des armes caressa sa joue et il fit face aux yeux d'Iris qui le regardait, un éclat malicieux illuminant son visage.
« Ma mie... Que me vaut cette atteinte à ma vie ?
– Au fait que depuis maintenant trois jours, tu délaisses cette pauvre femme qui t'a suivi au péril de sa vie, de l'honneur de sa famille jusqu'aux fin fonds des colonies anglaises pour être repoussée...
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Une Odeur de Poudre
Historical FictionDans un XVIIIeme siècle ensanglanté par une Guerre de Sept ans non achevée, un jeune capitaine de l'armée royale française combat au coeur du territoire britannique, cherchant à capturer un membre haut placé de la noblesse anglaise impliqué dans un...