9. Jour 6 : Secrets

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Je devrais attendre la nuit pour faire cette mission, pour être certaine de ne prendre aucun risque. La tension qui planait suite aux événements avait aussi touché mes autres camarades : Thomas semblait sur ses gardes au moindre bruit ou à la moindre personne nous approchant. J'avouais que certains regards me faisaient secrètement frémir, je commençais à douter de ce qui devaient d'abord être mes alliés. Des gens comme moi.
Et si c'était ce qu'on attendait de moi ? Si l'on souhaitait que chacun se retourne contre son camp ? Si ils voulaient faire imploser notre groupe ?
Au vue de ma mission d'aujourd'hui, celà me semblait évident : on me poussait à ne faire confiance à personne.
Ou peut-être tout simplement à me rendre folle.
J'avais très envie de voir comment allait Brenda, mais aussi très peur : je croyais avoir cerner son caractère dès les premiers jours, mais j'avais faux sur toute la ligne. Armin et Thomas me conseillaient d'attendre, que Armin passait régulièrement la voir et qu'il lui parlerait.
Tout ce que j'avais appris est que lorsqu'elle dormait, elle n'avait pas arrêté de palsmodier mon nom.
Pour le reste de l'après-midi, je décidai d'aller me reposer un peu : il ne devait plus rester beaucoup de temps avant la "tombée de la nuit".
Mais alors que je me dirigeai vers ma chambre, je fus bousculé maladroitement, comme si cette personne semblait complètement perdue. Surprise, je m'apprêtai à demander que l'on s'excuse quand je m'apperçus que c'était Thomas qui m'avait poussé. Chancelant, il marcha comme si il ne m'avait pas vu, puis partit dans une autre direction toujours en me tournant le dos.
-Thomas ! J'arrivai à sa hauteur et fus surprise de découvrir son visage blafard, et ses yeux vides d'expression.
-Est-ce que ça va ? Demandai-je en posant une main sur son épaule.
-Oui, oui, répéta t-il, pourquoi ça n'irait pas ?
Parce que tu aurais pu jouer dans un film de zombie sans maquillage, eu-je envie de répondre.
-Tu n'as pas vraiment l'air bien, tu veux t'asseoir ?
-T'inquiète pas, je t'assure que je suis bien.
Il repartit aussi rapidement qu'il était arrivé, ne me laissant pas de temps pour d'autres interrogations.
Tout devient de plus en plus bizarre, pensai-je, et si mon coéquiper le devient aussi, rien ne va pour s'arranger.
J'abandonnai de le poursuivre à travers ce labyrinthe géant; il ne me parlerait pas plus et serait sûrement plus mal encore de savoir quelqu'un à ses trousses. J'allai directement à ma chambre et m'installai dans les couvertures fraîches sans prendre le temps de me changer. Je m'allongeai sur le dos, fermant doucement les yeux, mais le sommeil ne s'offrait pas à moi, j'étais trop impatiente de pouvoir réaliser ce que l'on me demandait. Je restai alors ainsi pendant plusieurs heures, dans ce  demi sommeil que je déteste tant.
Un peu plus tard Thomas me rejoignit, l'air encore plus abbattut que tout à l'heure.
-Thomas, parle moi si tu en as envie, parle à Armin, mais ne reste pas comme ça, ça n'arrangera rien. Tu as vu quelque chose d'étrange ? Tu as le chiffre 4 ? Je prononçai cette dernière phrase plus doucement, tant mon coeur s'était serré.
-Non, tout va bien. Tu sais, dit-il en s'asseyant sur son lit, je pense juste à mes parents, à la vie que je menais. J'essaye encore de me rappeller comment, pourquoi, ai-je atterrit ici, et je ne peux me rappeller de rien. Et c'est peut-être le pire, ne rien comprendre à ce qui arrive.
Je ne sais pas si il se rendit compte que son ton trahissait ses paroles, si il lu dans mes yeux que je ne crus pas à ce qu'il me raconta. En tout cas il poussa un petit soupir, avant de tirer sur les draps de son lit -il faisait parti de ces rares personnes qui faisaient encore leurs lits le matin- pour rentrer ses jambes, puis continua :
-Je suis fatigué, réellement.
Sans rajouter un mot il se tourna dos à moi et je cru entendre comme un reniflement. J'en convenai de ne pas poser plus de questions aujourd'hui, peut-être qu'après tout, il était simplement fatigué.
Il me fallut attendre longtemps pour que le calme règne enfin sur toutes les chambres. Thomas s'était rapidement endormi, la fatigue l'ayant terrassé. Je posai ma main sur la poignée de fer tout en collant mon oreille contre la porte. Je n'entendis rien, en outre du souffle chaud de Thomas. Lentement, j'abaissai la poignée et m'inflitrai dans le couloir. Un air plus frais s'engouffra dans la chambre, je refermai sans un bruit et commençai ma marche. Mes pas résonnaient sur le dallage, je fus contrainte de continuer sur la pointe des pieds. Arrivée à la salle commune, je repris une démarche naturelle et accélérai ma cadence. Face à tous les casiers, je n'avais que l'embarras du choix. Je décidai de commencer par les noms que je ne connaissais pas, pour me donner une idée du type de missions qui pouvaient être attribués. Aucune information interressantes ne s'offrait à moi, comme si les missions étaient distribuées en fonction des groupes que nous avions formés. Comme par hasard, toutes les infos de notre petit groupe rassemblées nous menaient à une réponse claire. Ainsi les créateurs savaient par avance les affinités que nous allions former ? Tout est si incroyable.

