Lune~10

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Je ne comprends plus rien. Vraiment je ne la comprends plus en ce moment. Qu'est-ce qu'elle a dit déjà? Ah oui ! Que j'allais me présenter au réfectoire et leur dire: Bonjour, je m'appelle Solfian, suivez-moi s'il vous plaît.

Quand est-ce qu'on a décidé ça ? On a jamais parlé de ça ? En vérité, je crois que cela fait longtemps qu'on n'a pas parlé. À chaque fois elle s'énerve contre moi. Elle ne me dit rien et moi, je dois me débrouiller tout seul pour comprendre. Pas pour la comprendre, non, ça c'est impossible mais pour déduire ce que je dois faire.

Maintenant, je dois aller au réfectoire et vite. Seulement, comme je n'étais pas prévenu, je suis à l'autre bout en train de placer mes bombes tranquillement.

Je soupire. Et merde! Elle commence vraiment à me taper sur le système avec son comportement bipolaire!

Je pose les bombes au sol et cours dans la direction opposée.

J'ai pourtant essayé d'être compréhensif, de l'aider mais non, mademoiselle fait tout en solo. Elle n'a besoin de personne.

Après quelques minutes de course, j'arrive enfin au réfectoire.

Les enfants sont tous là, assis bien tranquillement à leur place, les yeux dans le vague, le visage impassible, le dos droit.

J'avance et je crie:

-Bonjour tout le monde.

Aucunes réactions.

-Je m'appelle Solfian. Suivez-moi s'il vous plaît.

Pendant un instant, je me trouve idiot. Je sais que cela ne va pas marcher. Pourtant, à ma grande surprise, ils se lèvent et se place derrière moi comme un troupeau de moutons égarés. Géniale! Je souris. Bon ça ne se passe pas si mal finalement.

Je me tourne vers la sortie. Aussitôt ma joie s'évanouit. Devant moi, une barrière de policiers. Ils se dressent droit et fiers avec leurs blouses blanches. Je vois presque un sourire cynique sur leurs lèvres. Ils me bloquent la sortie.

Voilà. Quelle idée aussi l'annonce dans toute l'école ! Elle n'aurait pas pu faire plus discret. D'ailleurs, je la vois débouler derrière les policiers.

Ses cheveux noirs sont tout emmêlés et ses joues sont rougies par l'effort. Elle halète légèrement.

De toute manière, je vois mal comment elle pourrait m'aider. Je regarde désespéré cette mer de blanc en essayant d'y trouver une faille. Je sais bien que c'est inutile. Même si moi j'arrivais à passer, les enfants eux, ne passeraient pas. Ils n'ont pas l'air du genre à se battre, pas même contre un escargot. Je soupire. Et voilà, on a perdu. Tous ces préparatifs pour rien. Merci qui ? Isabelle.

Mais soudain, jaillissant de nulle part, tous les professeurs déboulent et se jettent sur les policiers. Ils se battent avec ce qu'ils ont trouvés. Des balais, des pelles...

Si je m'attendais à ça! Je suis plutôt surpris. J'entends ensuite Isabelle me crier:

-Solfian! Emmène les enfants dans la fusée et démarre. J'arrive.

Qu'est-ce qu'elle va encore trafiquer? Je ne peux pas décoller sans elle et les portes s'ouvrent à 18h pile. Ce n'est pas trop le moment de jouer les héroïnes.

Tant pis, après tout c'est son problème. Je décollerais sans elle s'il le faut.

Je m'élance vers la sortie. J'entends que derrière moi, les autres me suivent.

Je cours dans les couloirs vides et silencieux. Les bruits du combat diminuent puis disparaissent.

Plus nous nous approchons du hangar, plus la lumière se fait rare et enfin, nous y sommes. J'ouvre la porte, allume ma torche et continue en marchant. Je me retourne. C'est bon. Le troupeau est toujours là. J'espère que personne ne s'est perdu.

J'ouvre la porte de la fusée et je dis:

-Monter et avancer jusqu'à la prochaine porte.
Je sais qu'ils ne comprennent que les choses simples et concises. Je prie juste pour que la porte soit assez loin pour qu'il puisse tous rentrer.

Je vois défiler des centaines de visages devant mes yeux. Tous impassibles et vagues. Ils montent les uns après les autres avec le même rythme. On dirait une sorte de danse.

Malheureusement, la fête se trouble. Je vois des taches blanches se rapprocher. Et merde! Ils nous ont trouvés!

-Plus vite, je crie en poussant les derniers dans la fusée.

Dès que le dernier est entré, je me jette sur les policiers et les frappe avec ma lampe torche mais ils sont deux et plus fort que moi.

Alors j'attrape une seringue à la ceinture du premier. Il y a un liquide vert à l'intérieur. Je ne me pose pas de question, je la lui plante dans le cou. Il s'écroule par terre en gémissant.

Je n'ai pas le temps de souffler que le second m'attrape le cou et m'étrangle. Il a enlevé sa ceinture. Dans un dernier effort, je lui donne un violent coup de tête dans le visage. Il me lâche et pousse un juron. Je lui saute dessus et en une minute je le maîtrise. Mon entraînement fait ses preuves comme toujours.

Je les assomme tous les deux bien proprement et je monte dans la fusée. Je laisse la porte ouverte pour Isabelle en espérant qu'elle vienne et je commence à mettre les moteurs en marche.

L'heure du départ approche et je m'active autours des commandes. Le problème, c'est qu'Isabelle ne vient pas.
Qu'est-ce qu'elle fiche à la fin?

Puis elle est là. Comme ça. Elle crie:

-Solfian, je suis dedans.

C'est comme si elle s'étaittout à coup matérialisée dans la fusée. Je ne pose pas de question. Jeverrouille la porte.
Je la vois du coin de l'œil. Elle essaie d'attacher comme elle peut tous lesenfants puis elle se laisse tomber sur le siège à côté de moi. Elle s'attachepuis elle ne bouge plus. Ses yeux sont rouges, ses joues sont rouges et elleest toute décoiffée mais son regard est aussi vide et las que celui des enfantsderrière moi. C'est fini pour elle. Elle semble vraiment fatiguée de cettelongue lutte qu'elle a menée contre elle-même et contre cette école. Cependant,elle ne paraît ni joyeuse, ni mélancolique juste vide.
Pour moi, ce n'est pas fini. Je continue de m'activer autours des commandes.Les moteurs chauffent, les portes se verrouillent. Je regarde l'heure: 17h55.Je commence le décollage. Nous sommes poussés doucement vers les portescloses... closes.... closes...
Oh non! J'ai commencé trop tôt le décollage. Si près du but, je ne peux pastout faire échouer. Heureusement les portes s'ouvrent. Un morceau de ciel noirscintillant d'étoiles apparaît. Il grandit à chaque minute comme une délivranceet puis... nous sommes dans l'espace. L'école n'est plus que flamme et fuméederrière nous.
Mais le combat n'est pas fini. L'histoire ne fait que commencer. Devant nous sedresse un obstacle bien plus gros: la Terre. Immense et imposante, cetteplanète bleue se dresse devant nous. Un plus grand combat nous attend. Nousdevons sauver le monde.

...Mais tes yeux ont disparu...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant