Sous La Voute Étoilée.

Mars

En quittant le domicile de ses parents ce soir, Harry se dit qu'il avait sans doute fait là une grossière erreur. Inviter Louis n'était pas une mauvaise chose en-soi. Le souci, c'était qu'il l'avait fait beaucoup trop tôt. Quelle idée il avait eu de lui proposer samedi soir ? Pourquoi pas dimanche, voire lundi, ou même le samedi suivant ? Ainsi, il aurait sans doute pu se préparer psychologiquement à tout ce que cette rencontre pourrait amener, ou non. C'était pire que de se préparer à aller vivre dans l'espace pendant six mois.

Grand Dieu, mais qu'allait-il bien pouvoir dire à Louis sans passer pour un abruti ? Et lui, comment allait-il réagir face à Harry après tous les textos qu'il lui avait envoyé pendant son voyage ? Rien n'allait plus être pareil ! C'était une évidence ! Ils allaient agir comme deux adolescents et perdre un temps dont ils ne disposaient pas forcément. Ou peut-être bien que si, mais savait-on jamais !

Depuis son réveil, Harry ne cessait de songer à des scénarios catastrophes digne des plus grands films Hollywoodiens. Il avait commencé par imaginer Louis arriver avec ses valises, lui rendant ses clés, et ne prenant pas le moindre temps pour discuter avec lui. Ensuite, et c'était là que son imagination avait atteint le sommet de son art, il avait laissé son esprit croire que, par vengeance de son si long séjour spatial, Louis lui annoncerait s'être engagé dans l'armée pour avoir une véritable raison de partir à son tour loin de lui pendant des mois. Finalement, tapi-là dans un coin de son cœur, Harry avait succombé à cette image attristante d'un Louis s'avançant vers lui au bras d'un autre homme et le lui présentant comme étant son ami. Son ami avec un grand A, son boyfriend comme il lui aurait dit pour marquer les choses.

Alors oui, sans doute aurait-il dû reporter ce rendez-vous et se laisser encore du temps pour s'y faire. Mais à dix minutes de la rencontre, il était définitivement trop tard pour annuler. Comme synonyme d'un bon présage, le jeune homme avait convié son locataire à le retrouver au café où ils s'étaient rejoints avant son départ. Si la soirée avait si bien terminée cette fois-là, peut-être qu'il ne pourrait en être que de même aujourd'hui. Et puis la surprise qu'il avait préparée pour Louis lui tenait à cœur. Le jeune garçon ne trouverait peut-être pas cela fou, mais de cette manière Harry comptait s'ouvrir à lui bien plus qu'il ne l'avait fait auparavant.

« Monsieur, vous avez choisi ce que vous désirez ?

- J'attends quelqu'un, on commandera une fois tous les deux.

- Très bien. A tout l'heure.

- Merci beaucoup. »

La serveuse était gentille, souriante, c'était forcément de bonne augure. Harry voulait s'accrocher à tout ce qu'il pouvait pour se certifier par avance que rien ne pouvait mal se passer. Mais Louis arriva.

Pire encore que dans les tréfonds de son imagination, Harry sentit son cœur se contracter violemment. Louis était en train de rire avec un jeune homme qui était si proche de lui qu'ils ne pouvaient pas s'être croisés dans la rue. Et si les deux garçons prenaient ensemble la direction de la porte du café, c'était forcément qu'ils y venaient comme un duo. Il restait deux choix possibles auquel Harry songea en voyant la porte du commerce s'ouvrir : soit Louis avait bel et bien quelqu'un dans sa vie dorénavant, soit il était venu avec un ami parce qu'il ne voulait pas être seul avec Harry. Aucune des deux options n'enchanta le jeune astronaute, car chacune laissait dire que ce que Louis avait pu un jour espérer à leur égard n'était plus. Harry s'était jeté seul dans une bataille que Louis avait fini par abandonner. Il le savait. Sept mois, c'était beaucoup trop long pour deux quasi-inconnus.

« Harry ! »

Si ledit Harry avait pu oublier quelque peu les traits de son ami durant son voyage, ils lui furent vivement jetés au visage lorsque celui-ci s'approcha un sourire aux lèvres. Louis était, aussi improbable cela était-il, plus beau qu'avant, le soleil Toulousain ayant coloré sa peau et faisant ressortir ses yeux plus encore qu'ils ne l'étaient déjà. Sortant de son admiration, Harry se leva de sa chaise et serra la main que lui tendait son ami. Leur dernier contact avait scellé leurs lèvres et voilà qu'aujourd'hui, il n'y avait rien d'autre que leurs paumes qui se liaient.