Prologue - L'Etoile Exilée

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"Jungkook.

Les étoiles n'ont leur vrai reflet qu'à travers les larmes."

Tu me l'avais dit, tu te souviens ? Que certaines choses étaient pleinement visibles seulement quand on les distinguait mal.

Soit mon guide s'il te plaît. Tu sais que sans toi j'ai du mal à suivre. Je suis faible, et je sais que si nous étions nés animal, la loi du plus fort m'aurait tué dès les premiers jours ; tu aurais même peut-être été celui qui aurait eut raison de moi.Heureusement (?) nous sommes nés humains, et les faibles ont plus de chances de survivre.

Tu sais comment la vie est, parfois. C'est peut-être plus simple pour toi, vu que tu es fort ! Tu encaisses mieux, tu te fais moins détruire. Mais pour moi, c'est difficile de continuer, je me débrouille comme je peux. Il y en a des plus faibles encore, et ceux-là je les vois tomber car ils n'arrivent pas à suivre. Je fais de mon mieux tu sais, pour suivre.

Puisque tu ne peux pas me donner de ta force, tu ne veux pas me protéger ? S'il te plaît. Tu es mon grand frère, mon hyung. C'est ton rôle non ?

Alors où es-tu à présent ?

Taehyung ?

***


Je marche dans les rues, la tête basse. Je ne veux pas que l'on me remarque, je ne veux pas que l'on fasse attention à moi. J'ai trop peur que les gens me regardent et devinent. Qu'ils voient dans mes yeux mon amour coupable, qu'ils s'en rendent compte et me traitent de monstre, et que toi, tu ne sois pas là pour me protéger de leur incompréhension.

Pourtant tu m'avais bien dit que nous ne l'étions pas n'est-ce pas ? Coupable je veux dire. Nous ne faisons pas de mal. Nous ne tuons personne, ni ne torturons, non, hein ?

J'arrive au parc. C'est très agréable d'y aller, reposant. J'aime m'asseoir sur le banc isolé, celui du fond tu sais, et lever la tête pour regarder les branches des arbres. J'ai l'impression de devenir tout petit et d'être sous un buisson géant, qui me protège. Je plaque mes genoux contre ma poitrine et attends.

Comme tous les soirs, je regarde les silhouettes des gens. Je garde les yeux mi-clos pour n'apercevoir que leurs ombres ; tu m'as dit que c'est comme ça que l'on voit vraiment. Les choses débarrassées de leurs détails superflus, de leur netteté qui les limite et les contraint dans une forme définie : ici ils ne sont plus qu'essence, aura, une simple impression.

La tienne me manque. L'impression de Taehyung-hyung me manque.

Je vois les groupes de lycéens commencer à passer dans le parc, c'est la fin de leurs cours. Ils sont impressionnants, si grands, si adultes. Je me demande si je serais comme eux après le collège. Je baisse les yeux.

Aujourd'hui je traîne, je ne veux pas rentrer chez nous, depuis que tu es parti j'ai la boule au ventre, plus qu'avant. En plus j'ai faim. D'habitude tu m'apportais le goûter. J'étais fier de voir mon grand frère marcher vers moi, les cheveux secoués, un air de héros solitaire, et ce sourire si clair que tu n'adressais qu'à moi.

J'ai faim hyung. Il fait froid dehors et je suis fatigué.

Je sors mes affaires pour faire mes devoirs. Mais c'est affreusement ridicule : encore une fois je n'y comprends rien. Je suis bête, hyung, la prof l'a encore dit aujourd'hui, et les autres ont répété, bête, bête, bête... Je regarde les corrections, je fixe les signes en creusant ma pauvre cervelle. Mes yeux se plissent, peut-être que je verrais la vérité ; mais c'est tout aussi incompréhensible.

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