10 : L'acceptation

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Se retrouver seuls à la mer a fait un grand bien à Karl et Stan, qui n'avaient plus passer de temps ensemble depuis un bon moment déjà. Certes, il manquait le toit, qui était définitivement leur endroit préféré pour se retrouver mais il y avait une chambre assez grande que pour eux deux.

La journée, ils sortaient, mangeaient de la bonne nourriture dans des restaurants chics que Stan payait toujours pour faire plaisir à son meilleur ami mais également pour que ce dernier accepte d'y aller. Souvent, ils passaient quelques heures à la plage soit à se chamailler dans l'eau salée ou à rester couchés sur leurs serviettes disposées sur le sable chaud. Quand cela arrivait, ils ne disaient rien, n'échangeaient aucun mot mais rien que le fait d'être là tous les deux et de pouvoir sentir la respiration de l'autre était une chose plutôt appréciable.

Mais chaque soir, sans exception, ils rentraient à l'appartement avant onze heures et s'allongeaient chacun dans leur lit. Il y avait un bon mètre d'écart entre ces deux-là mais ça ne faisait rien : dans la plupart des soirées, plus de vingt mètres prennent place entre eux ainsi que des mauvaises pensées mais ce n'est pas pour autant qu'ils ne sont plus amis, bien au contraire.

L'avant-dernier soir du séjour, Karl a pris place dans son petit lit inconfortable et Stan est venu lui apporter une barre chocolatée avant de rejoindre le sien. Rien ne s'est passé durant un petit instant, comme si la situation était taboo entre eux alors qu'elle était tout à fait normale. Puis, sans prévenir, le garçon aux cheveux courts s'est posé sur ses coudes et a déposé son regard azur dans celui de son ami. Il a essayé d'attirer son attention mais à aucun moment, Karl n'a décidé de le regarder à son tour. Stan ne s'est pas découragé pour autant.

- Karl, je sais que les temps sont dures pour toi à cause de ce qu'il se passe avec ta mère et ce que ce connard de Tim te fait endurer, a-t-il dit.

Le concerné a émis un léger soupir, peut-être pour montrer le fait qu'il n'était pas prêt à entendre tout cela mais qu'il allait faire tous les efforts qu'il aurait à faire. Néanmoins, à aucun moment, il n'a ouvert la bouche.

- Mais je veux que tu saches que ta mère t'aime, que je t'aime et probablement que Tim aussi, malgré toutes les mauvaises choses que je pense à son sujet.

Karl s'est intéressé à ce qu'il se disait à partir de cette phrase, sans expliquer la raison pour laquelle c'était le cas. Stan aurait aimé le savoir mais n'a posé aucune question sachant que cela risquerait de renfermer son ami sur lui-même et ça, il ne le voulait en aucun cas.

- Pourquoi me dis-tu ça ?, a demandé Karl, d'un calme inimitable.

Stan a haussé les épaules. Il avait la réponse à cette question mais ne savait pas comment l'exprimer sans paraître trop brusque, sans effrayer le blondinet.

- Tu ne comprendras pas.

Le plus âgé des deux garçons n'avait pas le courage d'aller plus loin car il était conscient que cette discussion allait avoir la même finalité que s'il parlait à un mur et cette idée ne l'enchantait pas des masses.
Toutefois, le garçon aux penchants homosexuels a laissé un petit sourire, voire minuscule mais qui était sincère. Cela a encouragé Stan à continuer son discours et s'est donc lancé.

- Je suis vraiment heureux de passer du temps avec toi et je me rends compte, là, maintenant, tout de suite que je ne suis pas un bon ami. Que je ne mérite pas de partager une amitié avec une personne aussi adorable que toi.

- Bien sûr que si, a repris le jeune garçon. Je veux dire : je suis adorable mais tu es merveilleux.

Le rouge est monté aux joues de Stan. Cela est quelque chose de rare, voire un sentiment complètement nouveau pour lui mais Dieu sait à quel point il n'a pas l'habitude de faire face à ce genre de honnêteté envers qui que ce soit. Karl est bien la seule personne dont il est si attaché, sans compter ses soeurs et son père bien sûr. Cependant, jamais auparavant, sans compter les fois où il était affreusement ivre, il n'avait osé dire le fond de ses pensées. Alors maintenant que cela arrivait, il ne savait pas comment faire.

