Stan et Karl n'ont plus dormi après l'épisode de la salle de bain. Le premier a proposé de monter sur le toit, comme à leur habitude et le second a accepté sans même hésiter une seule seconde. Il avait besoin de ressentir la brise fraîche de la nuit dans ses cheveux longs, de pouvoir emplir ses poumons d'air frais.
Les deux jeunes garçons étaient chacun assis sur une chaise en plastique, séparées de plusieurs mètres, comme s'ils voulaient se protéger de l'autre. Ce n'était pourtant pas le cas: ils étaient heureux d'être enfin réunis, de se retrouver sur le toit après tout ce temps sans nouvelle.
Néanmoins, il a fallu une bonne quinzaine de minutes pour que l'un n'ose ouvrir la bouche dans le but de briser le silence. Avant, seules les deux cigarettes qu'ils fumaient ne faisaient un léger bruit.
Karl n'était pas vraiment dérangé par le silence qui planait au-dessus de leur tête mais avait quand même vraiment besoin de s'exprimer, de s'exterioriser, d'aborder toutes les merdes qui lui arrivaient et d'en discuter avec son meilleur ami.Mais il ne savait pas comment s'exprimer et quels mots utilisés. Il avait toujours été minable pour parler, ça n'a jamais été son truc. Lui, son fort, c'est le regard, le toucher, les gestes.
Les mains de Karl parlent tellement plus que ses lèvres. Comme si son coeur était d'abord relié à ses membres et ensuite seulement à son pauvre cerveau.C'était peut-être pour cela qu'il faisait l'amour avec Tim, au lieu de simplement coucher. Peut-être que le fait que ses mains touchent son torse voulait dire tellement plus de choses que des sentiments tels que l'attachement ou l'amour.
Karl avait envie de raconter tout cela à Stan, de lui faire part de ses peines et de son bonheur. Il voulait parler, parler, parler, jusqu'à ce que la salive lui manque, jusqu'à ce qu'il n'ait plus rien à dire, jusqu'à ce qu'il se sente enfin vivant.
-Lorsque je suis parti, j'ai beaucoup pensé à toi, au lycée, à Tim mais aussi à ma vie, a clamé le garçon aux cheveux longs, sans prévenir.
Stan a levé les yeux et a tourné la tête vers la voix. Il voulait savoir ce que ce dernier avait à dire, avait sur le coeur.
Il n'a posé aucune question et a laissé Karl continuer à s'exprimer, sachant pertinemment que ça lui faisait du bien.-J'ai dix-huit ans, bientôt dix-neuf, a-t-il repris, et je me suis rendu compte que je n'ai pas encore vraiment vécu. Ma mère non plus n'a pas vécu et maintenant, elle est sur son lit de mort. Ça me déchire le coeur et même si je suis un putain de suicidaire, comme tu dis, je n'ai pas envie de mettre fin à mes jours avec le regret que j'ai actuellement.
Stan était concentré et enregistrait chaque mot prononcé par le plus jeune, avant de les placer dans une passerelle de sa mémoire. Toutes ces paroles étaient sincères et ne devaient pas être simples à dire pour autant. Stan s'en rendait bien compte alors, il était très respectueux.
-Je compte toujours mettre fin à mes jours mais je pense de plus en plus que le faire vers mes vingt-trois ou même vingt-cinq ans est plus intéressant, plus judicieux.
-Je le crois aussi, a hoché Stan de la tête. Je pense même que tu ne devrais pas le faire du tout.
Le suicidaire n'a évidemment pas opiné à cette réflexion, qui se voulait être intelligente pourtant. Puis, Stan a soudainement eu une idée:
-Si tu en as vraiment marre de qui tu es ici, tu n'as qu'à te débrouiller pour quitter le pays, sans prévenir personne quant à ta destination.
Il a pris en compte la remarque que son ami lui avait fait; ce dernier l'a remarqué à la façon dont Karl regardait devant lui.
-Je n'ai pas envie de laisser ma mère toute seule, a fini par révéler Karl.
Ces mots étaient sincères, très sincères. Le jeune garçon n'est pas du genre à montrer ses sentiments mais s'il y a bien une chose dont tout le monde est sûr, c'est que Karl aime sa mère de tout son petit coeur meurtri, qu'il serait incapable de lui faire du mal. La savoir malade lui avait davantage brisé le coeur mais il ne pouvait pas se donner la mort avant qu'elle aille mieux, avant qu'il soit sûr qu'elle pouvait encore vivre. Stan trouvait son meilleur ami stupide d'agir de cette manière mais ne pipait mot pour autant.
