~Chapitre 9

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Deux jours passés sous ma couette, coupée du monde extérieur, perturbateur ; à chercher dans le noir quelque chose. Chose encore introuvable. Surement une sorte de pièce manquante d'un puzzle qu'on va appeler "Vie". Seule.

Iphone dans la cuisine, chambre fermée à double tour, je me retrouve enfin face à face avec moi même.

Depuis deux fucking jours. Et je ne sais même pas ce que je cherche. Tout ce que je sais, c'est que je suis encore bien éloignée de mon but.
Ça tambourine à ma porte.
-Théo t'es là ?
Pas de réponse.
-Théo réponds bordel ! C'est Amber !
Pas de réponse - mais Amber en a assez, et je la devine s'accroupir à la porte.
J'entends le son de la mine graphite contre le papier.
Quand une lettre venant de la porte s'envole et fais un petit looping dans ma chambre. Je déplie le papier.
"Pourquoi ?"
Alors.
Je me lève, et le parquet n'hésite pas à grincer sous le mouvement ; mais je file prendre un bic dans ma trousse.
Ma réponse et courte, mais on ne pourra pas lui reprocher de ne pas aller droit au but.
"Parce que j'en ai marre".
Je m'en veux surtout. Je m'en veux de pleurer. J'en veux à Amber de me consoler. C'est moi qui devrai être à ses côtés, pas elle aux miens. J'en veux à mon chat de m'avoir quitté. À ma mère d'être la pire des mères. À Lou d'avoir causé tout ce bordel.
Sa réponse.
"On peut se faire un câlin ? (o^^o)"
J'ouvre la porte, j'y vais à pas de rongeurs. Même si le planchet n'est toujours pas du même avis.
Amber est rouge. Rouge de rage. Frustration. Je n'ose pas ouvrir les bras pour l'y accueillir.
Elle me regarde fixement et me dit :
"..."

Je ne pourrais peut être jamais vous le révéler. Cette phrase m'a changée. Laissez moi du temps. A day, You will know.

Amber claque la porte.
Me laisse sur le cul.
Révélation des plus incroyables, littéralement.

Un troisième jour dans mon lit ne me fera pas de mal. Alors je prends ma couette, je me mets en mode sushis dedans, entourée de mes doudous les plus fidèles, et d'une bonne série coréenne, en essayant d'avaler, ou d'ignorer, l'info.

Lundi 16 janvier 2017

Salut journal, ça faisait un bail.
Mais il se trouve que Lou est morte.
Bien sûr, tu ne connais pas Lou, moi aussi d'ailleurs. Mais Lou prends beaucoup de place dans ma vie en ce moment. Dans celle d'Amber aussi, énormément plus que moi.
Mais Amber elle, je la connaît.
Alors ça fais mal au cœur.
Et puis Amber m'a dit quelque chose, qui Lou était vraiment.
Et il me faut partir. Je dois retrouver le passé de Lou, puisque son futur est scellé. Celui qui est resté caché.

Je sursaute lorsqu'une voix retentit dans mon dos, après avoir étouffé un énorme bâillement.
-Salut.
-Qui est là ...? Je me redresse avec un juron, ce qui représente déjà une tâche difficile et épuisante.
-Ta mère. Retourne en cours.
-Je n'ai pas encore recouvré l'ensemble de mes forces, aie pitié de moi pour une fois.
-Ce n'étais pas une question.
Je rouspète.
-Tu manques drôlement de finesse ...
Mais elle se fiche de mon opinion, et rebrousse chemin dans la jungle qu'est ma chambre.
Moi je ne peut la quitter des yeux. Cette cachotière.

Je regarde la grille du lycée. Elle est bien plus imposante qu'il y a quelques jours ( il me semble que cela fait déjà un mois ). Les ados sont partout, apportant avec eux le brouhaha partout où ils passent. Le bâtiment est déprimant. Moche. Gris.
Je vois ensembles : Peter, Amber, Iphigénie.
J'ai toujours du mal à me mettre en tête que ma meilleur amie et mon crush se connaissent. J'avance, en prenant soin d'avoir l'air sûr de moi, de cacher mes faiblesses.
Iphigénie me remarque en première et me fait de grands signes avec ses bras.
-Saluuuuuuut Théo !
Elle a retrouvé son Peter, et donc sa joie de vivre par le même coup. Les eux autres se tournent vers moi. Peter m'adresse un vif sourire, et Amber semble s'excuser du regard. "Ce n'est pas de ta faute" pensais-je.
J'arrive aux pas de course vers eux et leur tape la bise, malgré une retissante* lorsque je m'approche de Peter.
Ils me posent évidemment des questions sur mes absences des derniers jours, mais je suis une pro pour changer de sujet.
-Au fait, s'inquiète Peter, ça va mieux Amber ?
Il a sûrement eu vent de sa crise dans la friperie.
-C'est passé, mais merci de t'inquiéter ! Lui réponds elle.
-C'est tout naturel.
Peter coince la mèche de cheveux, brune et qui rebique, derrière son oreille ; et je ne peux m'empêcher de fondre intérieurement.
Peter continue avec elle.
-Au fait, ( il dit beaucoup "Au fait" ), tu pourrais venir avec moi samedi pour faire des boutiques ?
Iphie et moi on s'échange quand même un regard de génance devant cette marque d'affection.
Il lance aussi à Amber un clin d'œil pour accompagner sa demande.
Pincez moi je rêve.
Iphi est devenue toute rouge.
Moi de colère.
Amber sait que je l'aime, comment peut elle se permettre de flirter avec lui devant moi ?!
Je laisse échapper, ( Oups, qu'est ce que je suis maladroite ...! ) :
-On ne vous gêne pas les tourtereaux ?
Ma meilleur pote m'assassine du regard et Peter m'achève avec un "t'es jalouse ?".
Jamais je n'aurais imaginé que de tels liens auraient pû se tisser pendant l'enterrement de Lou. Je n'aurai jamais imaginé que des êtres humains puissent se montrer autant inhumains. Je piaffe. Un rire de nervosité.

Amber. Ma parfaite Amber qui flirt avec le petit copain de sa meilleur amie qui est morte !? La bonne blague.
Bizarrement, ce n'est pas la jalousie habituelle qui s'empare de moi. C'est tout autre chose. Un sentiment d'injustice.

Je prends la sage décision de me casser. À grandes enjambées, je file droit vers les casiers. Iphigénie bafouille un ou deux mots d'excuse envers les tourtereaux, et est presque obligée de courir pour me suivre. J'entends quand même Amber qui s'inquiète d'avoir fait une bêtise, ça me rassure. Mais Peter rajoute quelque chose que je ne parvint pas à écouter, et au ton de sa voix, je sent qu'il savoure cette expression.

Est ce que je l'aime ?
Le battement de mon cœur s'accélère en guise de réponse.

Apprentie à la vie { en pause }Où les histoires vivent. Découvrez maintenant