Mon tuteur

"C'est toi que je veux"

La matinée passa plus rapidement que prévu et l'heure du déjeuné arriva vite, pour mon plus grand bien. Dans la queue à la cantine, Émile et moi parlons de tout et de rien, moi écoutant et lui parlant. Une fois nos plateaux en mains, garnis de l'infecte repas tout inclu de la cantine, nous prirent place à une table libre un peu plus loin. Le garçon entame l'histoire palpitante de sa mésaventure avec un client il y a de cela quelques jours, alors qu'il travaillait à l'épicerie du coin. Il ne semble pas très à l'aise de raconter ce fait, si on se fie à sa poigne plus ferme autour de sa fourchette et à sa mâchoire qui se crispe, sans doute dû à la nostalgie du moment et de ce qu'il a ressentit à cet instant.

-Je rendais la monnaie à cet homme et là, alors que je pensais qu'il partirait et m'oublierait de sa journée, il me crie qu'il lui manque un dix cent. Alors je m'excuse et m'apprête à lui rendre ce qu'il lui manquait quand, Le châtain souffle et ne semble pas très emballé de raconter la suite de son récit. Il se met à dire que je fais mal mon travail, qu'à nous les jeunes on ne peut rien nous demander, que de nos jours on ne peut être mieux servi que par soi-même, bref, tout ce qu'un client insatisfait aime déblatérer à un jeune sans expérience comme moi.

Émile semble reprendre sa joie d'un coup, laissant sa mauvaise humeur passagère derrière lui. Puisque mon côté curieux reprend le dessus sur celui qui se fiche de tout autour de lui, je fais un signe de main à mon ami pour qu'il dévoile la suite. Il affiche un grand sourire en voyant mon signe de curiosité plutôt rare face à ce qu'il me dit à l'habitude. Il reprend une grande bouffée d'air et continu.

-Mais comme tu le sais, je suis une personne susceptible par dessus les bords, même si je ne reste jamais fâché très longtemps. J'ai pas pu m'en empêcher. Je l'ai regardé dans les yeux, j'ai pris son précieux 10 cent et je l'ai balancé dans une des allées.

Émile s'esclaffa bruyamment, attirant l'attention de certains étudiants autour de nous. Parmi eux je pu distinguer Chris, qui regardait Émile d'un mauvais oeil. Est ce qu'il pense la même chose de lui que moi je pense de Johnson? Je mis à part ce que je venais de voir et me concentra à nouveau sur ce que disait le brun. Je pense à cet homme qui avait peut être eu une mauvaise journée et qui avait le moral à terre. J'imagine ce qu'il a dû ressentir face au geste de l'épicier, ça n'a pas dû être plaisant pour lui. Bien sûr, il n'avait pas à se défouler sur mon ami mais la réaction du brun n'a pas dû aider non plus à sa mauvaise humeur. Bref, nous nous levâmes après avoir terminé de picorer nos assiettes. Je regarda l'heure et constata que nous devions bientôt retourner en cours. Nous sortîmes rapidement de la cantine et marchèrent dans les couloirs en parlant.

PDV CHRIS

Zack est avec Émile et m'ignore totalement quand ce gars est avec lui. Ça me fait peur. Et c'est douloureux de le voir avec ce gars. Pourquoi est-ce qu'il traîne toujours avec ce Émile ces temps-ci? Je ne suis plus assez bien pour combler ses besoins? Lui trouve t'il quelque chose en particulier? On devrait avoir une discussion Zack et moi, sinon je peux continuer de paniquer ainsi longtemps encore. J'aimerais avoir un ami à qui me confier, mais je ne peux pas. Oh, j'en ai des amis, là n'est pas le problème! Seulement, comment leur dire que je couche avec un de mes élèves de presque 8 ans de moins que moi, qui est encore mineur. Une mauvaise pensée effleura mon esprit l'espace de deux secondes. Le rendre jaloux?.. Non, c'est malsain dans un couple, la jalousie n'est pas la bienvenue.

Pourtant tu es jaloux quand tu le vois avec le brun.

Moi? Jaloux? Peut-être bien oui, je suis dans cet état d'esprit en le voyant avec Émile. 

Mickaël passa soudainement à côté de moi et me tira par le bras pour que je suive sa direction. Je ne l'avais même pas remarqué, trop obnubilé par mes pensées. Il n'est pas normal dans ses gestes, dans sa façon de marcher et sa poigne sur mon bras n'est pas comme celle d'un ami. Il a presque l'air de caresser mon avant-bras, tout en maintenant une bonne poigne sur celui-ci. Sans même que j'ai le temps de comprendre on était déjà dans sa classe. Il ferma la porte avec son pieds et me regarda avec des yeux de prédateurs. Il ne voulait pas parler. Je le savais, je le sentais depuis le moment où il m'avait pris par le bras et m'avait emmené avec lui. Johnson s'approcha et je recula lentement, au même rythme que ses pas dans ma direction. Une boule se formait dans le fond de ma gorge au fur et à mesure qu'il approchait de moi. Je voulais m'enfuir mais la porte était derrière mon kidnappeur. J'heurta finalement le bureau de Mickaël, m'empêchant de reculer plus. Il fallait bien que ça arrive, à force de marcher à reculons.

-Qu'est ce que tu me veux mick'? Lui demandais-je la voix tremblante.

-Toi, c'est toi que je veux Chris.

***
~Un viol à venir?~