Chapitre 26

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Heureusement, le parc est juste en face de chez Tchad. Je me dirige donc vers la sortie, traverse la route et aborde la montée jusqu'à la maison de mon ami.
Mes yeux sont humides et rouges, mes larmes coulent, silencieuses, le long de la joue. Je n'ai qu'une envie: me réfugier dans les bras de Tchad. J'avais déjà le plan en tête, je sonnerais chez lui, il m'ouvrirait, verrait ma tête, me demanderait ce qui ne va pas, puis il comprendrait, me prendrait dans ses bras et on écouterait du Fauve ensemble.
Tout était clair et net. Mais il n'y avait une chose que je n'avais pas prédit. Que je n'aurai pas pu imaginer.
Tomber nez-à-nez sur Nathan sortant de chez Axelle.
-Luna? Tu viens voir Axelle? me demande-t-il une fois s'être remis du choc.
-Hein? Ha non, je baffouille. Je viens voir, heu, Tchad.
-Tchad? répète-t-il. C'est qui?
-Jean-Pierre. Le voisin, je précise.
-Hein? Mais pourquoi?
-Pour rien.
Il me regarde inquiet, puis remarque mes larmes.
-Luna tu pleures?
-Non, j'assure. J'ai, heu, baillé.
Il rit doucement à cette remarque.
-C'était un gros baillement alors! se moque-t-il.
-Enorme!
-Allez, dis-moi ce que tu as. On est amis.
J'ouvre des grands yeux étonnés.
-Amis?
-Bon, okay, se reprend-t-il. Partenaires. Ça te va?
Je souris malgré moi.
-Oui.
Il me regarde alors longtemps, comme s'il attendait quelque chose.
-Tu veux m'en parler? me demande-t-il.
-Oh oui! je me reprends. C'est juste que... c'est un peu compliqué...
Il semble soudain réfléchir et fronce les sourcils. Il a une drôle de mimique. Je trouve ça mignon.
Attends, quoi? Mignon? Mais qu'est-ce que je raconte enfin? C'est pas mignon, il a l'air constipé! Mes lunettes ne doivent plus être à jour.
-Ça te dit un granite? Comme au bon vieux temps.
-Quel bon vieux temps? je rigole.
-Tu vas arrêter de te moquer, toi? me demande-t-il hilare en me donnant un petit coup dans l'épaule.
-Et toi, de me brutaliser? je réponds sur le même ton.
On se sourit pendanr un moment et j'oublie tout à coup ma haine inexpliquée envers lui.
Au bout d'un moment, il détourne la tête en souriant. J'avais oublié à quel point il avait un magnifique sourire.
-Bon, on se le prend ce granite?
-Oui, j'accepte.
On s'en va de chez Axelle et on s'éloigne de Tchad pour se rendre au centre-ville et se prendre notre fameux granite.

Je ne me suis jamais autant amusée. On rit, on danse, on chante et on parle même aux inconnus qu'on croise avec notre glace magique à la main.
-Je suis super fatigué, m'informe-t-il soudain. Ça te dit on se pose sur le banc?
-Bien sûr!
On continue à rire pour tout et n'importe quoi et peu à peu on se confie des anecdotes de notre enfance.
-Quoi? je m'écris entre deux fous rire. Tu as habillé ton chat??
-J'avais 8 ans! se défend-t-il.
-Il s'appelait comment?
-Tchoupi.
-Oh mon Dieu! j'explose. Tchoupi! Hahaha!!
-C'est bizarre, finit-il par dire.
-Hmm? Quoi?
Il ferme les yeux, semblant hésiter.
-Quoi? j'insiste.
-Je sais pas. Tout est si facile avec toi.
Je le regarde pendant un moment sans comprendre. Puis je finis par prendre sa température et lâcher.
-Mouais, la glace est bien montée au cerveaux.
-Hé je suis sérieux!
-Moi aussi, je réponds un peu dans les vapes.
-Oh mon Dieu, Luna! Tu es bourrée ou quoi?
Je ris encore plus fort et commence à faire des grands gestes.
-Je vois pas de quoi tu parles!
Je me lève alors du banc et commence à me balancer sur une musique inexistante.
-Tu vois? Je suis parfaitement sobre.
Il se lève et prend mon gobelet vide qu'il inspecte et renifle.
-Hmm... Non. Pas la moindre trace d'alcool. Mais comment tu es arrivée à te saouler, Lu?
-JE SUIS BOURRÉE À LA VIE! je crie.
Il rit et saisit mes poignées.
-Hé, calme-toi! me conseille-t-il avec douceur. On est en public.
Je regarde partout autour de moi.
-Ah oui, je remarque. BONJOUR LES GENS! VOUS ALLEZ BIEN?
Les passants nous fusillent du regard. C'esr bizarre.
-Hé, Nathan! Tu sais quoi? Je t'aime bien.
Il rit.
-Moi aussi, Luna.
-Mais genre je t'aime vraiment bien.
-Okay, je sais pas comment t'as fait mais t'es clairement saoul.
-Peut-être, j'admets.
-Allez, on rentre.
-Nan, je veux pas rentrer! je proteste.
-Je rêve ou tu me fais un caprice? demande mon "partenaire".
-Oui! Je veux rester! Je m'amuse tellement! Et puis avec toi, j'oublie totalement mon copain!
-T'as un copain? s'étonne-t-il.
-Je sais pas, en fait. Vu qu'on s'est disputé je sais pas si on est encore ensemble.
-Moi je ne me dispute jamais avec Axelle! se vante-t-il.
-Normal! Elle te tuerait.
-Peut-être. Bon allez, on y va.
-Non! Ne me laisse pas!
-Luna...
-Ne me quitte pas, je commence à chanter, ne me quitte pas!
-Lu...
-Tu ne vas quand même pas laisser une pauvre fille qui s'est peut-être fait plaquer et sans défense dans une ville de criminels.
-Luna! On est dans un village paumé au fin fond de l'Alsace. Y a pas de criminel!
-C'est pas un village paumé, c'est une ville, je corrige.
-Mais que t'est-il arrivé, Luna Lambert? Je croyais que tu étais une fille timide!
-Tu veux dire une "timide coincée du cul"? le citai-je avec un ton accusateur dans la voix. Ainsi qu'une plache à pain?
Il se fige. Il ne rigole plus et me lance  un regard de pitié. Ou de tristesse?
-Je suis désolé de t'avoir dit ça. J'étais con.
-Oui, c'est vrai, je confirme.
-Je vais te dire un truc, okay? Et il va falloir que tu t'en souviennes toute ta vie.
-D'accord.
-Tu es extraordinaire, Luna. Tu es belle et intelligente avec un cœur immense et ne laisse personne salir ta lumière. Promis?
-Promis.
Puis, sans prévenir, il se penche et m'embrasse. Un pieu baiser. Tout doux.
-Tu n'es pas une timide coincée du cul, Luna. Tu es tellement plus. Aies confiance en toi.

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