- Bonsoir, que désirez-vous ? dis-je d'une voix machinale sans regarder le client qui se tenait devant moi.
- Te parler.
Je levai la tête. Évidement. Harry était là. Plus beau que jamais. Ou alors c'était parce que je ne l'avais pas vu depuis deux semaines. Je soupirai.
- Je travaille.
- Prends une pause, proposa-t-il en haussant les épaules.
Je lâchai un rire mauvais.
- Quoi, tu veux aussi me faire perdre ce boulot là ?
Il se mordit la lèvre et lâcha un long soupir.
- Très bien.
Il tourna les talons d'un pas déterminé. Je pris la commande du client suivant, un pincement au cœur. Dans le fond j'aurais voulu qu'il insiste. Histoire de.
~
- Tu finis tard.
Je sursautai.
- Tu m'as fait peur, idiot.
- Pardon.
Malgré l'obscurité, je devinai qu'il roulait des yeux. J'enfonçai la capuche de mon manteau, protégeant mes oreilles du froid hivernal et me dirigeai vers la station de métro.
- Ana, râla Harry derrière moi. Tu vas pas prendre le métro.
Il me prit le bras doucement et je me dégageai brusquement. Il enfouit ses mains dans ses poches et je lu à son geste que je l'avais blessé.
- Viens, je te dépose.
Je lui emboîtai alors le pas et m'installai dans son épave.
- Tu me manques, balança-t-il sans prévenir.
Je ne répondis pas et serrai les dents. On était presque arrivés. Il me manquait. Littéralement. Ça faisait comme un vide. Un trou que rien ni personne ne pourrait combler. Ni même me faire oublier. La façon dont il disait mon prénom me manquait. La manière dont ses yeux s'accrochaient aux miens et ses fossettes se creusant chaque fois qu'il me souriait, aussi. Comme jamais.
- Tu m'as fait perdre mon boulot.
- Arrête. Ana. Tu sais très bien que si tu le veux vraiment je peux te le redonner. Tu le sais. C'était pas méchant ce que j'ai fait. Je sais pas. Je voulais juste te voir plus heureuse. J'en avais ma claque qu'on se voit le soir et que tu sois claquée et de mauvaise humeur à cause de ce fichu job. Enfin Ana. T'es intelligente. T'aimes pas ce boulot. Tu vaux mieux que ça. Tellement mieux.
Je plantai mon regard droit devant moi, le cœur battant la chamade. Je serrai les poings. Tout ce que je voulais, c'était me jeter à son cou et pleurer.
- Tu me manques, répéta Harry.
- Pas toi, dis-je entre mes dents.
- Tu parles, rit-il en se garant devant mon quartier.
C'était si évident, donc ? Je retirai ma ceinture de sécurité, énervée et heureuse à la fois. Contre moi-même, bien sûr. Je soufflai et ramassai mon sac qui se trouvait à mes pieds.
- Pardon, s'excusa Harry.
Il passa sa main dans ses boucles de façon frustré.
- Qu'est-ce que tu veux de plus ? dit-il d'une voix forte. Qu'est-ce qu'il faut que je fasse pour que tu me pardonnes ? Que je te rendes ta place dans la boite de Carl ? Dis moi !
- Embrasse-moi, dis-je d'une petite voix.
- Quoi ?
Il tourna la tête vers moi. Je ne sus s'il ne m'avait vraiment pas entendue ou s'il ne croyait juste pas ses oreilles. Quoiqu'il en était, mes yeux durent dire la même chose que mes lèvres prononcèrent quelques secondes plus tôt car il s'approcha doucement de moi et m'embrassa. Aussitôt que sa bouche entra en contact avec la mienne, j'accrochai mes bras autour de son cou comme si ma vie en dépendait.
