- Tu viens dormir à la maison ? lança soudainement Harry à travers le combiné.
Je ne répondis pas tout de suite, un silence s'installant.
- D'accord !
- Euh. Je vais ranger l'appart, bafouilla-t-il.
J'hochai la tête en oubliant qu'il ne pouvait pas me voir. Il raccrocha. Un sourire niais au visage, je sautillai comme une ado quelques minutes. Merde ! Et s'il voulait qu'on couche ensemble ? Non. Il m'a dit y a trois semaines qu'il voulait attendre. Et s'il avait finalement changer d'avis ? Oh là, là. Je pris une douche et y observa attentivement mes jambes. Je m'étais épilée la semaine dernière mais on n'est jamais trop prudent. Bon, RAS. Je pris soin d'enfiler des sous-vêtements non dépareillés, choisissant un soutien-gorge qui faisait paraître mes seins plus gros. Je fourrai un bermuda en coton et un t-shirt dans mon sac, pris mes clés et sortis de mon appartement, en sifflotant. J'achetai deux pizza méga sur la route et sonnai à l'interphone.
- C'est moooooi, chantonnai-je.
Il ne répondit pas et m'accorda l'accès à l'immeuble. Je grimpai les marches quatre à quatre et me rendis compte que j'avais oublié ma brosse à dents. Zut. Je fermai la porte derrière moi. Mes yeux se posèrent sur Harry. Les sourcils sérieusement froncés, il était assis sur le sofa.
- Ça ne va pas ?
- Si, si, répondit-il avec humeur.
Je me pinçai les lèvres et déposai les pizza sur la table basse.
- J'ai pris des pizza, dis-je inutilement.
Le silence commençait à me rendre anxieuse. Je posai les deux boîte en carton et m'essayai sur le sofa près de Harry avant de lui jeter un regard.
- T'es sûr que ça va ?
- Je suis fatigué, c'est tout.
Il se leva brusquement et alla dans sa chambre. Ok. Cool. Sympa. J'enlevai mon sweat et allumai la télé. Je zappai de manière absente. Qu'est-ce qui lui prenait d'être aussi désagréable d'un coup ? J'avais dit un truc qui fallait pas ? Ou fait ? Je pris une part de pizza et la mangea. Tant pis pour lui.
J'étais à ma troisième part et Harry n'était toujours pas revenu. Une bouffée de colère dans le sang, je me levai d'un bond et frappait à la porte de sa chambre. Il ne répondit pas. Je posai ma main sur la poignée. Merde, et s'il était en train de se masturber ? Je poussai la porte en bois. Que dalle. Harry était allongé de tout son long, les bras croisés derrière la tête. Écouteurs enfoncés dans ses oreilles, il ne m'avait certainement pas entendue frapper. Il posa toutefois ses yeux sur moi.
- Ouais ?
Je pris une inspiration, m'apprêtant à lui dire à quel point il était malpoli et que je n'étais pas le genre de fille qu'on plante.
- La pizza va refroidir, m'entendis-je dire.
Poule mouillée, va. Harry ne dit rien et se leva. Il m'emboîta le pas jusqu'au séjour et on s'installa sur le sofa dans un silence de mort. Dis quelque chose, dis quelque chose, dis quelque chose. Rien. Rien ne perturbait le silence. Je me sentais bouillir lentement. Je balançai alors la part de pizza entamée que je tenais dans mes mains et me tournai vers lui. Harry me regardait, un sourcil levé.
- Je comprend plus rien. Tu dis que tu veux un truc sérieux et tout, et là t'es froid et distant. Dis moi s'il y a un truc qui va pas. On n'ira pas loin si tu me fais pas confiance.
- Je t'ai dit que j'étais juste fatigué, Ana, souffla-t-il les dents serrées.
- C'est toi qui m'a dit de venir, tu te souviens ?
Il garda le silence, un soupir s'échappant de ses lèvres.
- Écoutes. Si tu sais pas ce que tu veux, je comprend. Enfin non. Mais me dis pas que tu veux une histoire sérieuse, alors, ni que tu veux qu'on passe la nuit ensemble. Je suis pas une poupée.
Je ramassai mes affaires, son mutisme me pinçant le cœur. J'aurais voulu qu'il me retienne, qu'il me crie de rester. Il n'en fit rien. Alors je claquai la porte de son appartement derrière moi.