- Je ne parviens pas à exprimer mes pensées, Karl, a honnêtement révélé le fêtard.

Son ami a souri à nouveau et d'un geste de la main l'a invité à continuer, à dire ce qu'il avait sur le coeur.

- Je suis vraiment heureux de passer tout ce temps en ta compagnie, même si j'ai parfois été vraiment merdique avec toi, a continué Stan après avoir pris son courage à deux mains. Je suis heureux d'être ici, avec toi et que l'on fasse autant d'activités.

- Moi aussi, Stan, je suis heureux de tout cela mais..., a-t-il hésité. Mais tu as raison : je ne suis pas sûr de comprendre.

Stan a respiré un grand coup, a fermé les yeux durant deux microsecondes avant de prononcer hâtivement :

- Je ne suis pas d'accord avec ton idée de suicide.

C'était franc, direct et quelque chose de mûrement réfléchi. Il savait à quel point cette idée de suicide était importante pour Karl, aussi étrange paraissait-elle. Au début, il acceptait cela et se disait que si c'était le désir de son ami, c'est que ça devait certainement être une bonne idée. Pourtant, avec le temps, ce qui était arrivé à Tess, et cette semaine à la mer, il a bien dû avouer que cette pensée était stupide.

- J'ai toujours cru en tes choix, Karl et tu ne peux le nier. Je t'ai suivi quand tu as voulu voler les vêtements de François pendant qu'il se douchait après sport, mettre de l'alcool à 70 degrés dans le verre de Théodore à la soirée de Dorian, j'ai même accepté le fait que tu baises comme une bête et trois fois par jour avec cette enflure de Timothy, a-t-il énuméré toutes ces choses. Mais je ne peux pas pour ça, pas pour ton suicide.

Le grand blond a incliné la tête de manière répétitive comme pour signifier qu'il comprenait mais ce n'était pas le cas. A l'intérieur de lui, il était fou de rage et cette nouvelle mettait tout en bordel au fond de lui.

- Pourquoi cette réticence, tout d'un coup ?, a-t-il questionné, le menton haut et le regard perçant.

Deuxième haussement d'épaules de la soirée. Stan avait des réponses à tout cela mais n'avait aucune idée de la façon à utiliser pour être le plus doux possible.

- Tu ne veux pas te suicider, Karl, a fini par révéler le garçon de dix-neuf ans. Tu n'en as aucune envie, même si tu fais de ton mieux pour le laisser paraître.

- Bien, a froidement déclaré Karl, puis-je savoir ce qui te fait dire ça ?

- Tu ne comprends juste pas la vie.

- Excuse-moi, Stanley, a-t-il été sarcastique. Je ne suis peut-être pas aussi bon que toi pour lire entre les lignes, pour comprendre tout ce qu'il y autour de moi. Et j'en suis désolé.

Cette fois, Stan a levé les yeux au ciel, un peu exaspéré par la situation. La façon dont se comportait son meilleur ami était inhabituelle et absolument insupportable.

- Je sais que parfois, les choses te blessent, que tu aimerais que ça aille différemment. Et j'espère pour toi que ça deviendra le cas un jour, honnêtement. Pourtant, je pense que tu réagis beaucoup plus que ce que tu ne devrais.

Karl est sorti de son lit et a pris place en face de la fenêtre de la chambre. Il a regardé droit devant lui mais ce n'est pas pour autant qu'il a cessé d'écouter ce que son meilleur ami avait à dire. Dans le fond, il avait besoin d'entendre tour cela, quitte à être blessé. De toute façon, il avait l'habitude, d'être blessé, aussi malheureux cela était-ce.

- Je pense de tout mon coeur, Karl, que tu n'as aucune envie de te donner la mort, a-t-il conclu. D'après moi, tu essaies juste de t'en convaincre.

Après cela, Karl a éclaté en sanglots. Son ami s'est levé et s'est empressé d'aller le serrer contre lui. Néanmoins, il ne pouvait cacher le fait que ces larmes le rassuraient énormément. Dans le fond, elles signifiaient beaucoup et laissaient entendre sept mots : "Tu as raison, je ne veux pas".

Et on souriaitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant