Chapitre 4, où tout va de mal en pire

114 10 5
                                    


J'ai dut profiter de mon évanouissement pour finir ma nuit, car quand je me suis réveillée, le soleil s'était levé. Les nuages avaient disparu au cours de la nuit, et la seule trace de la tempête était l'herbe trempée et un arbre foudroyé à quelques mètres de moi. Attend. Un arbre foudroyé. C'était peut-être celui qui avait arrêté Ombre dans ses roulades quelques heures plus tôt, alors qu'il s'était écrasé à terre ! Mieux, c'était sûrement celui-là ! Je me suis assise aussitôt, paniquée. Moi, j'allais bien, mais Ombre et Millard n'avait peut-être pas cette chance ! 

La première chose que je vis, ce fut la Sombrune, allongée sur le sol tout contre l'arbre. Son aile gauche formait un angle bizarre, signe qu'elle était brisée. Mis à part quelques contusions, Ombre ne devait pas avoir grand chose, heureusement. Roulé en boule, il dormait encore, mais avait instinctivement prit sa forme de la taille d'une chauve-souris pendant son sommeil, ce qui expliquait pourquoi je ne l'avais pas vu avant. Millard, quand à lui, était déjà réveillé et était assit un peu plus loin, contre un autre arbre. J'ai remarqué qu'on était dans une grande plaine recouverte de brume, avec quelques arbres, un peu disséminés partout. A quelques mètres de nous, juste derrière l'arbre qui avait arrêté Ombre, s'ouvrait la bouche d'un ravin. J'ai frémis ; un peu plus et on finissait tout au fond ! 

J'ai sursauté quand Millard m'a soudain interpellée :

-Salut ! Tu es réveillée ?

-Non, ai-je grommelé, je parle en dormant.

Il a rit, pas le moins du monde vexé par ma mauvaise humeur.

-Excuse-moi, ai-je marmonné. Je suis mal réveillée, c'est tout.

-Pas grave, fit-il sur un ton léger en haussant les épaules. 

Je me suis frotté les yeux, je voyais flou. 

-Je dors depuis combien de temps ? ai-je demandé.

Millard a jeté un coup d'oeil au soleil, déjà pas mal haut dans le ciel. 

-Il est près de dix heures du matin, m'informa t-il. Etant donné que nous sommes entrés dans la tempête vers deux heures du matin, et que nous nous sommes écrasés environ une heure plus tard, tu as dormis près de sept heures.

-Sept heures ? ai-je répété, incrédule. Tu aurais dut me réveiller ! Nous avons prit pas mal de temps de retard, maintenant !

Il haussa à nouveau les épaules.

-Ca n'aurait pas changé grand chose, affirma t-il d'un ton très calme. Comme tu peux le constater, Ombre s'est cassé une aile, il ne peut donc pas volé. De toute manière, nous sommes coincés ici.

Cette évidence m'a heurté de plein fouet malgré son air détaché. Si Ombre ne pouvait plus voler, nous allions devoir faire le reste du chemin menant jusqu'à Londres à pied ! Et moi, je ne savais pas du tout dans quelle direction aller, et ça m'aurait étonné que Millard ait emporté une carte avec lui... J'ai décidé de ne pas laisser voir la panique que je ressentais pourtant en moi, et je me suis levée pour aller secouer la Sombrune, qui dormais encore. La petite créature ressemblait encore plus à une chauve-souris, de loin et quand elle ne bougeait pas. Dès qu'elle fut réveillée, elle entreprit de grimper en titubant le long de mes jambes puis de mon dos jusqu'à mon épaule. Ombre bailla à s'en décrocher la machoire, avant d'observer distraitement la région autour de lui. Soudain, il rabattit ses cornes mobiles en arrière d'un air inquiet.

-Mais... ou est Théo ? s'étonna t-il, surpris. Il aurait dut nous avoir rattrapé depuis le temps !

Il a parut penser qu'il lui était arrivé malheur, car il s'agitait.

L'Arpent du Diable, tome 2 de Le monde des particuliersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant