Chapitre 9

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[Lire avec le média ci-dessus]

-Alors que dire... Ou plutôt que ne pas dire... Parce que je pourrai vous raconter tellement de choses...

Tout d'abord, Anna et moi, nous nous connaissions depuis la maternelle. Je me souviens, la première fois que je lui avais parlé, je lui hurlait dessus parce qu'elle m'avait pris mon goûter. Dis-je le sourire aux lèvres.

Je me souviens aussi que quelques heures après, on jouait ensemble comme si on était amies depuis toujours. Et depuis ce jour là, on ne s'est plus jamais quittée.

La première année au collège, le jour de la rentrée, on a appris que nous n'étions pas dans la même classe. Pour nous, c'était la fin du monde. Alors on a dit à nos parents de demander au principal de nous remettre ensemble ou bien on ne travaillerait pas de l'année. Dis-je en laissant échapper un petit rire.

Et oui, il faut dire qu'à l'époque, on avait déjà un sacré tempérament. Je me souviens qu'en troisième année de collège, on avait fait une pétition pour avoir des meilleurs repas à la cantine. Vous savez, on avait beau n'avoir que 12 ans, on était déjà très engagée. Dis-je en rigolant.

Je me rappelle, que lors de l'arrivée au lycée, nous étions super excitées à l'idée de rentrer dans le monde des plus grands. Je me souviens d'ailleurs qu'Anna ne c'était pas gênée pour nous faire remarquer dès le premier jour en débutant une bataille d'eau dans le self. Et puis au fur et à mesure que les années passaient, c'était devenu une tradition. Chaque rentrée scolaire commençait par la fameuse bataille d'eau.

Ah oui, je me souviens aussi que quand les matins je n'arrivait pas à me lever, si je puis dire, tous les matins, elle débarquait dans ma chambre en me disant de me dépêcher car on risquait d'être en retard. Elle passait par la fenêtre alors je ne vous raconte pas la peur que j'avais eue en la voyant la première fois traverser mes rideaux. 

On a tout fait ensemble. On a tout vécu ensemble. En passant du rire aux larmes, de l'amour à la peine. On partageait tous.

Et puis tous ces moments étaient devenus des habitudes. Des choses qu'on répétait tous les jours si il le fallait. C'était une manière pour nous d'être toujours heureuse... Faire continuellement des choses qui nous plaisaient.

Je me souviens de ce Thanksgiving que j'avais passé avec elle. Elle aimait cette journée. Je crois même que c'était sa préférée. Elle prenait toujours plaisir à tout organiser, à tout préparer.

Ce jour-là, Anna m'avait confié qu'elle voulait faire de grandes choses plus tard. Elle voulait changer le monde car elle n'aimait celui dans lequel nous vivions actuellement. Je pense qu'elle en aurait tout à fait était capable. Qu'elle avait des ambitions et la soif pour ça.

Je me souviens d'un jour en particulier. C'était un lundi. On n'avait pas envie d'aller en cours alors Anna m'avait convaincu de ne pas y aller. Alors ne sachant pas où aller, on a roulé. Toute la journée. Puis on a trouvé un endroit. Un endroit qu'on a appelé The Gold Hill. C'était Anna qui avait eu l'idée. Elle disait que c'était les épis de blé qui lui avaient soufflé. Et donc ce jour là, on s'est allongée dans l'herbe pendant un long moment sans rien dire. C'était moi qui avais brisé le silence. Je lui avais demandé si elle pensait que cet instant pouvait durer. Et à la fin de cette longue discussion, elle avait fini par dire: Nous sommes seul maître de notre destin.

Et c'est aujourd'hui, que pour moi, cette phrase prend enfin tout son sens. Je me demande si son destin ne lui avait pas échappé... car sinon elle serait sûrement là avec nous. 

Remarquez, je pense qu'elle est là. Oui je pense qu'Anna ne disparaîtra jamais. Qu'elle restera toujours présente à nos côtés. Dans nos coeurs et nos esprits.

Ce qui est sûr, c'est qu'elle ne méritait en aucun cas de mourir. Je pense d'ailleurs que personne ne mérite de mourir. Mais elle avait encore tellement de choses à vivre. Quand je pense à la fac, où nous aurions dû aller, à ces jours futurs passés sans elle.

Je crois que la vie, est comme une longue maladie dégénérative. En tout cas, je pense que nous pouvons la considérer comme telle. Nous savons que la maladie triomphera un jour ou l'autre, mais personne ne sait quand. C'était sûrement ça la part de mystère qu'aimait Anna. Le fait de vouloir tout planifier même en sachant que cela pouvait prendre fin à n'importe quel moment.  Mais elle avait beau dire que nous étions maître de notre destin, une partie de notre vie est déjà écrite. Le début et la fin. Nous ne pouvons changer que ce qui se trouve entre les deux. Et vivre la vie que nous souhaitons vivre.

J'aimerai pouvoir dire que je donnerai ma propre vie pour qu'elle soit là. Mais je ne peux pas. Et puis je pense que ça ne serait pas ce qu'elle voudrait. Non, je pense que ce qu'elle voudrait c'est que je la fasse vivre à travers moi. Oui, parce qu'à présent je ne vis plus juste pour vivre. Je vis pour la faire vivre elle. Pour perpétuer sa mémoire. Et pour que je sache que où que j'aille elle sera toujours avec moi.

Mais pour tout vous dire, j'ai peur. Oui je crois que c'est ça en fait. J'ai peur de l'oublier. Peur qu'à force de me remémorer son image, je n'arrive plus à la voir. Peur qu'à force de me rappeler sa voix, je n'entende plus son rire. Peur qu'à force de me rappeler son visage, je ne distingue plus son sourire. Peur de ne plus savoir qui elle est. J'ai peur d'oublier ce pourquoi elle vivait. Ce pourquoi elle me disait que la peur de mourir n'était rien à côté de celle de ne pas vivre.  J'ai peur qu'elle pense que je ne sais plus qui elle est.

Mais je veux qu'elle sache, que où qu'elle soit, je la trouverais toujours.

Que qui qu'elle soit, je saurais toujours qui elle est.

Et que même si elle n'est plus là, elle est inoubliable.

RevengeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant