Dear Dad

94

Papa, 

C'est tout bête, vraiment. Aujourd'hui, j'ai mangé des pommes rissolés. Tu sais, ces pommes de terre coupées en carré ? Et ça m'a fait pensé à toi. Tu dois te dire que je pense à toi vraiment n'importe quand, et pour n'importe quelle raison. C'est sûrement vrai. Les flashs ne me quittent pas, et parfois je pense à certains moments qu'on a partagé ensemble. Des moments que je chérie et que je revis, seule, sur mon plafond, quand le seul bruit est le silence de la nuit. 

Le rapport entre toi et les pommes rissolés ? Cette soirée - je crois bien que c'était la dernière - qu'on a fait tous les deux. Il était tard. Tu avais encore assez de force pour me faire à manger, et tu avais fait des pommes rissolés. En réalité, je ne sais pas si tu avais encore réellement de la force. Ou alors as-tu utilisé le peu que tu avais pour faire face devant moi ? Pour faire comme si tu allais bien ? 

On était devant la télé. Je ne sais plus très bien quelle chaîne ni quel programme on regardait. Tu faisais semblant de t'y intéresser, et moi je jouais sur mon téléphone. Tu m'as soudainement demandé ce que je faisais. Je t'ai répondu que je jouais à ce nouveau jeu et que j'étais encore au premier niveau. J'ai ri en disant que je ne semblais pas très très forte. Tu m'as demandé de t'expliquer. Et c'est là qu'on a passé la soirée ensemble à jouer à 94%. 

Tu étais tellement fort. On a pensé un bon moment. On riait énormément. Et c'est comme ça que 94% est devenu notre jeu. On y jouait dès qu'on était ensemble et qu'on avait un moment. Parfois, j'avançais toute seule et tu n'aimais pas ça. " Comment ça tu as joué sans moi ? " me disais tu. 

C'était un bref éclat de joie dans toute la noirceur qui nous entourait. Dans ses petits moments, tu semblais te défaire des démons qui rôdaient en toi. 

Aujourd'hui, je n'arrive plus à jouer à ce jeu. Pas sans toi. 

Je t'aime fort.