Bam ! Je me tape, une énième fois sur le sol dur de la ruelle.
– Ça va ?
– Tu ne vas quand même pas me le demander chaque fois ? je reproche à Noija légèrement agacée.
Je suis forcée de sourire car c'était attentionné.
– Tu as encore eu peur pour rentrer dans le Porte-Mondain. On devrait essayer de faire quelque chose non ? On pourrait...
– Non ! je le coupe un peu brusquement. S'il te plaît, je rajoute d'une voix plus douce. C'est juste que je ne supporte pas les miroirs depuis que je suis toute petite.
– Bon, on y va ? nous coupe Tara avec tact.
Nous nous asseyons quelques minutes plus tard sur un banc avec vue sur la mer. Noija fait un de ses gestes étranges, et une bulle nous entoure.
– Waou ! Laisse-moi deviner, tu as peur de l'eau alors tu vas nager dans une bulle ? je le taquine pour détendre l'atmosphère.
– Personne ne doit entendre notre conversation, c'est confidentiel pour Adécrallia, me répond-il avec sérieux. Non, aujourd'hui sera ta première vraie mission.
– Et en quoi consistera-t-elle ? je demande enfin intéressée.
– Je dois d'abord te raconter une histoire. Te rappelles-tu de Zal'rac ? (Je hoche la tête. Comment oublier quelqu'un qui a voulu m'enlever ?)
Zal'rac était le cousin éloigné d'un ancien roi. Mage de grand talent, il a un jour revendiqué le trône de notre bien-aimé roi et a tenté un coup d'état avec ses fidèles. Sa tentative ayant été stoppée, on l'a enfermé en prison, en attendant qu'il soit jugé et condamné. Or, le jour du jugement on retrouva sa cellule vide. Il s'était échappé ! On fouilla de fond en comble Adécrallia, et même Ulonos et Radra, les deux autres mondes composant les Trois Mondes, l'univers dans lequel nous nous trouvons. Les Adécralliens durent faire appel aux plus grands Mages de tout le royaume pour trouver Zal'rac. Après deux ans de recherches minutieuses, on le trouva enfin. Il s'était caché avec l'aide de la magie. Nul ne sait comment il l'a fait, car maintenir un sort demande beaucoup de concentration et d'énergie. Zal'rac ne passa pas devant les tribunaux ; il semblait évident qu'avec tout ce qu'il avait fait il devait être condamné. Privé de ses pouvoirs et très affaibli, on l'enferma dans un lieu maudit, coupé du monde. Il y réside encore en ce moment.
– Je ne vois toujours pas en quoi ça me concerne...
– J'y viens, j'y viens. «Patience est reine de vertu». Je disais donc, qu'il était condamné à vivre toute son existence dans cet endroit reculé, protégé par une magie très puissante, et dont nul ne peut s'approcher.
Or, Zal'rac, comme toute personne prisonnière, essaie de s'échapper. Pour cela, il a recours à son propre pouvoir. Il ne peut supprimer l'enchantement qui le rend prisonnier, même en Mage très puissant, car il faut être plusieurs pour cela. Zal'rac essaie donc d'attirer des personnes pour l'aider.Les Adécralliens ne peuvent le libérer à cause d'un Sceau. Il utilise en somme des Terriens qu'il envoûte. Eh oui, ton peuple est lui aussi victime de la noirceur de Zal'rac. Notre travail est de désenvouter les victimes de Zal'rac avant qu'elles ne le rejoignent, mais premièrement il faut les reconnaître. Et pour cela...
– Laisse-moi deviner, on leur demande : "Dites monsieur le grand Zal'rac, comment est votre prison ?", et s'il répond par un rugissement, c'est qu'on en a trouvé un ?
– Julie...
– Mais merde à la fin, moi je n'ai rien demandé, pourquoi est-ce que je devrais vous aider ?!!
Je me lève comme une furie mais la bulle de Noija m'empêche de me lever.
– Et enlève ce truc.
Noija obéit docilement et je m'en vais en courant. J'entends au loin Tara qui crie sur Noija, mais j'en m'en fout, tout ce que je veux c'est rentrer chez moi. Ça suffit, j'en ai déjà assez vu entre la téléportation par miroir, la magie de Noija, les histoires bizarre de Faust... Je me demande d'ailleurs comment j'ai fait pour ne pas péter les plombs avant. Peut-être qu'avec leur humour à deux balles ils m'ont "ensorcelée" pour que je ne puisse réfléchir et remarquer que je suis la cible d'un coup monté. Je continue à courir pendant que ces pensées se bousculent dans ma tête. Je prends une petite ruelle qui monte à gauche, sans cesser de courir. Je vais trouver un refuge, pour passer la nuit et réfléchir au moyen de fuir ces tarés qui cherchent à m'inclure dans leurs projets.Je cours une demi-heure, et je m'arrête à bout de souffle au fond d'une petite ruelle. Là, entre deux poubelles, se trouve une échelle en métal rouillé qui monte sur les toits. Arrivée en haut, je vois un garçon assis sur une caisse en plastique, protégé de la pluie par une taule. Il me voit, et recule.
– Quem es-tu ? Que queres ? Si tu queres dinhero, eu não tehno. Vai em bora ! me dit-il avec une certaine peur.
(Qui es-tu ? Que veux-tu ? Si tu veux de l'argent, je n'en ai pas. Va-t-en !)
– Eu so quêêroooo dormir em u, non, um lugar paraaa essa noite. Eu nããão te quero mal.
(Je veux seulement dormir quelque part cette nuit. Je ne te veux pas de mal.) (avec un accent français très prononcé)
– Você não è d'aqui, em ? sa voix s'est radoucie.
(Tu n'es pas d'ici, pas vrai ?)
– Euuuo soo eh, uma turista, euuuo venho do Québec.
(Je suis une touriste, je viens du Québec)
– Então você falla inglês ?
(Alors tu parles anglais ?)
– Nããão, francês.
(Non, français)
– Oh ! Moi parléé un petii peu français, moi avoir appris avec touristii. Comment tûû t'appelle ?
– Julie. Et toi ?
– Fernando.
–Enchantée de faire ta connaissance !
– Enchaanntée ? Que qui quer diser ?
– Eh... Euuuuo sooo feliz de te encontraaar.
(Je suis heureuse de te rencontrer.)
Après un instant de silence, il me dit :
– Não fica assim em pé, paresse com um macaco petrificado ! Bom, agora as presentaçãos feitas, te desejo uma boa noite.
(Ne reste pas ainsi debout, on dirait un singe pétrifié ! Bon, maintenant les présentations faites, je te souhaite une bonne nuit.)
Et il se couche sur le côté et ferme les yeux.
– Bonne nuit alors, je lui répond.
Et je m'endors en écoutant le bruit de l'eau qui ruisselle sur le toit en taules, à côté de ma nouvelle connaissance, Fernando.
VOUS LISEZ
Adécrallia
ParanormalJulie trouve un jour dans ses pop-corn une étrange boule. Ses recherches n'aboutissant à rien, elle l'abandonne sur son étagère pleine de poussière. Elle s'y désintéresse jusqu'au jour où la boule l'aspire dans le néant et l'introduit dans un mon...