Il ne s'est plus rien passé jusqu'à six heures du matin. À cette heure-là, de nombreuses personnes dormaient encore, étant donné que les vacances avaient pointé le bout de leur nez mais certains adultes, tels que le père de Stan, quittaient leur maison pour aller travailler.
Lorsque ce dernier est sorti de son petit appartement, au lieu de se diriger vers le rez-de-chaussée comme à son habitude, il est monté sur le toit. Il savait pertinemment que les deux garçons y étaient et il avait besoin de les voir seulement dix secondes.-Karl, ton téléphone ne cesse pas de sonner depuis une bonne heure, a clamé le quinquagénaire, plutôt gentiment, en tendant l'objet au concerné.
L'adolescent s'est levé pour aller le chercher et a poliment remercié l'homme d'un simple hochement de tête, ne sachant pas trop quoi faire d'autre. Le père de famille n'a rien ajouté et a directement fait demi-tour.
Le garçon aux longs cheveux est retourné s'asseoir sur la chaise blanche, en face de son ami mais ne quittait pas l'écran de son téléphone des yeux. Quelque chose semblait le perturber mais il gardait cela pour lui, trop concentré sur ce qu'il faisait.
-Qu'est-ce qu'il se passe, Karl?, a curieusement demandé Stan.
-C'est Tim, a répondu Karl, les pensées en vrac. Il ne me sonne jamais mais pour le coup, il a essayé plus de quinze fois.
-Rappelle-le.
Cela était un bon conseil et l'a donc accepté. Il a pianoté le numéro de son amant de tête et ensuite, a posé le combiné contre son oreille droite.
Il n'a pas eu à attendre longtemps avant d'entendre la belle voix de Timothy, l'insupportable dont il était presque secrètement épris. Karl aurait aimé lui crier dans le combiné qu'il l'aimait et avait envie de le voir, de l'embrasser, de lui faire l'amour mais à la place de tout ça, il est entré dans un mutisme infernal et attendait que l'autre s'exprime d'abord.-Karl?, a prononcé le jeune homme avec hésitation, comme s'il avait peur de dire une bêtise. Karl, j'ai besoin de te parler.
-Je t'écoute, a-t-il essayé d'être le plus froid possible.
-Viens me voir, a conclu l'homosexuel refoulé, viens dormir chez moi.
Karl n'avait aucune idée de la manière dont Tim avait été mis au courant quant à son retour et la raison pour laquelle il semblait être pour une fois si gentil mais en tout cas, il ne pouvait pas cacher le fait que ça lui faisait chaud au coeur, que ça lui faisait l'effet d'un grand bol d'air.
Après plusieurs minutes d'appel, Stan a discrètement fait comprendre à son ami d'inviter son bien-aimé sur ce toit, afin de lui parler en face à face et peut-être, voire surtout de l'embrasser.
Après avoir accepté la proposition, Tim est sorti de chez lui en prétextant avoir un rendez-vous avec son groupe d'amis, avec qui il comptait passer la journée complète. Évidemment, c'était faux mais ses parents ont sauté à pieds joints dans le mensonge. Il est monté dans le premier bus qui passait par là et est arrivé à destination une petite demi-heure plus tard.
Une fois devant l'immeuble, le jeune garçon aux cheveux châtains n'a pas hésité à monter les escaliers quatre à quatre pour arriver plus rapidement sur le toit. Là-bas, il a directement reconnu Karl et même si Stan s'y trouvait également, il n'a pas réfléchi avant de se diriger à toute vitesse vers son amant: il l'a serré contre son torse musclé et l'a embrassé à pleine bouche. Ce n'était ni délicat, ni romantique mais d'une sincérité à tomber par terre.
Tim s'était tellement inquiété pour Karl.____
Je suis désolée pour le temps que je prends...
Merci à larmesmauves MayHaverhill Beautifullybroken__ de m'avoir donné beaucoup d'inspiration par une simple conversation!! ♡
VOUS LISEZ
Et on souriait
Teen FictionStan et Karl sont deux garçons dont l'état d'esprit et la façon de voir le monde les opposent entièrement. Mais ils sont liés par une amitié tellement forte. Merci à @MyWorlsIsYours_ pour la couverture.