Stan a dégringolé la vingtaine d'escaliers qui séparaient le toit du dernier étage de l'immeuble, impatient de savoir qui était la personne qui l'attendait.
Évidemment, cette personne n'était personne d'autre que Karl. Ça n'étonnait pas réellement le fêtard mais la boule d'angoisse qui séjournait auprès de son estomac depuis presque trois semaines, a aussitôt disparu. Il ressentait encore un peu de malaise à ce sujet, mais rien que voir Karl avait fait l'effet d'un soulagement énorme.
Ce dernier avait les cheveux très gras, il puait la bière et avait les yeux rouges de fatigue mais il vivait et c'était tout ce qui comptait aux yeux de Stan.
Karl ne semblait pas être bien; il avait l'air d'avoir envie de pleurer et avait grand besoin de prendre une douche. Stan ressentait tout cela uniquement en le regardant et n'était pas à l'aise face à cette situation. Karl l'avait habitué à énormément de moments difficiles mais jamais à une chose pareille.
De plus, le grand jeune homme était encore en train de trembler de soulagement.-Qu'est-ce que je suis content de te voir vivant!, s'est exclamé Stan sans pour autant s'approcher de son ami.
Karl n'a rien répondu. Peut-être en était-il incapable ou n'en avait-il simplement pas envie, Stan n'en savait rien. Le mutisme du grand type aux longs cheveux n'aurait pas inquiété Stan en temps normal, mais pour le coup, ce dernier avait réellement l'impression que quelque chose se passait, que son meilleur ami tramait quelque chose de grave, comme par exemple son suicide.
Sans prévenir, le dépressif s'est remis droit et s'est éloigné du mur sur lequel il s'appuyait depuis plusieurs minutes déjà. Ensuite, il s'est dirigé vers les escaliers argentés qu'il a montés afin d'arriver sur le toit de l'immeuble. Peut-être que cet endroit l'avait plus manqué que Stan lui-même mais il gardait tant ses sentiments pour lui que personne n'aurait osé parier à ce sujet.
Stan s'est empressé de le suivre et ne l'a pas quitté des yeux une seule seconde. Il était heureux du fait qu'il soit là, qu'il ait encore ses cheveux et qu'aucun de ses membres ne lui manquent.
-Tu étais où, Karl?, a demandé Stan pour briser le silence.
Le garçon en question est resté silencieux durant deux minutes avant de se retourner vers la voix.
-Je suis désolé, Stan, je suis trop désolé!
Il n'a rien dit de plus. Il s'est contenté de prononcer ces quelques mots avant que des larmes ne se mettent déjà à couler le long de ses joues à la peau grasse. Son chagrin était sincère, Stan le savait; il pleurait si rarement qu'il ne pouvait que l'être.
Stan avait envie de poser des milliers de questions à son meilleur ami dans le but de remettre les choses au clair dans son esprit mais il se rendait bien compte que ce n'était pas le moment, qu'il était préférable d'attendre un meilleur moment que celui-là pour prendre le temps de faire ça.
-Ma Maman est partie, a repris le jeune dépressif. Elle est partie et je suis tout seul.
Pris de panique, Stan a commencé à se faire tous les scénarios possibles et imaginable suite aux paroles de son ami. Il avait peur que Tess ait laissé son fils adoré en quittant le domicile sans aucune explication ou pire, qu'elle soit morte. Ces deux théories l'angoissaient d'une manière indescriptible.
Ne recevant aucune explication, celui qui a beaucoup de confiance en lui en temps normal est doucement allé s'asseoir auprès de son meilleur ami, qui avait pris place à même le sol.Un paquet de cigarettes entamé se trouvait, par chance, dans le blouson du plus âgé des deux. Ce dernier a donc allumé une clope avant de directement la tendre à son ami, qui était maintenant noyé dans une mare de larmes salées.
Cette situation était ingérable pour les deux garçons: l'un voulait à tout prix ravaler son chagrin et l'autre espérait trouver la façon parfaite à utiliser pour rendre le sourire au premier.-Calme-toi, Karl, a lancé le blondinet en frottant de sa grande main le dos de l'adolescent plein de tristesse.
Ce geste était inhabituel mais certainement parfait dans une situation pareille. Il prouvait la présence de Stan à Karl, qui tentant tant bien que mal de remettre ses yeux au sec. Cela n'était pas chose facile, malheureusement.
-Elle est tombée malade, il y a deux semaines, a-t-il essayé d'expliquer les choses le plus calmement possible. Je ne l'ai pas quittée une seule seconde car elle était au plus mal, à l'agonie, elle ne savait plus rien faire d'elle-même.
-Mais maintenant, elle va mieux vu que tu es revenu?, a demandé Stan, étant sûr de détendre l'atmosphère de ces mots.
-Non, elle est à l'hôpital, a sèchement prononcé le grand type aux cheveux longs. Elle est à l'hôpital depuis deux jours et est très malade.
Cela a fait l'effet d'un coup de poing dans le coeur de Stan. Il n'était peut-être pas directement concerné par cette histoire mais connaissait Tess depuis quelques années déjà et a toujours adoré cette femme au coeur d'or.
De plus, la peine de Karl était si énorme qu'elle ne pouvait que faire du mal à son entourage.-Je peux dormir chez toi, Stan?, a fini par demander Karl. Je sais que vous êtes déjà trois gosses mais je suis prêt à payer ma partie, jusqu'à ce que ma mère revienne.
Un silence a suivi avant que Stan n'ose faire un simple hochement de tête. Évidemment qu'il était d'accord que son ami dorme chez lui, il ne pouvait qu'accepter mais quelque chose le titillait.
-Tu as dormi où ces deux derniers jours?
-À l'hôpital. Mais je n'en peux plus de voir Maman dans cet état, de l'entendre s'arracher la poitrine avec une quinte de toux au beau milieu de la nuit. J'ai besoin de me reposer, de m'éloigner de toute cette merde qui lui arrive.
-Tu es le bienvenu, s'est contenté de répondre l'ami du malheureux. Tu peux venir dormir aussi longtemps que tu veux mais à une seule condition.
Karl n'a pas demandé de développer la condition en question. Il s'est contenté de tendre un pauvre billet de dix euros tout froissé et qui lui restait.
Stan a trouvé cela ridicule et a sommé son ami de les ranger.-Va prendre une douche, tu empestes la déprime, a lancé Stan.
Ensuite, ce dernier a levé son ami et l'a embarqué jusqu'à la salle de bain de son appartement, où il l'a laissé seul, dans l'espoir qu'il ait l'air moins triste une fois propre.
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Et on souriait
Teen FictionStan et Karl sont deux garçons dont l'état d'esprit et la façon de voir le monde les opposent entièrement. Mais ils sont liés par une amitié tellement forte. Merci à @MyWorlsIsYours_ pour la couverture.