En arrivant au lycée le lundi matin, je vois Milo. Il est adossé au mur de pierres, me regardant en souriant. Ses mains sont dans ses poches, il se redresse lorsque j'arrive.
- Hey, dit-il d'une voix légèrement endormie.
Je lui réponds la même chose, il vérifie que personne ne regarde et m'embrasse rapidement. Il se recule presque aussitôt, de peur d'être vu. Je souris doucement.
- Quel début de journée appréciable, dis-je en riant un peu.
- Je sais, je sais...
Nous sourions à nous en faire des crampes aux joues.
- Mettons les choses au clair, dit-il sérieusement. On n'arrête pas là, pas vrai ? J'ai trop aimé pour que ça s'arrête là. T'embrasse trop bien. Genre, vraiment.
Je ris, plutôt flatté par ces propos. Pour un premier baiser, j'ai l'air de ne pas trop m'être foiré.
- Je veux bien essayer quelque chose, dis-je, confiant.
Il sourit grandement, comme un enfant. Adorable. Je suis plutôt sûr de moi, je crois savoir ce que je veux. Je l'aime vraiment.
- Bon... parfait alors. Ouais, c'est parfait.
Il rit nerveusement. Pourtant ce n'est que moi, Ulysse, 16 ans, prénom chelou et aucune passion dans la vie. Je me sens important à ces yeux. C'est étrange toute cette attention. C'est pas une attention par défaut, c'est lui qui l'a décidé. Et c'est plutôt déconcertant.
Les cours passent uns à uns, plutôt rapidement. Je gribouille dans mes cahiers, des formes vagues qui ne représentent rien de particulier. Peut-être une représentation abstraite de ce qu'il se passe dans mon esprit : un gros bordel impossible à déchiffrer.
À midi, notre nouveau trio s'installe à la table près du distributeur de sodas. Carmen ne soupçonne absolument rien. Je trouve cela plutôt inutile de tout lui balancer à la figure maintenant, alors que ça ne marchera peut-être pas. Attendons un peu, s'est-on dit avec Milo. Ça vaut mieux. Et qui sait, l'acceptera-t-elle ?
***
Le mois de mai démarre avec une belle collection d'averses, pour mon plus grand plaisir. Avec Milo, nous nous sommes donné rendez-vous chez Cup's. Nous avons l'air d'idiots, sous les parasols de la terrasse extérieure, la pluie faisant des plocs sur la toile.
Les deux seuls fous dehors, c'est nous. L'utilité de faire ça ? Aucune idée. C'est plutôt amusant, l'odeur de la pluie se mêle à l'odeur fumante de chocolat chaud.
K-Way, capuches, parapluies, tous les moyens sont bons pour se protéger. Nous nous prenons pour des espions à observer les différentes techniques des passants. Un cas un peu particulier se ballade avec sa sacoche au-dessus de la tête.Je ris légèrement en voyant la moustache de mousse au dessus des lèvres de Milo. Il la fait disparaître d'un coup de langue, ce qui me fait encore plus rire.
- Attends, c'était pas sexy ? demande-t-il, l'air déçu.
- Non, pas spécialement !
- Je dois faire quoi pour être sexy alors ?
Je souris doucement et répond d'un air malicieux :
- Rien. Tu es déjà très bien ainsi.
- Ah, je préfère.
Nous finissons nos boissons, je paye pour nous deux (pour une fois qu'il me laisse le faire !). En sortant de sous notre abris, je remonte ma capuche sur mes cheveux et Milo déploie son parapluie blanc. Il s'habille très souvent en blanc. Sans aucun motif, juste des t-shirt blancs. Ou des pantalons blancs, ou des chaussures. Il n'aime pas avoir l'attention sur lui, m'a-t-il dit.
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Sans regrets
Teen FictionUlysse, 16 ans, se cherche encore. Il semble en découvrir sur lui un peu plus chaque jour. Il tente des choses, quitte à faire des erreurs. C'est ce qu'on appelle la merveilleuse et inévitable période de l'adolescence.