Papa,
18 mai 2015.
Mon monde s'est effondré, Papa. Tu t'es effondré. Et tu ne relèveras pas. Trop de sentiments se bousculent en moi. Je ne sais pas quoi penser. Je ne sais plus comment penser. Tout s'emmêle.
Tu sais, ce matin, je n'ai rien vu venir. Alors bien sûr, je savais que le cancer était plus fort que toi. Mais de là à te prendre la vie...
Ce matin, l'interphone a sonné. C'était Gaëlle. Elle est arrivée en larmes. Les larmes coulaient, coulaient, coulaient en torrent. J'aurais dû me douter que le ciel allait tourner noir. Nono, aussi, s'est mise à pleurer. Et toutes les deux ont pleuré dans les bras l'une de l'autre. Je suis restée spectatrice. J'ai lancé un regard désespéré à Thibaud. Il a détourné le regard. Je me suis approchée des filles. J'ai juste entendu « C'est fini pour Papa ». Les mots sont restés suspendus en l'air. Cette phrase flottait dans l'air. Elle me restait en travers de la gorge, avec un goût amer. Tu sais, à ce moment-là, j'ai arrêté de respirer. Mon cœur a cessé de battre. J'étais tétanisée. Je me suis demandée « Papa, où es tu ? » Je l'ai crié tellement fort dans ma tête que j'ai eu peur de l'avoir dit à haute voix. Tu sais, l'idée de ton absence m'a terrifiée. J'ai eu l'impression de tomber dans le vide. Une chute sans fin. De crier à l'infini. Des larmes salées ont roulé sur mes joues. Depuis cet instant, je n'ai cessé de pleurer, Papa.
Tu sais, quand on est allées à l'hôpital, j'ai prié pour que ça soit une blague. Mais face à ta chambre d'hôpital, j'ai réalisé que mes prières ne servaient à rien. Ce n'était pas drôle comme blague. Tu sais, j'ai entre ouvert la porte et tu étais là. Allongé dans ton lit. Comme si tu dormais. Je n'ai pas pu entrer. Pas tout de suite. Je me suis abandonnée à ma tristesse. Quand, enfin, le courage a fait son apparition, je suis entrée. On m'a dit que je n'étais pas obligée. L'air d'une gamine de 6 ans, j'ai articulé sans réfléchir « Un bisous. » Tu étais tout froid. Mais par-dessus tout, tu avais l'air de dormir. J'ai tenté de me convaincre que tu dormais. Et j'avais réussi. Mais quand on m'a emmené au salon funéraire, j'ai compris que tu t'étais endormi, mais pour l'éternité.
Papa.
Tu ne reviendras jamais, hein ? Tu as décidé de partir ce matin pour un aller sans retour. Mais pourquoi ce matin ? Et pourquoi pas plus tard ? On avait le temps, Papa, on avait le temps. Gaëlle m'a dit que tu n'avais pas souffert, que tu t'étais endormi. " Tout simplement. " Alors pourquoi tu ne te réveilles pas ? Tout simplement...
Je ne crois pas être assez forte, Papa. Tu n'as pas le droit ! Et comment je vais faire maintenant ? Comme je suis supposée gérer ça ? Comment une enfant de 15 est censée se débrouiller sans son père ?
Ma colère est forte, Papa. Mais pas autant que mon chagrin. Alors, c'est vrai, je t'en veux. Je t'en veux d'être parti. Loin de moi. Là où je ne pourrai plus te voir, te parler, t'entendre. Là où nous ne pourrons plus rire.
Un monde sans toi me paraît infaisable. Il va forcément finir par s'arrêter de tourner, puisque tu n'es plus là.
On dit que quand une personne meurt, elle devient de la poussière d'étoiles, voir même une étoile. Mais, Papa, tu étais déjà mon étoile.
Je t'aime fort.
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Dear Dad
Non-Fiction« Dear Dad » Ce recueil contient de nombreuses lettres. Lettres destinées à mon père. Cet homme emporté par le cancer bien trop tôt. J'ai commencé à lui écrire depuis sa mort, et je n'ai jamais vraiment cessé depuis. J'ai décidé de les publier par...