Je fus soudain frappée par une certitude évidente : je devais regarder le casier de Brenda pour en apprendre d'avantage. Celui-ci grinça doucement lorsque je tirai la petite porte métallique vers moi. Je plongeai ma main et sortis tous les papiers présents à l'intérieur. Je les comptai rapidement : ils y étaient tous. Mais pire encore : tandis que je lisais chacun d'entre eux, je me rendis compte qu'elles étaient identiques aux miennes, juqu'à ce que je prenne la dernière en main. Je la relu plusieurs fois, comme pour m'en persuader: tout ce qui se tramait était bien pire que tout ce que j'aurais pu imaginer.

Il faudra absolument que j'en parle à Thomas et Armin, le plus rapiement possible. Je reposai fébrilement les papiers à leur place, pour donner l'illusion qu'ils n'avaient pas été touchés. Je me sentis tout d'un coup beaucoup moins rassurée, même totalement paniquée.
Il vaudrait mieux que je retourne sagement à ma chambre, maintenant. Mais alors que je poussai la porte, je ne pus faire un pas de plus. Je restai devant l'encadrement, pesant le pour et le contre sur l'idée qui venait de traverser mon esprit.
Si je regardais celui de Thomas ? Je lui faisais parfaitement confiance, tout comme pour Armin, mais ne serait-il pas bon de vérifier si l'état de Thomas n'avait pas de rapport avec celà ?
Non, oublie ça, et vite.
Mais je n'arrivais toujours pas à partir, j'en étais incapable.
Pas tant que j'aurais vérifié par moi même. Je me sentis honteuse lorsque le clic du cadenas retentis et que je défis la fermeture.
Je faillis un instant reposer toutes les feuilles que je tenais mais je me ravisais une fois de plus.
Je vu la première feuille, cru à une erreur. Plus je changeai de mot, plus une hystérie sourde grandissait en moi.
Ce n'est pas possible.
Je retournai le papier une première fois, épillai chaque côté de plus en plus rapidement, mon coeur battant la chamade. Je me sentais chanceler, défaillir.
Ce n'est PAS possible.
Des larmes montèrent à mes yeux, lourdes de sentiments, accablantes comme un bloc de pierre.
Je l'avais vu, j'en étais certaine : chaque jour Thomas remettait ses missions dans son casier.
Chaque jour, il me disait ses missions, il était avec moi.
Pourtant...rien. Il n'y avait rien. Tous les papiers étaient vides, toutes des feuilles blanches, aucune mission,
Rien.
Puis une vérité terrifiante s'imposa à moi : Il ne m'a jamais laissé voir ses missions en mains propres..

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